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La Belle, la Bête et Gaston nous donnent une parfaite leçon de consentement sexuel

«La Belle et la Bête» nous donne une parfaite leçon de consentement
WALT DISNEY PICTURES

Une belle robe jaune, un petit village où tous les habitants se disent bonjour, un chandelier, une théière et une horloge meilleurs amis du monde: bienvenue dans La Belle et la Bête. Vous connaissez certainement le dessin animé de Disney sorti en 1991, le film de Jean Cocteau de 1946 et vous irez peut-être voir la nouvelle version avec Emma Watson dans le rôle-titre qui sort ce mercredi 22 mars.

C'est donc l'histoire d'une jeune femme qui, pour sauver son père, est emprisonnée à sa place par une ombrageuse et effrayante bête dans un château qui se trouve lui-même au beau milieu d'une forêt remplie de loups. À la fin, ils tombent amoureux et la bête se révèle être un beau prince. Une belle leçon de vie: Messieurs, pour faire fondre les femmes, emprisonnez-les et attendez que votre charme fasse effet.

Sauf que l'histoire est un peu plus compliquée que cela, en particulier à cause d'un personnage secondaire, Gaston. Et en ce sens, elle est une bonne démonstration de la notion de consentement et de ses subtilités. L'un des reproches régulièrement faits à ce conte de fées est de mettre en avant une histoire d'amour entre une captive et son bourreau, de glorifier le syndrome de Stockholm. Le vrai danger est pourtant à chercher ailleurs...

Belle, victime du syndrome de Stockholm?

Interrogée sur le sujet, Emma Watson, féministe engagée, s'en est défendue avant même la sortie du film. "C'est une chose avec laquelle j'avais beaucoup de mal au début", explique l'actrice interrogée par The Entertainment. "Belle se dispute en permanence et est toujours en désaccord avec la Bête, rappelle-t-elle. Elle n'a aucune des caractéristiques de quelqu'un qui développe un syndrome de Stockholm parce qu'elle garde son indépendance, elle garde son indépendance intellectuelle."

D'ailleurs, la nouvelle version de La Belle et la Bête est allée plus loin dans la peinture des sentiments naissants entre les deux protagonistes. Les scènes inédites permettent de mieux comprendre comment un personnage aussi indépendant que Belle peut éprouver des sentiments à l'égard d'un ravisseur.

Après que la Bête l'a sauvée des loups, Belle rentre volontairement au château pour le soigner. Le film montre ensuite comment les deux personnages partagent leur intérêt pour la littérature, comment ils partent en escapade romantique grâce à un livre enchanté ou encore comment ils découvrent ensemble le destin de la mère de Belle. Ils partagent ainsi une intimité qui crée les conditions pour que se développent des sentiments amoureux. Le postulat de départ, la captivité, ne fait plus partie de l'équation.

La vraie bête, c'est Gaston

Dans cette histoire, la Bête n'est pas celle qui en porte le nom. Souvenez-vous de Gaston, le vrai méchant de cette histoire. Cette montagne de muscles, incapable d'ouvrir un livre, qui vit avec la certitude que Belle ne rêve que d'une chose, se marier avec lui. Cette brute qui fait rêver les filles du village. Voilà le vrai danger, un péril bien plus effrayant que la belle-mère de Blanche-Neige, l'oncle de Simba ou Ursulla, la sorcière de la Petite Sirène. Parce que les Gaston existent dans la vraie vie, eux.

À chaque fois que son chemin croise celui de Belle, Gaston n'entend ni ne respecte ce que dit ou fait la jeune femme. Quand il la coince contre un mur pour tenter de l'embrasser, la seule façon pour Belle de se libérer est de le pousser hors de chez elle, dans la boue. "Tout le langage corporel de Belle crie 'Non!'", rappelle la blogueuse et romancière américaine, Sierra Dawn, qui a écrit un décryptage précis du consentement dans le dessin animé de 1991.

Et en cela, l'attitude de Gaston est on ne peut plus opposée à celle de la Bête. Après la fameuse scène du bal, quand Belle et la Bête partagent un moment sur la terrasse du château, ce dernier lui demande si elle est heureuse sans la regarder. "Oui", répond Belle. Quand la Bête s'apprête à lui déclarer son amour, il regarde son visage et se rend compte qu'un voile de tristesse s'est en fait emparé de la jeune femme. Elle s'inquiète pour son père qui vit désormais seul loin du château.

"Ses mots lui avaient dit qu'elle était consentante, son langage corporel dit l'inverse et il a répondu au langage corporel", remarque Sierra Dawn. Dans le film, de nombreux changements ont eu lieu dans la psychologie des personnages, en particulier chez Belle. En revanche, tout le travail de Luke Evans, l'acteur qui incarne Gaston, aura été de le rendre "aussi sombre qu'un personnage de Disney puisse l'être".

Ce personnage misogyne est une invention du dessin animé de 1991 qui n'existe ni dans la nouvelle originale, ni dans le film de Cocteau. Gaston est un harceleur qui empoisonne la vie de tout le village. Mais ses excès lui sont pardonnés grâce à son passé de héros de guerre. D'ailleurs, il ne voit en Belle rien d'autre qu'une nouvelle bataille à mener et à gagner, quel qu'en soit le prix.

"Vous allez voir cet homme devenir un parfait monstre au fil du film", prévient Luke Evans. Pour Gaston, seul posséder Belle compte. Et pour cela, il n'hésite pas à monter le village entier contre Maurice, le père de Belle, puis contre la Bête. Les ignorants suivront alors la brute sans réfléchir lorsqu'il agite les peurs les plus primaires devant eux. Et c'est ça aussi qui fait de Gaston un personnage aussi réaliste et effrayant. "Peut-être que l'une des principales leçons à tirer de ce film: si vous connaissez un Gaston, que faites-vous pour l'arrêter?", se demande Teen Vogue.

Un bourreau, un chasseur, une proie. Voilà le triangle "amoureux" autour duquel s'articule l'action de "La Belle et la Bête". Une histoire écrite au XVIIIe siècle, certes. Mais trois siècles plus tard, cette histoire résonne encore dans notre société, en particulier par le portrait du harceleur Gaston. "Le plus coriace, c'est Gaston", chantaient d'ailleurs les villageois...

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