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Interception d'ondes cellulaires: les centres d'urgence 911 du Québec sont inquiets

Interception d'ondes cellulaires: les centres d'urgence 911 du Québec sont inquiets
Radio-Canada

L'Association des centres d'urgence du Québec trouve inquiétante l'utilisation d'appareils d'espionnage, qui peuvent empêcher certains utilisateurs de téléphones mobiles de communiquer avec les services d'urgence. Ces appareils ont récemment fait l'objet d'une enquête de CBC/Radio-Canada.

Un texte de Brigitte Bureau

« L'Association est préoccupée par toute situation qui pourrait rendre difficile ou impossible l'accès au service 911 pour la population », nous a dit sa présidente, Carole Raîche, en entrevue.

Une enquête récente de Radio-Canada a révélé la présence d'intercepteurs d'IMSI à Ottawa et à l'aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau, à Montréal.

En imitant le fonctionnement d'une antenne de téléphonie cellulaire, ces appareils s'emparent du signal des téléphones mobiles à proximité et captent leurs données.

Du même coup, ils peuvent aussi empêcher les usagers de faire des appels, y compris des appels d’urgence au 911. Dans de tels cas, les abonnés ne sauraient pas pourquoi ils n'ont pas été en mesure de joindre les premiers répondants.

À la suite du reportage de Radio-Canada, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et d'autres corps policiers ont reconnu, pour la première fois, qu'ils utilisent des capteurs d'IMSI dans le cadre de leurs enquêtes.

La GRC a aussi confirmé que certains appels au 911 peuvent ne pas fonctionner lorsqu'elle déploie ces appareils. Toutefois, la GRC dit prendre toutes les mesures nécessaires pour réduire l'impact possible sur les appels d'urgence. Par exemple, la police fédérale n'active les intercepteurs d'IMSI que trois minutes à la fois, suivi d'une pause de deux minutes.

« On va interpeller les agences qui nous réglementent », a affirmé Mme Raîche, tout en indiquant qu'une lettre sera envoyée au ministre québécois de la Sécurité publique et au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) « pour souligner notre préoccupation » et « voir quels gestes ils entendent poser dans ce dossier-là ».

Mme Raîche a d'ailleurs souligné que son association n'avait pas été mise au fait par les autorités des répercussions possibles de cette technologie sur les appels au 911 et qu'elle l'a appris en regardant le reportage de Radio-Canada.

Le ministre Coiteux demande des vérifications

Le ministre québécois de la Sécurité publique, Martin Coiteux, a demandé que des vérifications soient effectuées concernant l'impact potentiel de l'utilisation de tels équipements sur les appels cellulaires. C'est ce que son bureau a indiqué, par courriel, à Radio-Canada.

« Nous pouvons vous confirmer que la Sûreté du Québec n'utilise pas de tels appareils », a précisé le bureau du ministre.

De son côté, le CRTC s'en lave les mains. « Le Conseil réglemente les fournisseurs du réseau 911 et non pas les utilisateurs d'appareils, tels les intercepteurs d'IMSI », nous a-t-on répondu.

Le CRTC a ajouté qu'il n'avait pas eu connaissance d'incidents où des appels au 911 n'auraient pas été acheminés. L'organisme nous a référé à la GRC pour obtenir davantage de détails sur l'aspect technique de ces appareils. Pourtant, le CRTC a pour mandat, entre autres, de s'assurer que les Canadiens aient accès à des services de communications d'urgence, comme le 911.

L'entreprise Roger Communications aussi inquiète

Par ailleurs, l'un des plus importants fournisseurs de téléphonie cellulaire au Canada, Rogers Communications, a déjà alerté le gouvernement canadien quant aux risques associés à l'utilisation des intercepteurs d'IMSI pour les services d'urgence.

Dans le cadre de la récente consultation fédérale sur la sécurité nationale, l’entreprise a soumis un rapport au gouvernement fédéral en décembre 2016.

Rogers y note que l'utilisation des intercepteurs d'IMSI n'est pas décelable par les réseaux sans fil et que des clients peuvent ne pas être en mesure de faire des appels lorsqu'ils sont activés.

Ceci est particulièrement important en ce qui concerne l'interférence possible avec l'accès aux services d'urgence et au service du 911.

Extrait du rapport de Rogers Communications

Dans ce même document, Rogers Communications demande au gouvernement fédéral de tenir une consultation expressément sur les intercepteurs d'IMSI « afin de mieux identifier le type de surveillance judiciaire et la transparence nécessaires » et de déterminer « comment cette technologie peut être utilisée sans affecter négativement les clients et les réseaux sans fil ».

Sécurité nationale: des résultats bientôt

Au bureau du ministre fédéral de la Sécurité publique, Ralph Goodale, on se fait rassurant. Selon lui, l'utilisation de ces dispositifs d'interception par les organismes de sécurité est limitée et encadrée par les tribunaux.

Le bureau du ministre ne s'est toutefois pas prononcé sur la demande de Rogers Communications de tenir une consultation sur les capteurs d'IMSI. Il affirme que le gouvernement publiera un rapport sur les résultats des consultations sur la sécurité nationale « dans un avenir rapproché ».

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