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L'avocate Anne-France Goldwater ne veut pas que sa biographie alimente les insultes à son propos (VIDÉO)

«Ne lisez pas mon livre pour trouver d'autres raisons de m'attaquer» - Anne-France Goldwater

On la connaît pour ses déclarations controversées, que ce soit devant les tribunaux, à l'émission L'Arbitre ou sur toutes les tribunes où elle est invitée. Si l'avocate Anne-France Goldwater n'a pas la langue dans sa poche, elle a toujours été plutôt discrète sur les détails de son parcours de vie douloureux. Mais voilà qu'elle a décidé de tout déballer, dans une biographie qui sort cette semaine. Attention, prévient-elle, ce livre n'est dédié qu'à ceux qui apprécient «le personnage Goldwater».

En plein milieu d'un très long marathon d'entrevues médiatiques, mercredi, l'avocate a le temps d'accueillir tout sourire Le Huffington Post Québec dans son grand bureau. Comme toujours, la pièce est envahie de multiples peluches, figurines d'extraterrestres et de superhéros, où se dissimulent ici et là quelques photos de la famille d'Anne-France Goldwater. Cette famille, c'est-à-dire son mari, ses enfants et ses petits-enfants, c'est ce qui est le plus important pour elle, elle qui a eu une enfance marquée par le suicide de sa mère à l'âge de trois ans, par la violence de son père, par l'isolement et par l'abandon.

C'est après des années de pression exercée par des proches que la juriste a été convaincue d'exposer les moindres détails de sa vie douloureuse dans un livre de 300 pages, rédigé par la journaliste et auteure Martine Turenne. Elle espère que cela pourra aider certaines personnes à réaliser que dans la vie, il faut savoir affronter l'adversité et foncer, coûte que coûte. Elle espère aussi que ceux qui ont du mépris pour elle se retiendront de lire l'ouvrage. Entrevue.

HuffPost Québec: Certaines personnes, notamment un de nos blogueurs, se questionnent sur la pertinence de votre biographie. Pourquoi avoir décidé de raconter au grand public votre enfance difficile?

Anne-France Goldwater: Beaucoup de personnalités publiques font le choix d'écrire sur les événements difficiles de leur vie, en espérant aider les gens moins connus à prendre conscience qu'ils ne sont pas seuls. Après des années à m'encourager à faire ce livre, mon ami Yves Thériault (concepteur de l'émission L'Arbitre) a dit «tu vas voir Anne-France, tu vas avoir un impact positif pour beaucoup de gens, ceux comme toi qui ont senti qu’il n’y a personne pour eux. Tu vas pouvoir montrer que tu as réussi ta vie, que tu es heureuse, que tu n'as pas abandonné devant les épreuves de la vie».

Vous souhaitez donc aider des gens avec votre biographie?

Exact. Je n’ai pas fait ce livre pour l’appât du gain, je veux aider et inspirer des personnes, c’est ça mon souhait. D'ailleurs, j’encourage les gens qui ne m’aiment pas à ne pas lire le livre! De grâce, gardez votre argent dans vos poches, ne le lisez pas pour trouver d’autres raisons de m’attaquer. Dieu merci je suis bien au courant de toutes les saletés et les injures que vous avez pour moi. Gardez ça pour vous! J'ai déjà tout entendu et je comprends que je ne plais pas à tout le monde. Voilà, c’est la vie. Je suis extrêmement heureuse que ce groupe d'individus ne m’aime pas. Continuez comme ça, on est dans un pays démocratique!

Pour ceux qui vont lire le livre ou qui l'ont lu, comme moi, ce qui est frappant c'est avant tout les détails de votre très jeune enfance. Comment faites-vous pour vous rappeler de tout cela?

J'ai hérité de la mémoire d'éléphant de ma mère, il paraît. J'ai ce talent de pouvoir garder énormément de détails en tête. C’est utile pour les litiges, et surtout en contre-interrogatoire, il faut se rappeler de tout, c’est comme ça qu’on gagne une cause. Mais aussi, c'est parce que mon enfance et ma vie adulte sont marquées par beaucoup d'événements assez traumatisants, impossible de les oublier... Par exemple, quand mon père est décédé, c'était tellement soudain, que j'ai tenté pendant plusieurs heures de ranimer son cadavre... Ça marque.

Plusieurs passages de la biographie sont très marquants, notamment les années que vous avez passé à dormir dans le placard de votre grand-mère... Ça rappelle bizarrement la triste enfance du personnage Harry Potter.

C'est vrai, je n'y avais pas pensé! On est un peu pareil lui et moi. J'avais pas le choix de vivre là, l'hiver c'était horrible, il n'y avait même pas de chauffage et l'endroit empestait les boules à mites. Et le plus ironique, c'est que tout ça se passait dans une maison du quartier Outremont, alors que ma famille était plutôt bien nantie.

Une phrase de la biographie semble bien résumer votre situation à ce moment-là: «J'étais une misérable petite fille riche».

Oui, ça résume bien ma vie. Mais je ne saisissais pas à l’époque que je vivais dans un quartier riche, je ne savais pas que dans une famille «normale», on était nourri convenablement, on avait des repas en famille, qu'on devait se laver tous les jours, qu'on ne se faisait pas battre... Pour mon mari, qui vient d’un pays du tiers monde, la misère était normale, tout le monde était dedans. Mais moi, de mon côté, c’est selon moi impardonnable que j’ai vécu ça ici, dans un pays occidental, à Montréal, et en plus dans un quartier aisé.

Votre parcours, aussi difficile qu'il ait été, a forcément forgé votre personnalité fonceuse, qui ne s'attarde pas aux critiques?

Oui, car je n'ai jamais eu le choix de foncer et de n'en faire qu'à ma tête pour survivre. Je devais souvent faire des choix entre la vie et la mort. Tenir tête à l'adversité, ça fait partie de moi. Mais parfois je ne comprends pas comment les gens ayant toujours eu la vie facile ne font pas l’effort de défoncer des portes...

Vous êtes une personne très assumée dans tout ce qu'elle dit et fait, d'ailleurs vous parlez dans le livre de votre vie sexuelle «débridée», de vos aventures extra-conjugales sur des bureaux, dans des salles d'audience, à la bibliothèque, sur des photocopieurs... Même si vous vous en fichez, vous êtes consciente que des gens vous jugent. Ce serait différent à votre avis si vous étiez un homme?

Oh que oui! Il y a toujours un double standard pour le comportement sexuel d'un homme ou d'une femme. Toujours… Et je ne sais pas pourquoi ça persiste. On est rendu en 2016, et encore le débat public ne tourne qu'autour du sujet du consentement à l’acte sexuel…on ne parle même pas de l’acte! Ni des besoins de la femme pour atteindre l’orgasme…

Car on n'est pas encore capables d’enseigner aux hommes qu'il ne faut pas toucher sans le consentement de la femme! Kessé ça! Quand est-ce qu’on va avoir une vraie discussion sociale et publique sur la sexualité de la femme? Va falloir attendre un siècle encore je le crains...

Que pensez-vous de l'affaire Gerry Sklavounos, ce député libéral accusé d'agressions sexuelles par une jeune femme, Alice Paquet? Est-ce encore plus inacceptable de poser de tels actes ou d'avoir une relation extra-conjugale quand on est un élu?

Vu que c’est une cause qui risque de se retrouver en chambre criminelle, je ne veux pas compromettre les droits de la victime et du présumé accusé donc je ne commenterai pas ce cas précis. Ici, la question, c’est le consentement à chaque étape de la relation sexuelle. Il faut être capable de pouvoir dire stop. Mais plus largement, j'ose penser que chaque individu peut exprimer sa sexualité comme il l’entend. Qu’est-ce que ça veut dire si on est marié ou en union libre? Dans l’union libre, surtout, il n'y aucun engagement clair à la fidélité. De toute façon, la sexualité appartient à chacun.

Me Goldwater en compagnie de sa petite-fille Eva, venue avec le reste de la famille assister au lancement du livre.

Vous avez laissé entendre que vous êtes tentée de vous lancer en politique municipale. Quelle serait votre force si vous affrontez Denis Coderre?

Je serais bonne pour rassembler. Je ne suis pas hypocrite moi, j’ai un franc-parler et j’ai une indépendance d’esprit. Je peux travailler en groupe, trouver ce qui fait consensus au sein d'un grand groupe de personnes. J’ai ce talent. L’idée me travaille… Si j’étais candidate indépendante, j’aimerais faire disparaître la partisanerie…

En attendant que vous vous décidiez, vous avez du pain sur votre planche d'avocate. Dont un grand dossier de divorce et de garde partagée dans lequel vous représentez Pierre Karl Péladeau.

Mon but avec ce cas ce n'est pas de marquer la jurisprudence, c'est de réussir à faire en sorte que ces ex-époux laissent tomber les armes, se donnent la main et puissent partir avec un espoir pour l’avenir. Je veux que ce soit plus connu que ce que les avocats en droit de la famille désirent le plus, c'est ça, réussir à trouver l'entente, et non pas à mettre de l’huile sur le feu.

La biographie d'Anne-France Goldwater est en librairie depuis le 26 octobre.

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