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Le journaliste Benoît Aubin s'éteint à l'âge de 68 ans

Le journalisme québécois en deuil

Benoît Aubin
Benoît Aubin s'est éteint à l'âge de 68 ans. Photo courtoisie Véronique Aubin


Emporté par une maladie pulmonaire dont il souffrait depuis plusieurs années, le journaliste émérite et chroniqueur au Journal de Montréal Benoît Aubin est décédé mercredi à l'Hôtel-Dieu de Montréal.
 
Âgé de 68 ans, Benoît Aubin aura marqué le journalisme québécois et canadien en travaillant pour plusieurs grands médias, francophones et anglophones, tant dans la presse écrite, dans les magazines qu'à la télévision. En plus de 40 ans de carrière, il a été journaliste, chroniqueur et a occupé plusieurs postes de direction dans plusieurs entreprises où il a oeuvré. 
 
«Il a écrit sa dernière chronique dimanche et [hier] encore, je devais lui amener son laptop parce qu’il voulait commencer sa chronique pour cette semaine, raconte la gorge nouée sa fille unique, Véronique Aubin. Jusqu’à la toute fin, il est resté préoccupé par ses textes, le journalisme et l’actualité. »
 
Malgré l’emphysème qui talonnait son père depuis plusieurs années, elle est sous le choc. «On n’est jamais vraiment prêt à ça», admet-elle.
 
Un pionnier
 
Benoît Aubin a travaillé pour le Montréal-Matin, La Presse, The Gazette, The Globe & Mail, Le Devoir, avant de faire son entrée au Journal de Montréal et au Journal de Québec comme chroniqueur et directeur des pages Opinions en 2007. À la télévision, il a occupé des postes de direction à TVA et à Global. Il a aussi écrit pour les magazines L’actualité et Maclean’s.
 
Tout au long de sa carrière, il aura écrit sur tous les sujets: des faits de société aux nouvelles culturelles, en passant par la politique provinciale et fédérale, où il a particulièrement fait sa marque. Il a remporté de nombreux prix de journalisme, dont le prix Judith-Jasmin, remis par la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) et trois premiers prix de la Fondation nationale des prix du magazine canadien.
 
Il était particulièrement reconnu pour la grande qualité de sa plume.
 
Originaire de Québec, où il est né en 1948, il est arrivé à Montréal à l'âge de 23 ans, en 1971.
 
Au cours des dix dernières années, il a aidé à développer les pages Opinions des journaux de Québecor Média. Il a recruté plusieurs chroniqueurs afin de créer un espace de débats publics d'une grande diversité de points de vue. Il tenait encore jusqu'à dimanche dernier, le 22 janvier, une chronique hebdomadaire dans les pages du Journal. Son dernier texte, publié il y a quelques jours et intitulé «Le Québec pète le feu! (mais personne n'en parle)», était écrit sur un ton optimiste et vantait les succès du Québec en matière de création d'emploi.
 
Il y a deux ans, dans un texte coup-de-poing, «Partir en fumée», il abordait de front son problème de santé, un emphysème causé par un tabagisme soutenu. 
 
«Je ne dis pas ça pour me rendre intéressant, mais je suis atteint d’une maladie dégénérative, incurable et mortelle.
 
L’emphysème. La maladie des fumeurs.
 
Ce que cela dit, en clair, c’est que je n’irai jamais mieux qu’aujourd’hui, et que demain ne pourra être que pire. Qu’il n’y a rien à faire pour y changer quoi que ce soit, qu’à la fin, je vais en mourir, et que l’échéance se présentera plus tôt que tard », écrivait-il avant de poursuivre avec une conclusion critique sur le statut de victime qu'on accole aux fumeurs.
 
«C’est que la dépendance n’est jamais que la seule tolérance à un produit nocif; elle voisine aussi avec une forme de maladie mentale qui confond le noir et le blanc, la proie et l’ombre; une folie dans laquelle l’empoisonnement est vu comme une récompense, et le sevrage, comme une punition. Mais je pense qu’on fait fausse route en traitant la dépendance elle-même comme une forme de maladie. On ne rend pas service aux consommateurs du tabac en les traitant comme des «victimes du tabagisme», au contraire, on les excuse dans leur aberration.»

Réactions

Le directeur du Devoir, Brian Myles, qui avait été embauché comme journaliste surnuméraire par M. Aubin dans les années 90, estime d’ailleurs qu’il a été le premier à travailler dans les deux langues et à toucher à tous les aspects du métier.

«Ce n’est pas donné à tous les journalistes dans la vie d’être capables de travailler de l’anglais au français, du quotidien au magazine, du factuel à l’opinion et du journaliste au cadre», soutient-il.

C’est d’ailleurs à lui que M. Myles doit ses premières armes en journalisme.

«Il m’a dit: “je ne sais pas trop ce que tu vaux dans la vie Brian, mais peut-être que t’as du talent, puis je pourrais te donner une chance”. Il était capable de prendre des risques avec des personnes et il faisait confiance aux jeunes», se souvient-il

Journal de Montréal

M. Aubin a publié sa dernière chronique dans les pages Opinion du Journal de Montréal et du Journal de Québec, dimanche dernier. Il y écrivait depuis 2007.

Benoît Aubin
Benoît Aubin était passionné de journalisme et d’actualité et adorait l’ambiance des salles de rédaction. Photo d'archives, Claude Rivest

Le rédacteur en chef du Journal de Montréal, Dany Doucet, parle d’une grande perte.

«Benoît est un des journalistes les plus talentueux que j’ai connu. Sa plume extraordinaire lui permettait de rendre tous ses sujets intéressants», dit-il

M. Aubin laisse dans le deuil ses trois frères et sœurs, sa fille, deux nièces et de nombreux proches et amis.

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