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ENTREVUE - Chefferie du PQ : «On a une obligation de clarté», dit Lisée (VIDÉO)

Jean-François Lisée l’admet, promettre de ne pas tenir de référendum dans un premier mandat va à l’encontre de son «expérience politique».

QUÉBEC – Jean-François Lisée l’admet, fermer la porte à un référendum dans un premier mandat va à l’encontre de son «expérience politique». Mais le Parti québécois n’a pas d’autre choix s’il veut reprendre le pouvoir, explique-t-il dans cette deuxième entrevue de notre série de rencontres avec les aspirants-chefs du Parti québécois.

«Mon expérience politique dicte, à moi et à tout le monde, de garder le jeu ouvert, reconnaît le candidat à la chefferie du PQ. Mais la réalité politique du Québec des dernières années, et la réalité politique du Parti québécois, nous interdit cela.»

C’est une des leçons qu’il tire de la défaite historique de son parti en 2014. L’électorat québécois a rejeté le flou de la démarche référendaire proposée par Pauline Marois. «On a une obligation de clarté, au-delà de ce que la sagesse politique devrait nous dicter, estime-t-il. Mais, la sagesse politique, c’est aussi de s’adapter à la situation.»

Jean-François Lisée a donc fait le «pari» en début de campagne de promettre de ne pas tenir de référendum dans un premier mandat. Il prend toutefois l’engagement «béton» de déclencher un référendum dans un second mandat.

Proposer aux Québécois de ne pas tenir de référendum en 2018 sera la partie facile, croit-il; la souveraineté n'obtient pas une majorité d'appuis dans la population. Son défi était plutôt de convaincre les membres du Parti québécois. «De dire aux membres du Parti québécois que, si on veut faire l’indépendance, il faut renoncer à un référendum dans un premier mandat… ce n’est pas ce que les compagnies de marketing auraient suggéré, lance-t-il. […] Mais j’ai bien vu qu’à mesure que les semaines passent, le nombre de membres qui en viennent à cette conclusion augmente.»

Sa proposition, estime-t-il, enlèvera l’argument de la souveraineté au Parti libéral du Québec lors des élections de 2018.

Le moment Lisée?

S’il devait l’emporter vendredi prochain, il s’agira d’un revirement spectaculaire pour Jean-François Lisée. L’an dernier, la course à la chefferie semblait l’avoir relégué au ban de son propre parti. Le libre penseur avait qualifié le favori dans la course, Pierre Karl Péladeau, de «bombe à retardement» en raison de ses actions de contrôle de Québecor. La poignée de main glaciale qui avait suivi semblait sceller son avenir politique.

Jean-François Lisée s’était ensuite retiré de la course en déclarant que le PQ souhaitait vivre son «moment Pierre Karl Péladeau». Vingt et un mois après cette déclaration, les sondages le placent maintenant au coude-à-coude avec son principal adversaire, Alexandre Cloutier.

Au mois de mai, un sondage CROP-La Presse le plaçait pourtant quatrième (pratiquement ex aequo avec Martine Ouellet), à 26%. Mais depuis, Véronique Hivon a dû se retirer en raison d’une labyrinthite, cédant ainsi sa deuxième place.

«C’était une opportunité», reconnaît Jean-François Lisée

Plusieurs députés et militants qui appuyaient Véronique Hivon se sont alors rangés derrière lui, alors que les analystes croyaient qu’ils rejoindraient le clan Cloutier. «Ça a donné un double signal, dit Jean-François Lisée. Un signal de non-adhésion à Alexandre et un signal d’adhésion à moi. Plusieurs auraient pu aller avec Martine, mais ça n’a pas été le cas non plus, à quelques exceptions près.»

Signes religieux

La course cette année aura été marquée par de nombreux affrontements entre Lisée et Cloutier sur la laïcité et les signes religieux. Le député de Rosemont a notamment marqué les esprits en se disant ouvert à bannir la burqa de l’espace public. Des terroristes pourraient cacher des armes ou des bombes sous ce long vêtement, a-t-il fait valoir.

«Je ne pense pas que je suis allé trop loin, mais je suis peut-être allé trop vite, dit-il aujourd’hui. En ce sens que peut-être que dans deux ans les gens vont dire ‘ah ben oui, on a eu huit, dix cas, etc.’ Mais gouverner, c’est prévoir.»

«Donc, il faut avoir cette discussion-là avant, plutôt qu’après», plaide-t-il. Quand on lui souligne qu’il n’y a eu aucun cas d’attentats en France utilisant la burqa, il réplique : «Oui, mais elles sont interdites en France depuis plusieurs années.»

Outre l’argument sécuritaire, il invoque le principe de l’égalité homme-femme qui pourrait plaider en faveur d’une interdiction. «Maintenant, je dis qu’il y aura un débat dans le mandat, mais on ne va pas commencer par ça», nuance-t-il.

Avant cela, Jean-François Lisée veut redorer le blason du Parti québécois auprès des communautés culturelles. «Je pense que le Parti québécois a une démonstration à faire, dit l’aspirant-chef. Il y a des gens qui travaillent à temps plein pour faire croire aux membres de la diversité que le Parti québécois est xénophobe, raciste. Ils sont très efficaces et ils n’arrêtent jamais.»

«Alors j’ai proposé plus de mesures pour assurer les succès des néo-Québécois que vous n’en avez jamais vu d’aucun candidat dans aucun parti», dit-il.

Un caucus divisé

Avec quatre appuis dans le caucus contre quatorze pour Alexandre Cloutier, Jean-François Lisée aura fort à faire pour rallier ses collègues députés s’il l’emporte vendredi. Agnès Maltais et Maka Kotto ont notamment critiqué ses sorties sur l’identité.

«Je n’ai aucune inquiétude, aucune inquiétude», martèle Jean-François Lisée.

Il affirme que son travail dans l’opposition l’a rapproché de ses collègues, ce qu’il n’avait pas pu faire en tant que ministre en raison de son horaire «extrêmement prenant». «Je suis beaucoup plus proche de l’ensemble de mes collègues maintenant que je ne l’étais il y a 18 mois», assure-t-il.

«Dans la vie normale, le genre d’accrochages qu’on a eu, le monde ne se parlerait pas pendant deux mois, illustre le candidat. Mais la politique, ce n’est pas la vie normale. On a un genre de tolérance à la tension et à la chute de tension qui est beaucoup plus forte que pour la moyenne des ours.»

Les leçons de la défaite

Outre «l’obligation de clarté» sur la démarche référendaire, Jean-François Lisée tire deux leçons de la défaite du PQ aux élections de 2014. C’est ce qu’il appelle le «droit d’inventaire» sur les actions du gouvernement Marois, en empruntant l’expression à l’ex-premier ministre français, Lionel Jospin.

Tout d’abord, un gouvernement Lisée serait «opposé à l’exploitation de gaz ou de pétrole de schiste où que ce soit sur son territoire». «Sous le gouvernement Marois, il y a eu un flirt avec le pétrole qui a pollué notre image», lance-t-il.

«Les quatre candidats, Martine et moi en particulier, on annonce que le Parti québécois sera résolument vert, très clairement vert», ajoute-t-il.

Jean-François Lisée estime également que le PQ a été «puni» par les électeurs pour avoir déclenché des élections, malgré sa propre loi sur les élections à date fixe. Le gouvernement Marois était alors minoritaire et souhaitait aller chercher une majorité de sièges en chambre.

«Alors, si je suis élu en minoritaire, je vais gouverner en minoritaire pendant quatre ans, promet-il. Il faudra la coalition de toutes les oppositions pour me forcer à ne pas respecter la volonté [des électeurs qui auront élu un gouvernement minoritaire]. Ça veut dire s’entendre sur les budgets, faire des projets de loi communs, mais c’est certain que je vais respecter les élections à date fixe.»

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