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Sophie Bienvenu publie «Autour d'elle», un roman choral qui fait vibrer (ENTREVUE)

Sophie Bienvenu publie «Autour d'elle», un roman choral qui fait vibrer (ENTREVUE)
Sarah Scott

Florence est le genre de femme qui emplit une pièce de sa seule présence. Le genre de photographe qui fait tomber les frontières. Le genre d’adolescente que père et mère ont abandonnée, avant qu’un bébé se love dans son ventre. Le genre de maman qui se sépare de la chair de sa chair. Le genre d’amoureuse qui fait basculer les cœurs, à défaut d’ouvrir le sien. Le genre de personnage qui prouve une fois de plus le talent de Sophie Bienvenu, qui vient de publier Autour d’elle, un roman choral dans lequel 20 personnages se donnent le relais pour nous faire découvrir Florence.

Sophie Bienvenu publie «Autour d'elle», un roman choral qui fait vibrer

Sophie Bienvenu publie «Autour d'elle», un roman choral qui fait vibrer

«Je voulais qu’on se rapproche d’elle petit à petit, et qu’on découvre son fils dans la deuxième partie de la même façon. Comme une plongée où le lecteur est immergé le plus profondément possible, avant de ressortir très vite. Je savais quel personnage devait nous apprendre quoi, mais j’ai tout fait pour que l’information n’ait jamais l’air trop placée.»

De près ou de (très) loin, une vingtaine de personnes croisent la route de Florence et de son fils. Étienne, le premier amoureux de l’adolescente et père de l’enfant. L’employée de la femme qui adopte le petit. Le propriétaire d’un magasin de photo qui voit chez la jeune fille un regard différent. Un réfugié à Calais qui se lie d’amitié avec elle. Le prof du secondaire qui voit son étudiante se transformer. L’employé d’un refuge pour animaux qui trouve une cliente particulière pour acheter un chiot abandonné. Le meilleur ami de son fils. Sa voisine. Une policière placée sur la route du garçon. Et tant d’autres.

Des personnages de professions, de genres, d’orientations sexuelles, de classes sociales et de races diverses, dont les destins sont aussi banals que fascinants. «J’aime l’idée d’une histoire sans héros où l’on découvre des choses extraordinaires en creusant la vie de gens ordinaires. Pour être intéressant, pas besoin d’aller sauver les bébés phoques ou de traverser un pont enflammé! Tout se trouve davantage dans la psychologie.»

Il est intéressant de se rappeler que Pierre Foglia avait déjà écrit que le premier roman de Bienvenu se tenait surtout par son style. «Dans le fond, je parlais d’une fille de 13 ans qui tombait amoureuse d’un gars de 26. L’histoire peut avoir l’air plate résumée comme ça. Mais ce qui est intéressant, ce n’est pas tant ce qui va se passer, mais la façon de le raconter.»

N’empêche, elle a toujours le don de mettre en lumière des personnages d’une rare richesse. Même si elle a du mal à admettre que sa Florence est spéciale. «C’est mon roman le plus autobiographique… Beaucoup de ce qu’elle a vécu me ressemble. Alors, j’ai de la difficulté à dire pourquoi elle a cet effet sur les gens. Elle a peut-être quelque chose de plus dans le charisme. Je pense qu’elle attire les autres grâce à sa force. Elle a toujours eu la capacité de se relever de ses épreuves et de s’élever encore plus haut.»

C’est d’ailleurs l’un des éléments qui distingue Florence des écorchés au cœur des deux romans précédents, Aïcha l’adolescente et Mathieu l’itinérant. «Aïcha est plus agressive et Mathieu a tendance à s’apitoyer sur lui-même, en se retirant de la société. De son côté, Florence avance avec beaucoup trop de barrières et d’armures pour demeurer stable. Elle dit ouvertement qu’elle ne s’est jamais attachée à un homme et qu’elle repousse les gens pour ne plus souffrir.»

Bien qu’on puisse faire un lien entre la douleur que Florence ressent en ayant été abandonnée par ses parents et celle d’avoir été obligée de placer son enfant en adoption, Sophie Bienvenu apporte une nuance.

«Probablement qu’elle s’en veut d’avoir infligé cette douleur à son fils, mais elle ne réfléchit jamais à l’abandon. Elle pense tous les jours à son garçon et à ce qu’il serait devenu, mais elle referme le dossier rapidement. C’est la même chose avec ses parents: si elle se penchait sur le sentiment d’avoir été abandonnée, ça lui ferait quelque chose, mais elle n’ose pas. C’est comme une boîte de Pandore pour elle.»

Parce que voilà, après plus de la moitié du roman, l’écrivaine donne la parole à Florence, une bribe à la fois. «Je tease les lecteurs. J’adore laisser des indices comme dans les thrillers. Mais tu ne peux pas trop frustrer les gens, sans rien leur donner. Si j’étais la lectrice de ce roman-là, je voudrais avoir accès à elle.»

Fidèle à son habitude, Bienvenu fait grandir l’intérêt des lecteurs de page en page et leur assène plusieurs coups de poing en finesse, comme si elle était passée par tous les interstices pour préparer l’assaut.

Et au pire, on se mariera… au cinéma

Après avoir écrit l’adaptation cinématographique de son premier roman avec Léa Pool, Sophie Bienvenu a eu la joie d’apprendre que tous les comédiens qu’elles avaient en tête ont accepté de jouer dans le film.

Ainsi, Sophie Nélisse prêtera ses traits à la fameuse Aïcha. «Il y a deux ans, quand elle avait fait la promotion de La voleuse de livre à Tout le monde en parle, on s’était dit que c’était elle. Elle avait une naïveté et une aisance naturelle. Et elle menait presque Guy par le bout du nez. On sentait qu’elle était capable de jouer le rôle. Mais quand on lui a envoyé un scénario, elle avait refusé, parce qu’elle se trouver trop jeune, entre autres pour certaines scènes osées. Puis, deux ans plus tard, en période de casting, elle nous a écrit pour nous exprimer son intérêt. Elle se sentait plus mature.»

Alors que Karine Vanasse interprètera sa mère, c’est Jean-Simon Leduc qui jouera Baz, de qui l’adolescente tombe amoureuse. «Baz est un gars de région qui arrive à Montréal. Ce n’est pas le couteau le plus aiguisé de la boîte, mais ce n’est pas ce qu’on lui demande. Quelqu’un de plus alerte verrait les stratagèmes d’Aïcha. Il a une énergie douce et calme, alors qu’Aïcha est un volcan. Jean-Simon avait l’énergie parfaite pour jouer ça.»

Le tournage a débuté le 29 août et se terminera le 8 octobre. Le film sortira en salles au cours de l’année 2017.

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Le roman Autour d’elle est présentement en librairies.

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