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«Pour réussir un poulet»: la petite racaille de Fabien Cloutier au Périscope

«Pour réussir un poulet»: la petite racaille de Fabien Cloutier au Périscope
Suzane O'Neill

Où trace-t-on la ligne entre ses désirs et ses valeurs? C’est la question soulevée par la pièce Pour réussir un poulet, écrite et mise en scène par Fabien Cloutier, qui prend d’assaut les planches du Périscope à Québec mi-mars, puis à travers la province à la fin du mois.

Gagnante du Prix littéraire du Gouverneur général en 2015, la pièce créée au Théâtre La Licorne suit les déboires de Carl et Steven (Guillaume Cyr et Hubert Proulx), dont la «jobine» est de ramasser du métal pour Mario Vaillancourt (Denis Bernard), aux activités louches qui se laissent deviner au fil du texte jusqu’à une finale explosive et dérangeante. S’ajoutent à la distribution Marie Michaud (dans le rôle de Judith) et Gabrielle Côté (Mélissa).

Un texte dérangeant

La pièce, à la langue crue et au propos douloureux, promet de secouer le spectateur. «Ça ne me dérangerait pas que les gens n’applaudissent pas à la fin», avoue candidement Fabien Cloutier en entrevue. «Il y a des zones troubles, de la violence dans l’expression de la misère au quotidien.» D’ailleurs, Denis Bernard, dans le rôle de l’homme d’affaires véreux, est à l’aise avec ces zones. «Je me suis déjà fait traiter de salaud par une madame pendant le salut!», rigole-t-il. «Le punch de la pièce, il faut l’amener, et c’est sûr que quand j’y arrive, ça me trouble. Même si c’est dur, ça ne m’empêche pas de dormir. Au contraire, ce qui est l’fun de jouer ça, c’est que je provoque quelque chose chez le spectateur. Viens avec moi, haïs-moi!»

Éviter la formule du succès

Autant pour Denis Bernard que pour Fabien Cloutier, le fait de reprendre la pièce environ deux ans après sa création ne tient pas de la formule toute faite. «On ne reprend pas bêtement un succès», soutient le comédien. «On cherche à pousser la parole encore plus loin. Il y a de nouvelles subtilités : la colère est moins forte.» «Elle gronde plus qu’elle n’éclate et c’est pour le mieux», poursuit au vol le metteur en scène. La colère habite les personnages, mais c’est aussi étrangement une pièce sur l’amour. «Pas besoin de mettre deux personnes qui s’aiment sur scène pour que ça parle d’amour», ajoute Fabien Cloutier. «Ça peut juste donner envie de s’aimer encore plus fort après, aussi.»

Pas des losers

Les personnages de Carl et Steven, entraînés dans des activités qui dérivent vers l’immoralité, pourraient rapidement être qualifiés de perdants. Pas pour leur auteur. «Ce ne sont pas des losers, ni des victimes : ce sont des battants. Ils sont la création d’un système qui crée des inégalités, pis eux sont dans le mauvais bout. Ils luttent, esti! Quand t’as passé ta vie à avoir les envies, mais pas les moyens, oui t’es en tabarnak! Et là, tu commences à rentrer dans des affaires louches…»

Denis Bernard continue : «Ils ont cette conscience-là et ça les honore. La question à poser, c’est comment on pourrait sortir de ça collectivement? Jusqu’où la dérive t’amène, jusqu’où tu peux aller juste pour avoir un break, pour respirer? Ceux qui viennent voir le Poulet doivent faire partie de la solution. Le théâtre auquel on souscrit doit rendre le spectateur perplexe, interloqué. Ça l’habite pendant des jours, voire même toute la vie.»

Pour réussir un poulet

» Texte et mise en scène de Fabien Cloutier

» Du 14 au 25 mars au Théâtre Périscope

» En tournée à travers le Québec à partir du 28 mars

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