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«Louise en hiver»: abandonnée, mais pas seule!

«Louise en hiver»: abandonnée, mais pas seule!

Le très beau film d’animation de Jean-François Laguionie est une réflexion touchante sur le temps qui passe à travers le regard d’une vieille femme livrée à elle-même dans une station balnéaire désertée par les vacanciers. Bouleversant.

Derrière Louise en hivers, on trouve la nouvelle de Jean-François Laguionie. Le réalisateur français de 77 ans – gagnant en 1978 de la Palme d'or du court métrage au Festival de Cannes avec le magnifique La traversée de l'Atlantique à la rame – s’est inspiré de ses propres écrits qu’il voulait d’abord mettre en scène en prise de vue réelle.

«J’ai écrit ce récit au début des années 1980, raconte-t-il en entrevue. Comme j’avais laissé le projet dans les tiroirs pendant un long moment, il y a de cela quelques années, je m’y suis de nouveau intéressé, car j’ai soudainement réalisé que je commençais à avoir l’âge de mon personnage.»

Force intérieure

Il aura fallu quatre ans de travail avant que ne prenne forme son cinquième long-métrage d’animation, sorte de robinsonnade du troisième âge qui s’attarde sur les déboires de Louise, une vieille dame attachante forcée de vivre dans une petite station balnéaire après avoir raté le dernier train de la saison. Seule avec son chien, elle apprend à survivre en puisant dans son passé.

«C’est un film sur la résistance, ajoute le discret cinéaste. L’abandon n’est pas lié à la solitude, puisque Louise semble déjà savoir ce qu’est la solitude comme beaucoup de personnes âgées. Sa situation n’est pour elle qu’un nouveau défi à relever. Elle va découvrir une force dont elle ne se croyait pas capable.»

Elle arpente l’hiver, ballotée par les vents et les marées dans le village de Biligen, un lieu fictif illustré au grand écran par les images d’enfance de Laguionie vécues en partie sur les côtes maritimes de la Picardie. «C’est mon œuvre la plus intime dans laquelle on retrouve le "pays des falaises". Louise, c’est un peu de moi et de ma mère. Elle a un caractère de cochon, mais par moment elle se laisse aller à de la tendresse.»

Lors de sa sortie en Hexagone en novembre dernier, le film a ravi les critiques et le public français, toutes générations confondues. Encore étonné d’un tel succès, Laguionie ne s’est jamais douté qu’il intéresserait les jeunes avec cette «histoire de grand-mère».

«Je ne me situe pas dans la même catégorie que Disney, alors je me suis demandé si le film n’allait pas ennuyer les plus petits. Les adultes voient mes films, après, il y a aussi des enfants qui les voient. Je me suis même rendu compte qu’il y a eu beaucoup de parents qui ont emmené leur progéniture.»

Le pouvoir de l’imaginaire

Réalisé à Rennes (France) et à Montréal, ce chef-d’œuvre laisse une grande place à l’imaginaire, souvent drôle, tel un contrepoids à l’oublie. Le réalisateur confie travailler sur son prochain long métrage d’animation. Cette fois, il s’attardera sur son père qui s'était mis en tête de construire un bateau en plein milieu de son jardin de la banlieue parisienne.

«Le dessin est un phénomène assez mystérieux qui vous écarte d’une pensée écrite forcément plus rationnelle. J’ai toujours été fasciné par ce que la mer vient rejeter sur le rivage. Cela peut être n’importe quoi, parce que la mer ne fait pas de tri. Mais si vous trouvez un morceau de piano à queue ou une baignoire qui vient s’échouer sur une plage, cela devient alors extraordinaire. Alors, imaginez le potentiel onirique d'un bateau perdu en pleine ville!»

L’auteur est un vétéran de l’animation qui se considère davantage comme un artisan. Il a notamment travaillé aux côtés de Paul Grimault, le maître derrière le classique Le Roi et l'Oiseau. Pour ce qui est de la fabrication, aucun scénario ni story-board, mais une enfilade de croquis sans contour en guise de maquette du film.

«Je n’aime pas enfermer mes dessins dans un cadre. C’est pourquoi je photographie toujours un à un l’ensemble de mes dessins. Ensuite, j’ajoute les voix, celle ici de Dominique Frot pour incarner Louise. Ainsi, j’ai l’impression de faire du cinéma.»

Cette entrevue a été effectuée à Paris grâce à l’invitation des Rendez-vous d’Unifrance.

Louise en hiver – Axia Films – Film d’animation – 76 minutes – Sortie en salles le 3 février 2017 – France, Québec.

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