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«Libre» : Peter MacLeod, plus communicateur que comique

«Libre» : Peter MacLeod, plus communicateur que comique
Groupe Entourage / Éric Myre

Davantage communicateur qu’humoriste, Peter MacLeod? Ayant souvent alterné entre scène et radio au cours de ses quelque 20 ans de carrière, l’homme a peut-être davantage acquis de réflexes de meneur de conversations animées et de bon raconteur de partys de famille, au détriment de ses qualités d’artiste de stand up parfaitement accompli. Explications.

Libre, son cinquième one man show, qui était présenté en première montréalaise au Théâtre St-Denis, mercredi, a très bien fait réagir la foule. Ça riait souvent, rarement à gorge déployée, mais de bon cœur. Il faut dire que c’est difficile de résister au sourire moqueur de MacLeod, un gars foncièrement sympathique et attachant de nature, presque attendrissant à force de rire de ses propres répliques.

Or, les consommateurs d’humour purs et durs décèleront vite le cruel manque de rythme qui porte Libre. On s’étire beaucoup avant de passer d’un sujet à l’autre, au point qu’on a parfois l’impression d’assister à du remplissage de haute voltige. Certaines portions s’élèvent un peu au-dessus de la mêlée mais, en général, le niveau est plutôt stagnant, se tenant à mi-chemin entre l’ennuyant et le vraiment marrant. En tirant plus fréquemment vers le premier, malheureusement.

Les observations de MacLeod sont plus souvent cocasses que réellement hilarantes, et son contenu n’apporte vraiment rien de nouveau sous le soleil. Libre divertit bien si on est un fidèle de Peter MacLeod depuis longtemps, mais on se demande si ce dernier ira chercher de nouveaux adeptes avec cette proposition plutôt simpliste et convenue, mise en scène par Marc Gélinas.

Vulgaire

L’enchaînement de 90 minutes, sans entracte, s’ouvre avec un interminable numéro sur les réseaux sociaux, pas dépourvu de bonnes blagues, mais trop long. Référant au titre de son spectacle en alléguant qu’on est de moins en moins libres en raison de nos téléphones cellulaires omniprésents, Peter MacLeod s’adonne à quelques pensées de son cru tirées sur Facebook et sur les textos, à propos de l’amitié («Des vrais amis, c’est de l’entretien»), de la facilité, maintenant, d’espionner une voisine en maillot de bain («Astheure, t’as juste à ouvrir le Facebook de ta voisine, à cliquer Cancun 2014… ») et des émoticônes («L’hos** de bonhomme sourire, quand on n’a pas nos lunettes… Il nous envoie tu chier, il a tu la langue sortie, il braille-tu ?»). La galvaudée phrase «Merci la vie» passe aussi à la moulinette.

Le segment sur le «filtre à vulgarité» recèle quelques bonnes lignes, entre autres sur Gregory Charles, qu’il aime, dit-il, mais… «On dirait qu’il nous énarve, un peu (…) Il se fait une gloire de dormir une journée par mois (…) Son théâtre pliable, on s’est tous dit : s’il peut se replier dessus…»

D’ailleurs, jasant vulgarité, MacLeod est certainement passé maître en la matière, ne ménageant pas les sacres et autres grossièretés. C’en devient dérangeant par instants. Son évocation de l’image d’une «pipe» prodiguée par 72 femmes laisse bien peu de place à l’imagination. Le verbe «sucer» revient d’ailleurs à plus d’une reprise au fur et à mesure que la soirée avance. Avec son accent prononcé de Lac Drolet, ça saisit encore plus.

Quelques bonnes idées également dans sa tirade sur les mensonges, où il décortique l’expression «facelift» : «Tu te ramasses avec une nouvelle face et un vieux cou». Sa réalité de vieux garçon, son indignation de vivre dans un «monde d’offensés», la religion («Je suis convaincu que Dieu est une femme ; les 10 commandements, c’est une liste, ça»), le trafic à Montréal («On dirait que l’État islamique, la nuit, bombarde» ; «Quand tu vas à Brossard, c’est rendu plus vite passer par les égouts») et quelques vagues hypothèses plutôt inintéressantes sur la mort constituent le reste des marottes de Peter MacLeod dans Libre.

Lui qui s’est porté à la défense de Jérémy Gabriel, il y a quelques mois, en condamnant ses collègues humoristes qui se moquaient du jeune garçon, s’est même risqué à commencer un gag sur lui, avant de se raviser et de s’interrompre. Bref, rien de bien innovateur, de séduisant ou d’audacieux, et beaucoup de déjà entendu.

Confort acquis

Entre les fulgurantes valeurs sûres à la Louis-José Houde, Martin Matte ou Rachid Badouri, qui vendent des billets à la tonne, et la relève hyper talentueuse qui pousse aussi rapidement que de la mauvaise herbe et qui suscite la curiosité, à la Mariana Mazza, Katherine Levac ou Phil Roy, il est peut-être difficile, pour un Peter MacLeod qu’on est habitué d’entendre à la radio ou de voir à la télévision, qu’on perçoit un peu comme le «gars d’à côté», comique et amusant sans être exactement une bête de scène, de continuer de se démarquer autant qu’à l’époque où il était un jeune premier.

Les styles se multiplient, de nouveaux visages apparaissent tous les jours, le nombre de tribunes explose. La réflexion n’est ni méchante, ni péjorative : MacLeod a son public visiblement conquis sur qui il peut compter, mais brille néanmoins moins qu’à une certaine époque, surfant probablement sur un confort acquis depuis longtemps. Rendu à son cinquième spectacle, il a sa recette et ses méthodes, et on finira par se dire qu’on n’apprend pas à un vieux singe à faire des grimaces. N’empêche, on ne peut s’empêcher de penser que Peter MacLeod est aujourd’hui davantage un excellent communicateur qu’un humoriste étoile.

Peter MacLeod présentera à nouveau Libre au Théâtre St-Denis jusqu’au samedi 19 novembre, et reviendra à Montréal, en supplémentaires, les 20 et 21 janvier et 19 et 20 mai 2017. Il s’arrêtera en outre à Trois-Rivières, Valleyfield, Brossard et Sherbrooke dans les prochaines semaines. Pour toutes les dates, consultez son site officiel.

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