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Retards judiciaires: cri du coeur du juge en chef Pidgeon

Retards judiciaires: cri du coeur du juge en chef Pidgeon

« Ça n'a pas de bon sens, on est à l'âge de pierre en matière de services juridiques », déplore le juge en chef associé à la Cour supérieure du Québec, Robert Pidgeon, en entrevue à l'émission 24/60. Dans la foulée de l'arrêt Jordan, il interpelle le gouvernement du Québec pour qu'il octroie des ressources au système judiciaire pour le désengorger et le moderniser.

Le juge Pidgeon estime que le gouvernement devrait en faire davantage pour désengorger le système judiciaire. « Il y a des efforts qui sont déployés par le système judiciaire, mais on va avoir besoin d’aide du monde politique pour nous fournir des ressources et aussi moderniser notre système. »

«Jusqu’à tout récemment, lorsqu’on avait un procès-verbal qui était rédigé en salle de cour, c’était encore rédigé au crayon et au bloc note.» — Robert Pidgeon

« Il faudrait qu’à chaque fois qu’un poste de juge se libère que l’on nomme, dans le mois qui suit, son remplaçant », avance M. Pidgeon en indiquant que les longues vacances de postes entraînent une surcharge de l’appareil judiciaire.

«On s’est retrouvé, à la Cour supérieure, il y a un certain temps, avec neuf postes de juge libres sans qu’ils ne soient remplacés.» — Robert Pidgeon

Le juge en chef Pidgeon estime que ce sont les mégaprocès qui ont fait dérailler le système judiciaire. « Au cours des années 2010-2011, on avait, à mon avis, les meilleurs délais au Canada. Et là, le projet SharQc a entraîné plusieurs mises en accusation et les délais ont commencé à s’allonger. »

«Je suis d’avis que ces mégaprocès ne devraient plus se tenir.

» – Robert Pidgeon

Il estime que les mégaprocès sont trop difficiles à gérer. « Avec 34 accusés, la tâche devient gigantesque, ça devient presque impossible », poursuit-il en proposant de tenir des procès séparés.

Changement de culture

Outre le manque de ressources, M. Pidgeon croit qu’il faut un changement de culture au sein de l’appareil judiciaire. Il estime que des changements de pratique s’imposent afin que les dossiers se règlent plus rapidement.

Des pistes de solutions sont déjà mises de l’avant sous forme de projets-pilotes notamment pour moderniser les enquêtes préliminaires. Ces mini-procès avant le procès sont ainsi remplacés par des « interrogatoires préalables ».

Le juge Pidgeon insiste également sur la « gestion d’instance » qui consiste essentiellement en un resserrement de l’encadrement des procédures par les juges. Ces derniers laissent moins de latitudes aux avocats dans la conduite des dossiers afin qu’ils soient menés plus rondement. « Depuis 10 ans, j’ai appliqué un système de gestion d’instance, un système de facilitation pénale, on a mis en place plusieurs mesures où les juges deviennent le phare dans la conduite du dossier. Ça, c’est un changement de culture », explique-t-il.

« On serre la vis. Si je prévois trois mois pour traiter un dossier et que je constate qu’il peut être réglé en trois semaines, il n’y a pas de raison de le faire durer trois mois », poursuit-il.

La médiation judiciaire doit également être favorisée, selon le juge en chef.

Pendant que le juge Pidgeon lance son cri du coeur, le gouvernement de l'Ontario annonce l'octroi de ressources additionnelles pour désengorger son système judiciaire. La province embauchera 13 juges à la Cour de justice de l’Ontario, 32 procureurs adjoints de la Couronne, 16 avocats de service et 26 travailleurs des tribunaux.

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