En pondant les textes des Pêcheurs, Martin Petit a l’impression d’être un athlète olympique prenant part au décathlon, de réaliser une maîtrise en scénarisation en accéléré.
C’est que, en fignolant tout fin seul les intrigues de sa comédie et en y tenant le premier rôle, l’auteur, comédien et humoriste s’impose un régime quasi militaire de mai à août, en bossant sept jours sur sept en période d’écriture. Dès le mois d’octobre, il commence à songer aux histoires qu’il développera et aux collègues et amis qu’il aimerait inviter à la pêche. Et il continue d’écrire entre les enregistrements pendant l’été.
«D’une saison à l’autre, je me casse trois fois plus le bicycle pour trouver des histoires originales, avoue Martin Petit. Je suis vraiment sincère dans mon travail, je ne suis pas paresseux. Je ne pourrais pas travailler plus fort que je ne le fais sur Les pêcheurs ; depuis quatre ans, je ne prends pas d’autres projets, je ne pars pas sur d’autres lubies. C’est ça, la réalité, au Québec ; si on était aux États-Unis, on serait cinq writers, et la saison serait prête à tourner le 1er mai. Mais ici, ça ne fonctionne pas comme ça.»
Toujours populaire
Or, son dur labeur porte ses fruits : les cotes d’écoute des Pêcheurs ne cessent d’augmenter, et ce, après quatre ans en ondes, et alors que le 50e épisode sera diffusé ce mercredi, 23 novembre, avec un Claude Meunier fâché qu’on veuille relancer les Lundis des HA! HA! sans sa permission (en rattrapage sur Tou.tv ensuite).
Alors que le public pourrait se lasser de ses mises en scène mettant pour la plupart en vedette des humoristes qui ont déjà taquiné le poisson avec lui et qui reviennent ainsi d’une année à l’autre, on en redemande : une moyenne de 1 080 000 téléspectateurs est au rendez-vous cet automne pour rigoler de leurs pitreries, à ses comparses et lui. C’est un chiffre semblable à celui de 2014, alors que Les pêcheurs retenait environ 1 064 000 habitués, et supérieur aux 958 000 curieux qui étaient au poste à pareille date, en 2015.
Il faut dire que Martin Petit a su donner un coup de vigueur à son concept en 2016, notamment en orchestrant un déménagement de chalet qui lui a permis de nouveaux revirements. L’homme était mûr pour un changement de décor, après avoir passé plus de 120 jours dans son ancienne «résidence secondaire». Il est donc passé sans heurts du village de Bolton à celui de Bonsecours, toujours en Estrie, à 10 minutes de distance.
Il a aussi intégré à son bassin d’invités des personnalités qui ne sont pas issues du monde comique. Il s’enorgueillit d’ailleurs d’avoir pu partager des répliques avec Macha Grenon, Mitsou, Pierrette Robitaille, Patrice L’Écuyer et même Denys Arcand au fil des ans.
«J’ai l’impression d’être un joueur de tennis amateur qui joue avec les pros, qui part en tournée avec les meilleurs», se réjouit-il.
Qui plus est, les fidèles depuis le jour un des Pêcheurs ont remarqué que les situations sont toujours de plus en plus caustiques et absurdes d’une saison à l’autre.
«C’est beaucoup d’expérimentation pour le restant de nos jours, être humoriste, observe le créateur. On parle à des gens dans des contextes qui sont tout le temps en train de changer. Ce qui était drôle l’an passé n’est plus nécessairement drôle cette année.»
«Guy A.Lepage m’a appelé l’an dernier et m’a dit : «Je ne sais pas comment tu fais, mais chaque année, je suis convaincu que tu viens de tourner un épisode avec ton meilleur ami. Plusieurs personnes pensent que chacun écrit ses propres affaires, dans l’émission ; c’est un compliment, car ça veut dire que j’ai bien fait ma job, si les gens pensent que c’est Laurent Paquin qui a écrit les phrases de Laurent Paquin.»
Un film des Pêcheurs?
Martin Petit conçoit la plupart du temps ses saynètes de 30 minutes en ayant en tête le visage d’un humoriste précis, mais demeure flexible, au cas où l’un des noms pressentis ne serait pas disponible. Or, il n’a aucun problème à attirer ses semblables dans sa galère.
«Si je n’aimais pas les humoristes, ce serait un cauchemar pour tout le monde, cette série-là. Quand je fais venir quelqu’un dans Les pêcheurs, c’est que j’aime cette personne et qu’elle m’impressionne. Je veux que mes amis paraissent bien», conclut celui qui rêve d’un film qui amènerait Les pêcheurs au grand écran et qui caresse aussi d’autres projets de longs-métrages, mais qui ne prévoit pas lancer de nouveau spectacle tant que son aventure télévisuelle ne sera pas terminée.
Les pêcheurs, le mercredi, à 21h30, à Radio-Canada. La présente saison prendra fin le 7 décembre.
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