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Mat Vezio: les beaux lendemains de veille (ENTREVUE)

Mat Vezio: les beaux lendemains de veille
Facebook/Julie Artacho

Mat Vezio est batteur. Mat Vezio est chanteur. Il joue fort de la batterie dans l’ombre et chante doucement sous les projecteurs. Il est aussi flûtiste assassiné, comédien raté et auteur si le temps juge bon le lui permettre. Voici en quelques questions élémentaires un aperçu moins sommaire de celui qui, comme les fleurs du titre de son premier long jeu en territoire solo, veut exhaler son beau bouquet de savoir-faire avant l’étiolement et la fanure inévitables. Il est à noter au passage qu’il n’y a pourtant rien de ténébreux dans le personnage.

Qu’est-ce qu’on devrait savoir sur toi pour mieux comprendre ton album?

«Comme mon père est musicien, j’ai toujours baigné dans la musique. Au secondaire, je me suis inscrit dans un programme enrichi avec concentration musique. Au départ, je voulais jouer de la flûte traversière ou du saxophone alto, mais comme j’avais une batterie à la maison, c’est l’instrument qu’on m’a en quelque sorte imposé. À l’époque, je vivais pratiquement dans les locaux réservés à la musique. Plus tard, comme tout jeune adulte, j’ai voulu m’opposer à la profession paternelle en m’exilant en Europe pour faire du théâtre. Je voulais devenir comédien, quoique la musique demeurait très présente. Je flânais dans les magasins d’instruments et je consultais les petites annonces à la recherche de petits contrats. J’ai aussi un frère qui a continué à alimenter ma passion et à me tenir au parfum en m’envoyant régulièrement les meilleurs albums d’ici. »

Et comment es-tu finalement retourné à tes premiers amours?

«Au retour de mon séjour de deux ans en Europe, j’ai rencontré au Lion d’or un membre du groupe Mille Monarques. Ils venaient de perdre leur batteur et avaient au programme un spectacle une semaine plus tard. Je leur ai proposé mes services. C’est à ce moment-là que j’ai pris conscience de ma vocation de musicien. J’ai aussi réalisé que j’aimais contribuer aux projets des autres. C’est finalement comme ça que j’ai commencé à gagner ma vie.»

Le passage de la batterie à la guitare, ça s’est opéré comment?

«Par la poésie. Quand j’avais 15 ou 16 ans, je m’intéressais beaucoup à la poésie et je m’amusais à transposer les classiques en chanson. J’ai même fait Cégep en spectacle en chantant un poème de Nelligan. Mon jeu de guitare était rudimentaire, quelques accords sans plus. J’ai poursuivi mon apprentissage en autodidacte et je me suis mis plus tard à coucher sérieusement mes propres textes sur des musiques. Mon frère, qui s’intéressait à la sono, s’est d’ailleurs fait la main sur mes premières chansons. Loin de moi l’idée à ce moment-là que j’allais un jour en faire un album.»

Passer du rythme à la mélodie, ça a été beaucoup de travail pour toi?

«Oui, beaucoup de travail, seul, enfermé dans ma chambre (rires). Le plus grand travail demeure néanmoins celui de se débarrasser du syndrome de l’imposteur, surtout pour un batteur qui doit dorénavant se placer sous les projecteurs, à l’avant-scène, sans aucun musicien devant lui. La batterie et le micro sont deux univers bien différents.»

Et ta première expérience à ce micro?

«J’ai déjà fait partie d’une chorale, mais pour mon propre matériel, c’était aux Rencontres de la création de Natashquan. Quelqu’un s’est désisté à la dernière minute et un ami qui s’y rendait m’a proposé de faire le voyage pour y “casser” mes tounes. C’était mes premiers pas devant public. Il faut dire que mon expérience demeure limitée. Seulement une dizaine de shows au compteur jusqu’ici. »

Parlons de l’album. Savais-tu à quoi ressemblerait Avant la mort des fleurs cueillies avant d’entrer en studio?

«J’avais une idée en tête, quelques influences que j’avais notées. J’imaginais au départ un album très épuré qui se contenterait d’une guitare classique et de ma voix. Ça a pris une autre dimension quand j’ai rencontré Nicolas Grou, au moment où il réalisait Les Ombres longues d’Antoine Corriveau. On s’est créé une bulle et j’ai accueilli les idées des autres. On a demandé à Marianne Houle de faire les arrangements de corde. J’ai fait les pistes de batterie en une seule séance, sans trop me poser de questions. On avançait au fil de l'enregistrement. On se laissait aller.»

À quoi renvoie le titre de l’album? La vie? L’amour?

«En fait, c’était le titre d’un livre que j’aurais écrit un jour. C’était pour moi un point de départ, une source d’inspiration pour tout le reste. Ça renvoie évidemment au délai accordé à la fleur coupée. C’est le temps qu’il lui reste, c’est le temps qu’il nous reste. Il s’agit de savoir ce qu’on veut faire du si court délai qui nous est imparti. On prend tous conscience d’une même certitude : celle de notre propre mort. Entretemps, il faut s’épanouir. Je ne pensais donc pas aux fleurs qu’on offre à un être aimé ou à celles qu’on dépose sur la tombe d’un mort.»

Parlons maintenant des «lieux» de ton album. Fukushima, c’est une ville que tu as réellement visitée?

«Du tout. C’est plutôt une référence au livre d’un auteur japonais que je lisais à l’époque. Je n’avais encore rien écrit et j’étais devant la page blanche. À vrai dire, je n’écrivais plus tous les jours depuis des années. Je travaillais alors avec Marcie, une brillante auteure-compositrice-interprète, et je lui ai demandé de m’envoyer un premier jet. Elle m’a écrit quatre lignes : Comme l’amour se divise / Sous le ciel du Japon / J’ai vu fondre un empire / Sous des soleils de plomb. C’est ce qui m’a inspiré les trois autres couplets de la chanson.»

Et Buffalo, tu y es déjà allé?

«Oui, malencontreusement (rires). C’était au retour d’un séjour à New York avec ma copine. On s’est arrêté dans une petite ville pour grignoter quelque chose. Quand j’ai repris le volant, j’ai emprunté la mauvaise route ou raté la bonne sortie. Bref, c’est seulement aux portes de Buffalo que j’ai réalisé l’erreur. Ça s’est finalement transformé en belle expérience : se perdre dans la mauvaise direction aux côtés d’une fille qu’on côtoie depuis peu.»

Un conseil de musicien en terminant?

«Rester positif. Toujours rester positif. Surtout dans cette industrie-là. »

Avant la mort des fleurs cueillies, Mat Vezio, disponible dans les magasins et en version numérique le vendredi 17 mars.

Le lancement de l'album aura lieule mardi 14 mars au Cabaret Lion d’or

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