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Finis les devoirs dans certaines écoles de l'Ontario et du Québec

Finis les devoirs dans certaines écoles du Québec
Radio-Canada

« C'est parfait pour les élèves », lance, sourire aux lèvres, l'écolière d'Ottawa Émilie Boisvert, qui raconte qu'elle a plus de temps pour lire à la maison depuis que son école primaire, Saint-Guillaume, à Vars, a éliminé les devoirs.

Un texte de Michel Bolduc

Alors que les élèves ontariens reçoivent ce mois-ci leur premier bulletin de l'année scolaire, la question de l'utilité des devoirs divise les experts, les enseignants et les parents.

La directrice de l'École élémentaire catholique Saint-Guillaume, Julie Davidson, explique que les « jeunes d'aujourd'hui » ont une panoplie d'activités en soirée, que ce soit la danse ou le hockey. L'établissement, dit-elle, a éliminé les devoirs en 2014 pour « maximiser le temps familial ».

[Les devoirs] causaient beaucoup de stress, de la chicane [entre les enfants et] les parents. — Sophie Labelle-Buckingham, enseignante, École élémentaire catholique Saint-Guillaume

De son côté, l’enseignante Sophie Labelle-Buckingham ne s'ennuie pas du « stress » d'avoir à réprimander les élèves, qui n'avaient pas fait leurs devoirs.

Sa collègue Miriame Martin ajoute que « les élèves qui ont de la facilité, ce ne sont pas eux qui ont besoin de devoirs. Et les élèves en difficulté se donnent déjà à 150 % durant le jour. »

Le jeune Martin Beaulieu, qui n'a pas de difficulté particulière à l'école, se rappelle que « quand j'arrivais à la maison, j'étais très fatigué et je savais que j'avais des devoirs à faire. »

Les écoliers de 5e et de 6e année comme lui ont parfois quelques travaux ou des projets de recherche à terminer à la maison. Les plus jeunes n'ont pas de devoirs, mais sont invités à lire tous les soirs un livre de leur choix. Ils peuvent aussi emprunter à l'école des jeux de mathématiques.

Réaction des parents

La mère de famille Chantal Delisle est contente de voir que son garçon, qui est en première année, a la « liberté » de suivre un cours de piano ou de karaté en soirée, sans le « rush » des devoirs.

Annie Kidder, du groupe de parents People for Education, ajoute que s'acquitter de responsabilités, comme faire la vaisselle à la maison, peut être une activité aussi éducative pour l'enfant que de faire des devoirs.

Mais ce ne sont pas tous les parents qui sont d’accord, rapporte Sylvie Ross, du groupe Parents partenaires en éducation.

«[Je connais] des parents qui, eux, veulent des devoirs, parce que c’est comme ça qu’ils ont appris à l’école.» — Sylvie Ross, Parents partenaires en éducation

Des effets sur les notes?

Guy Dubois, surintendant au Conseil des écoles catholiques du Centre-Est (CECCE), auquel est affilée l’École élémentaire catholique Saint-Guillaume, dit qu’il est faux de penser que les devoirs sont essentiels à la réussite scolaire.

Sans nécessairement les éliminer, comme à Saint-Guillaume, l’ensemble des écoles du CECCE a mis la pédale douce quant aux devoirs. « On se maintient », dit-il, « on se dépasse même parmi les tops [en matière de résultats scolaires dans la province]. »

Même son de cloche de la part d’Édith Aubut, la directrice du Collège Saint-Ambroise, une école primaire dans la région du Saguenay, au Québec, qui a elle aussi éliminé les devoirs en 2014, à la grande satisfaction des parents qui étaient parfois « dépassés » quand venait le temps d'aider leur enfant.

«[Il y a eu] zéro impact sur les résultats scolaires.» –

Édith Aubut, directrice du Collège Saint-Ambroise

Mme Aubut ajoute que ses élèves ne « sortent pas du lot » lorsqu’ils arrivent au secondaire; ils sont aussi bien « organisés » que les autres.

Le Collège Saint-Ambroise utilise un cahier pour communiquer aux parents les progrès réalisés en classe par leur enfant.

Des experts divisés

Le professeur Charles Pascal, de l’Institut des études pédagogiques de l'Ontario (OISE), à Toronto, dit que ce n’est « pas clair » si les devoirs sont utiles, selon les différentes études sur la question.

Nombre d'experts affirment que les devoirs sont plus utiles au niveau secondaire, en guise de préparation aux études universitaires, notamment. Mais M. Pascal souligne que les élèves en Finlande, par exemple, réussissent très bien, sans avoir des travaux à terminer chaque soir à la maison.

«[Les devoirs reflètent] des méthodes d’enseignement d’il y a 50-60 ans.» – Charles Pascal, expert en éducation, OISE

Celui qu'on a surnommé « le père de la maternelle à temps plein en Ontario » privilégie plutôt une approche fondée sur le jeu et les projets, selon les « intérêts » des élèves.

En faveur des devoirs

La plupart des écoles de l'Ontario continuent à penser que les devoirs sont utiles. Dans bien des cas, les enseignants les donnent une semaine à l'avance, pour faciliter la tâche aux parents.

Sylvie Longo, surintendante de l'éducation au Conseil scolaire Viamonde, dans le sud de l'Ontario, dit que les devoirs ont un « impact positif », surtout au secondaire. Même pour les plus jeunes, affirme-t-elle, le « message » qu’un parent envoie à son enfant en lui faisant faire ses devoirs est que l’éducation est une priorité.

Le Conseil scolaire de district catholique Centre-Sud voit, pour sa part, les devoirs comme « une opportunité de consolider les apprentissages appris lors de la journée ».

Temps recommandé pour les devoirs par les deux conseils scolaires :

Le temps recommandé pour les devoirs aux conseils scolaires Viamonde et de district catholique Centre-Sud. Photo : CBC / Radio-Canada

Le gouvernement ne s'en mêle pas

Les politiques du ministère ontarien de l’Éducation sur les devoirs stipulent qu’ils ne doivent pas servir à « évaluer » les élèves, mais plutôt à « approfondir » ce qui est enseigné en classe.

Toutefois, au-delà de cette directive, le ministère laisse le type et le volume de devoirs à la discrétion des écoles et des enseignants.

De son côté, le ministère de l'Éducation du Québec n'a pas commenté pour l'instant.

Avec la collaboration de l'équipe de Radio-Canada Ottawa-Gatineau

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