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Accusés d'avoir favorisé les sites de propagande pro-Trump, Facebook et Google changent leurs politiques

Le réseau social et la manière dont il laisse libre court aux rumeurs infondées sont particulièrement montrés du doigt.
Facebook CEO Mark Zuckerberg is seen on stage during a town hall at Facebook's headquarters in Menlo Park, California September 27, 2015. Picture taken February 27, 2015. REUTERS/Stephen Lam/File Photo
Stephen Lam / Reuters
Facebook CEO Mark Zuckerberg is seen on stage during a town hall at Facebook's headquarters in Menlo Park, California September 27, 2015. Picture taken February 27, 2015. REUTERS/Stephen Lam/File Photo

Depuis le 8 novembre, tout le monde cherche une explication. Ou un coupable. Comment Donald Trump a-t-il réussi à devenir le nouveau président des États-Unis? En une semaine, toutes les explications ont été mises sur la table: l'économie, les sondages, les médias, le sexisme, le système électoral américain, le FBI...

Ces derniers jours, les critiques se sont notamment concentrées sur les géants du web, et plus particulièrement sur Facebook. Il est évident que l'élection de Donald Trump n'est pas due à un, mais à de nombreux facteurs concordants. Mais la question de la place prise par les réseaux sociaux dans cette élection mérite d'être posée.

Au centre des critiques, la place laissée aux rumeurs infondées et aux fausses informations. Jusqu'alors, Mark Zuckerberg avait répondu le 10 novembre en affirmant que l'idée selon laquelle Facebook avait pu influencer l'élection était "folle", rappelant que les fausses informations qui passent sur Facebook sont extrêmement minoritaires.

Le 13, Mark Zuckerberg se fendait d'un statut où il affirmait que ces "hoax" représentent moins de 1% du contenu vu par les utilisateurs de Facebook, mais précisait "avoir déjà lancé un outil permettant à la communauté de signaler les contenus faux". "Nous avons fait des progrès et nous continuerons à travailler dans ce sens", lançait le PDG de Facebook.

Couper les vivres des sites de rumeurs

Le lendemain, Facebook changeait discrètement quelques lignes de sa politique commerciale. Avec "Audience Network", le réseau social permet à différents médias d'afficher des publicités provenant de Facebook sur son site. Pour cela, il faut produire un "contenu de qualité". C'est à dire qui ne soit pas illégal, ni pornographique, ne prône pas la violence ou les jeux d'argents, etc. Depuis lundi 14 novembre, le fait de ne pas produire de "fausses informations" a été rajouté à cette liste, rapporte le Wall Street Journal.

Au même moment, Google a annoncé à Reuters que les sites produisant de fausses informations ne pourront plus utiliser son service de publicité AdSense, qui contrôle une grosse partie de la publicité en ligne. Comme le rappelle Quartz, le moteur de recherche est lui aussi concerné par ces sites d'informations propageant des rumeurs.

Par exemple, le premier lien pour une recherche "résultat final de l'élection" a pendant un temps été celui d'un site annonçant que Donald Trump avait remporté la majorité des suffrages, ce qui est faux (mais il a remporté la majorité des grands électeurs).

Il faut dire que la publication d'informations fausses et sensationnelles est devenue un vrai business. Si l'on pense en premier lieu à Breitbart, le site d'information pro-Trump dont le patron est devenu le conseiller du nouveau président, ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. Et la plus propre, pourrait-on dire.

Dans une enquête, BuzzFeed montrait que plus de 100 sites pro-Trump propageant des informations fausses étaient tous issus d'une petite ville de Macédoine. On y lisait par exemple que Clinton allait être accusée de crimes liés au scandale des emails par le FBI en 2017. Ces articles, totalement faux, étaient en fait écrits par des jeunes Macédoniens dans le simple but de se faire un peu d'argent.

Partagé des centaines de milliers de fois par les supporteurs de Trump, ces articles sont donc très lus alors qu'ils demandent peu de travail, étant donné qu'ils n'ont pas besoin d'être vrais. Le New York Times rappelle qu'un article affirmant que le pape François soutenait Trump a été partagé plus d'un million de fois.

La question centrale du fil d'actualité de Facebook

Et c'est là le noeud du problème, auquel Facebook n'a pas encore répondu. Car même s'il souhaite couper ses publicités sur des sites tiers, le fait est que ces articles faux continuent de se partager sur le fil d'actualité des 1,8 milliard d'utilisateurs du site. Facebook doit-il changer en profondeur son algorithme, en empêchant les rumeurs de s'y propager?

Car si Facebook affirme que les rumeurs ne représentent qu'une infime minorité des contenus, elles semblent plus présentes parmi les supporteurs de Trump, comme le montre une autre enquête de BuzzFeed. Les journalistes ont analysé plusieurs pages Facebook partisanes et ont trouvé 38% d'informations partiellement fausses sur les sites pro-républicains contre 20% sur les sites pro-démocrates.

Derrière la question de la rumeur et de la désinformation, se pose la question de l'algorithme même de Facebook. Celui-ci doit-il arrêter de proposer en priorité des statuts qui sont susceptibles d'intéresser l'utilisateur et donc proches de ses opinions?

Le réseau social est depuis quelques temps accusé de créer une sorte de filtre, un entre-soi qui petit à petit, montrerait avant tout des statuts qui correspondent à sa vision sociale et politique du monde.

Jusqu'alors, Mark Zuckerberg a toujours répondu en affirmant que le réseau social n'était qu'un moyen d'information parmi d'autres et qu'il se voulait neutre. Et de rappeler que selon une étude réalisée sur 10 millions de personnes, l'algorithme cache seulement 1% des articles du bord politique opposé. Par contre, rappelle The Verge, la conclusion de l'étude montrait surtout que les personnes cliquaient avant tout sur les articles renforçant leur parti pris.

La question de savoir si Facebook est avant tout un miroir de notre société ou a un rôle à jouer est loin d'être tranchée. Mais si le réseau social arrive au moins à faire taire les fausses informations, ce sera déjà ça de pris pour le débat démocratique.

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