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Juste pour rire : Mathieu Madénian, faire rire après les drames (ENTREVUE)

Mathieu Madénian, faire rire après les drames (ENTREVUE)

Le public québécois a l’opportunité, pendant le Festival Juste pour rire, de rencontrer quelques grandes vedettes de l’humour français, dont Mathieu Madénian. À prime abord, son nom ne vous dit peut-être rien; mais si on vous précise qu’il a incarné le «Guy» de la mouture française d’Un gars, une fille, ça vous sonne une cloche?

Tous les soirs, jusqu’au 24 juillet, Madénian se produit en solo, à 18h30, sur la scène de l’Astral. Petite jasette avec le comédien, humoriste chroniqueur, et plume de Charlie Hebdo, qui nous parle entre autres du défi de faire rire lorsque notre maison est à feu et à sang.

Comment décrivez-vous votre style d’humour?

«Comment décrire son style d’humour? Tu ne peux pas décrire ton style d’humour. Les mecs qui arrivent à décrire leur style d’humour, ben… c’est qu’ils ne sont pas marrants! Il n’y a pas de style d’humour : t’es marrant ou tu ne l’es pas. Et puis voilà, je crois qu’il ne faut pas intellectualiser tout ça, il n’y a pas de théorie comme quoi : «Lui, il est deuxième en humour noir… lui, quatrième en humour sur les femmes»… On s’en fout, quoi! L’intérêt c’est de faire marrer et de faire des trucs qui te correspondent.»

À quoi ressemble le spectacle que vous présentez à Juste pour rire cette année?

«C’est mon deuxième spectacle, que je présente aussi en France! J’y résume les quatre dernières années de ma vie... en 1h20! C’est l’histoire d’un gars ordinaire qui est un peu dépassé par la société dans laquelle il vit, qui bosse à Charlie Hebdo, qui vit dans un pays qui est en état d’urgence et qui voit des gamins faire du vélo avec des casques à 8 ans, parce qu’il faut se protéger… mais ces mêmes gamins peuvent aller voir du porno en deux clics, tu vois? C’est un spectacle sur cette espèce de paradoxe dans lequel ma génération se trouve. C’est un spectacle très marrant et vachement plus personnel que le premier!»

Quel est votre rapport avec le public québécois?

«Ben, en fait, c’est pareil. C’est comme les gens qui disent : «Il n’y a pas de mauvais public, que de mauvais comédiens». Donc, les gens c’est les mêmes. Le but, c’est d’arriver à les faire marrer. Depuis que je joue ici, j’ai dû adapter certains trucs, parce que je ne suis absolument pas connu. Je recommence à zéro, en fait. Et c’est super bien! C’est comme Rocky qui tape dans la viande! Montréal, pour moi, c’est mon Rocky. Et Rocky, c’est bien, en fait. J’aime bien jouer ici, c’est un retour aux sources pour moi. Ça me permet de recommencer à zéro.»

Vous avez dit lors du gala Québec-France, lundi, que le fait de participer à Juste pour rire vous réconforte un peu après les terribles événements de Nice. Vous avez aussi vécu le drame de Charlie Hebdo. En tant qu’artiste, éprouve-t-on une dualité dans ce genre de moments? Est-il difficile de faire rire lorsque se joue l’horreur près de nous, arrive-t-on à s’en couper?

«La question qu’il faut se poser, après tout ça, c’est : «Est-ce que t’as envie de monter sur scène après de tels événements?». Je pense qu’on est dans un moment de deuil, mais notre boulot à nous c’est de continuer à travailler. Il ne faut pas s’arrêter de vivre. Le seul moyen pour que ces mecs perdent, c’est de continuer à monter sur scène, continuer à prendre des verres dans des bars, continuer à danser et continuer à rire. C’est tout. Ça n’a rien changé, sauf que j’aborde des thèmes différents, maintenant. Ça, c’est clair. Je ne parle plus des mêmes choses sur scène que lors de mon premier spectacle.»

À cause de ça?

«Oui, parce que je l’ai vécu. Mais ce n’est pas à cause de ça, en fait. C’est grâce à ça. C’est des sujets qui, avant, m’intéressaient beaucoup moins parce que je n’étais pas touché. Ce qui est assez paradoxal, d’ailleurs, parce que… Quand il y a 50 morts à Bagdad, on s’en fout. Mais maintenant que ça se rapproche, ça prend une autre ampleur. Mais ce sont les mêmes personnes qui meurent et les mêmes personnes qui tuent.»

Vous collaborez à Charlie Hebdo. Qu’est-ce qui a changé dans le ton de la publication depuis janvier 2015?

«Je suis peu légitime pour parler de Charlie Hebdo, parce que je n’y bosse que depuis deux ans. Mais je pense que la grande différence, c’est que c’est beaucoup plus regardé et beaucoup plus lu, désormais. Il faut comprendre Charlie Hebdo et le problème de la revue, c’est que les gens ne prennent pas de recul par rapport à elle. Plusieurs personnes, en France, sont choquées par certaines couvertures et considèrent que ça va trop loin… Il suffit de ne pas acheter Charlie Hebdo pour ne pas être choqué, quoi. Pour nous, le but, c’est de mettre la claque là où ça fait mal. C’est le but du jeu.»

Vous êtes aussi comédien et avez joué dans la version française d’Un gars, une fille. Qu’avez-vous retiré de cette expérience?

«Ouf! C’était il y a 15 ans et pourtant, elle est encore diffusée en France! C’était la série phare à l’époque et ça m’a permis de payer mon loyer! Je faisais toutes les mains, toutes les voix off. Quand j’y pense, ça aurait dû s’appeler «Un gars, une fille et un mec que tu connais pas»!»

Vous avez travaillé dans le milieu du droit avant de bifurquer vers l’humour. Pourquoi avoir fait ce choix?

«Oh, parce que j’ai eu la chance de réussir un examen qui s’appelle «le barreau», ce qui m’a permis de devenir avocat! À un moment donné, je me suis accordé une année sabbatique, et c’est ça qui m’a mené vers l’humour. Et cette année sabbatique dure maintenant depuis 15 ans. J’ai eu beaucoup de chance. C’est une belle année sabbatique!»

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