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Des chercheurs espèrent ressusciter le mammouth d'ici deux ans

Le mammouth bientôt de retour?

Dans quelques années, "Jurassic Park" sera peut-être devenu réalité, mais peuplé de mammouths et de dodos. Car si la science semble avoir fait une croix sur la possibilité de cloner des dinosaures, l'idée de faire revivre des espèces disparues plus récemment (de-extinction) suit son chemin.

Lors d'une conférence organisée par l'Association américaine pour l'avancement de la science, le chef d'une équipe de scientifiques d'Harvard a affirmé qu'un embryon hybride entre un éléphant d'Asie et un mammouth laineux sera créé dans les deux ans, rapporte le Guardian ce mercredi 16 février.

Le généticien en question, George Church, cherche à faire revivre les mammouths, disparus il y a 4000 ans, depuis 2015. L'année dernière, il espérait arriver à créer un embryon viable d'ici cinq ans, dans une interview au Huffington Post. En 12 mois, il a donc diminué son estimation de deux années.

L'idée ne consiste pas à ressusciter le mammouth au sens propre, mais à créer une nouvelle espèce hybride qui pourrait vivre dans les environnements où évoluaient ces pachydermes. Objectif: repeupler certaines zones, par exemple en Sibérie, afin de stabiliser le milieu et d'endiguer le réchauffement climatique. George Church précisait au Huffington Post avoir obtenu des résultats positifs sur la température du sol en soumettant des parcelles de terrain " à un traitement similaire à celui qu'aurait engendré la présence de mammouths".

Des ciseaux à ADN révolutionnaires

On est encore loin de ce lointain rêve, qui est par ailleurs assez critiqué. Pour l'instant, les chercheurs d'Harvard n'ont travaillé que sur des cellules, pas sur un embryon entier. Ils ont utilisé la technique d'édition génétique révolutionnaire Crispr-Cas9. Grâce à ce "ciseau à ADN" low cost, facile à utiliser et très efficace, ils ont réussi à faire 45 modifications dans une cellule d'éléphant, en y incorporant des gènes du disparu mammouth. Il y a un an, ils n'en étaient qu'à 15 modifications.

Un nouveau matériel génétique qui devrait notamment entraîner chez cet "éléphant OGM" des oreilles plus petites, une graisse plus importante ou encore de plus longs poils, précise George Church. La prochaine étape, en plus de réaliser plus de modifications génétiques pour coller le plus possible aux traits des mammouths, consiste à modifier non pas des cellules isolées, mais un véritable embryon. Un travail qui devrait leur prendre deux ans.

Encore une fois, on est loin de la science fiction. Des chercheurs ont récemment, grâce à ces mêmes ciseaux à ADN, créé des embryons de vaches génétiquement modifiées pour être résistantes à la tuberculose. Elles sont nées et ont vécu trois mois, la durée de l'expérience, sans problème majeur.

Vers un utérus artificiel ?

Domaine public

Pour autant, George Church précise que le passage de simple embryon à petit mammouth velu prendra ensuite plusieurs années. Car il y a un petit problème. "Il ne serait pas raisonnable de mettre une femelle reproductrice d'une espèce menacée dans une situation risquée", a précisé le généticien.

En effet, s'il existe encore des milliers d'éléphants d'Asie, ces animaux sont menacés d'extinction. Du coup, les chercheurs réfléchissent à une solution alternative et radicale: faire grandir ces éléphants-mammouths dans un utérus artificiel.

Si le Guardian précise que d'autres experts estiment que ce genre de technologie ne sera pas au point avant la prochaine décennie, George Church est, comme toujours, optimiste. Dans son laboratoire, son équipe aurait réussi à faire grandir des embryons de souris pendant dix jours dans un utérus artificiel, soit la moitié du temps de gestation normal des rongeurs.

Evidemment, les travaux de George Church posent de nombreuses questions et soulèvent plusieurs critiques. Interrogé par le Guardian, le professeur de zoologie Matthew Cobb affirme que cette idée d'utérus artificiel "semble ambitieuse à tout le moins, l'animal qui en sortirait aurait été privé de toutes les interactions pré-natales avec sa mère".

Un projet critiqué et incertain

"Qu'arrivera-t-il une fois que l'hybride éléphant-mammouth sera né? Comment sera-t-il accueilli par les éléphants?", demande également le zoologiste, qui rappelle que les deux espèces sont des animaux très sociaux, où le rapport à l'autre est important. À la question de l'isolement social de ces animaux OGM, George Church répliquait en 2016 que "la solution, c'est d'en créer tout un troupeau", tout simplement.

Autre problème: et si ces animaux réintroduits dans la nature ne survivaient pas à leur environnement? Après tout, s'ils se sont éteints il n'y a pas si longtemps, les causes de leur extinction sont peut-être encore présentes. Peut-être également que les changements qui ont eu lieu depuis leur disparition font que ces espèces ne seront pas adaptées au monde actuel.

À ce sujet, une étude a été publiée en mai 2016 dans la revue Biological Conservation. En prenant l'exemple de trois espèces d'oiseaux disparues, les chercheurs expliquaient que leur environnement historique ne serait pas à même de les accueillir convenablement.

Il y a aussi des questions d'ordre éthique plus large, concernant l'idée même de modifier des espèces et de créer des hybrides génétiquement modifiés. Mais il faut dire que sur cette thématique, George Church est un habitué. En dehors des mammouths, le généticien est notamment connu pour avoir organisé une réunion polémique traitant de, entièrement fabriqué en laboratoire.

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Prélèvements pour annalyse

3 photos des prélèvements effectués sur le mammouth

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