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Le mammouth dans la pièce: est-ce le retour des projets de loi omnibus?

Le mammouth dans la pièce: est-ce le retour des projets de loi omnibus?
Canadian Prime Minister Justin Trudeau attends a ceremony at the city hall of Arras, France, as part of events to commemorate the 100th anniversary of the Battle of Vimy Ridge, April 9, 2017. REUTERS/Philippe Huguen/Pool
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Canadian Prime Minister Justin Trudeau attends a ceremony at the city hall of Arras, France, as part of events to commemorate the 100th anniversary of the Battle of Vimy Ridge, April 9, 2017. REUTERS/Philippe Huguen/Pool

Justin Trudeau avait promis d'abandonner les projets de loi « mammouths », une pratique courante sous les conservateurs qu'il jugeait antidémocratique. Mais son gouvernement vient de déposer un projet de loi de 300 pages. Et il s'attire les foudres de l'opposition.

Une analyse de Fannie Olivier

Il y a des promesses qui marquent. Légaliser le cannabis ou réformer le mode de scrutin sont du nombre. Et il y a les engagements qui n’intéressent qu’une poignée d’initiés, comme celui de faire cesser le dépôt de projets de loi si volumineux que les parlementaires peinent à les étudier.

Ainsi, la promesse « de mettre un terme à cette pratique antidémocratique » que sont les projets de loi omnibus que l’on retrouve dans la plateforme libérale n’a pas fait les manchettes en 2015.

Pourtant, l’étude scrupuleuse des projets de loi revêt une importance toute particulière dans le fonctionnement démocratique. Les députés doivent pouvoir les analyser en profondeur pour s’assurer que le gouvernement ne tente pas d’y dissimuler quelque chose. Les journalistes tentent aussi de les lire avant que le cycle de nouvelles commande qu’ils se penchent sur autre chose.

Résultat : c’est le public qui peut s’en faire passer « de petites vites » si les projets de loi ont l’épaisseur d’une brique.

Jeudi, le gouvernement libéral a déposé le projet de loi C-44 sur la mise en œuvre du budget, qui frise les 300 pages. C’est grosso modo deux fois plus que celui pour le tout premier budget de Bill Morneau, l’an dernier.

On n’est pas si loin des 400 pages que contenait C-38, déposé en 2012 par les conservateurs, qui avait provoqué la colère de l’opposition et rendu populaire le terme « mammouth », né sous la plume d’une collègue du journal Le Devoir. Ce projet de loi conservateur était toutefois un véritable fourre-tout, qui modifiait 69 lois, dont le processus d’évaluation environnementale.

Aux yeux des troupes de Justin Trudeau, C-44 n’est pas un projet de loi omnibus, justement parce que ce qu’il contient se limite à ce qu’on trouvait dans le budget.

Mais l’opposition signale qu’il modifie une trentaine de lois, dont certaines ont peu à voir avec l’économie ou les mesures budgétaires, comme la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, le Code canadien du travail et la Loi sur les aliments et les drogues.

Le rôle de directeur parlementaire du budget revu

L’une des sections du projet de loi qui fait grincer des dents l’opposition porte sur le mandat du directeur parlementaire du budget (DPB), le chien de garde du gouvernement en matière de Finances.

L’actuel DPB, Jean-Denis Fréchette, a d’ailleurs tiré rapidement la sonnette d’alarme et exprimé de nombreuses inquiétudes devant les changements proposés dans la loi. Car s’il obtient le statut d’agent indépendant du Parlement – ce qu'il réclamait depuis longtemps –, d’autres éléments le laissent songeur.

«Ce projet de loi, avec de bonnes intentions et de bonnes annonces, est arrivé également avec certaines surprises restrictives, un encadrement qui m’apparaît particulier.» - Jean-Denis Fréchette, directeur parlementaire du budget

Le projet de loi prévoit notamment qu’il soumette pour « approbation » aux Communes et au Sénat son plan de travail annuel, ce qui fait sourciller M. Fréchette, qui se demande s’il pourra s’attabler en cours d’année sur des sujets qui découleront de l’actualité. Par ailleurs, C-44 ne prévoit pas de mécanisme coercitif pour que le DPB puisse exiger l’information dont il a besoin pour faire ses analyses auprès des ministères et des agences.

Les craintes de M. Fréchette sont d’ailleurs partagées par son prédécesseur, Kevin Page.

Devant une telle levée de boucliers, les libéraux semblent finalement disposés à amender le projet de loi sur les dispositions qui touchent son mandat. S’ils souhaitent éviter les comparaisons peu flatteuses avec les conservateurs, ils devront faire preuve d’une ouverture similaire en ce qui concerne le reste du projet de loi et s’assurer que les parlementaires aient le temps de s’y attarder comme il se doit.

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