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Les prisons iraniennes refusent des soins aux détenus, selon Amnistie

Les prisons iraniennes refuseraient des soins aux détenus

Alors que le sort d'une professeure d'université montréalaise détenue en Iran suscite de plus en plus l'inquiétude de la communauté internationale, un rapport d'Amnistie internationale allègue que les autorités iraniennes mettent régulièrement à risque la vie des prisonniers d'opinion en leur refusant des soins médicaux.

Le rapport affirme que les autorités pénitentiaires iraniennes refusent des soins et des médicaments spécialisés, rejettent des libérations pour raisons médicales, interrompent volontairement des traitements médicaux et exercent des représailles contre les prisonniers qui se lancent dans des grèves de la faim.

Selon Amnistie internationale, des "preuves solides" montrent que dans certains cas, des soins ont été délibérément refusés à des prisonniers politiques dans le but de leur soutirer des "aveux", de les intimider ou de les punir.

Puisque l'organisation de défense des droits de la personne n'est pas autorisée à mener ses enquêtes en Iran, son rapport s'appuie sur des entrevues avec des avocats, d'anciens prisonniers et d'autres sources "bien informées", et dont les propos sont corroborés par des rapports médicaux lorsque cela est possible.

Le secrétaire général d'Amnistie internationale, Alex Neve, a qualifié les conclusions du rapport de "profondément troublantes".

"Avec ce rapport, Amnistie montre qu'il y a beaucoup de préoccupations en Iran concernant le fait que les autorités utilisent le droit à l'accès aux traitements et aux soins médicaux (...) comme une technique de répression" des prisonniers d'opinion, a déclaré M. Neve en entrevue avec La Presse canadienne.

"Nous demandons aux autorités iraniennes de cesser l'utilisation de l'accès aux traitements et aux soins médicaux comme technique de pression et de se conformer au droit international concernant la santé."

Bien que le rapport ne mentionne pas spécifiquement le cas de la professeure canado-iranienne Homa Hoodfar, M. Neve affirme qu'il soulève des inquiétudes quant à l'état de santé précaire de la femme de 65 ans.

Il souligne que la professeure d'anthropologie à l'Université Concordia souffre d'une maladie neurologique et qu'elle a subi un léger accident vasculaire cérébral l'an dernier.

"Puisque sa famille n'a pas pu entrer en contact avec elle, tout comme son avocat, nous ne savons pas du tout si elle reçoit les médicaments dont elle a absolument besoin", s'alarme M. Neve.

Au moins neuf des 18 prisonniers mentionnés dans le rapport sont détenus dans la même prison de Téhéran que celle où Mme Hoodfar est emprisonnée depuis son arrestation au moins de juin, pour des accusations qui n'ont toujours pas été précisées.

D'autres détenus de la prison d'Evin ont rapporté une série de violations de leurs droits fondamentaux: médicaments ou examens médicaux refusés, renvoi en prison au mépris de l'avis des médecins et négation des préoccupations de santé des détenus par les médecins.

Un homme aurait été forcé de retourner dans sa cellule 24 heures après avoir été opéré pour un cancer. Une détenue, Narges Mohammadi, aurait été menottée et attachée à un lit durant des examens médicaux de routine.

Hossein Rafiee, un ancien professeur d'université âgé de 71 ans dont la fille est résidente permanente au Canada, est gardé dans une section de la prison que le rapport décrit comme étant "sérieusement surpeuplée, mal aérée, infestée d'insectes et n'ayant pas suffisamment de lits et de toilettes".

La famille de M. Rafiee a rapporté qu'il ne bénéficiait pas de suivis médicaux réguliers, ce qui fait craindre qu'il ne reçoive pas la bonne dose de médicaments pour son hypertension artérielle et sa santé cardiaque.

Encore pire pour les femmes

Le rapport indique également que les femmes détenues à la prison d'Evin ont encore plus de difficulté à accéder aux soins médicaux parce que les professionnels de la santé de l'établissement sont presque tous des hommes.

"À plusieurs occasions, des femmes détenues qui ont eu des problèmes de santé se sont fait refuser des examens médicaux d'urgence ou d'autres traitements parce qu'il était jugé inapproprié qu'elles soient traitées par du personnel médical masculin", expose le rapport.

Les femmes feraient aussi l'objet "d'insultes sexistes et de harcèlement" lorsqu'elles ne se conforment pas strictement au port du voile islamique.

Les autorités iraniennes n'ont pas répondu aux demandes de commentaires d'Amnistie internationale, mais auraient utilisé les médias sociaux pour nier toute maltraitance envers les détenus.

Une ancienne étudiante de Homa Hoodfar a déclaré que les amis et les proches de la professeure étaient "très, très inquiets quant à sa santé".

Mona Tajali a expliqué que Mme Hoodfar souffrait d'une maladie neuromusculaire qui cause une grande fatigue musculaire et requiert une médication quotidienne.

"Je suis vraiment très inquiète du fait que parce que cette maladie n'est pas très connue, ceux qui la détiennent pourraient penser que c'est une maladie inventée ou que ce n'est pas très grave, alors que dans les faits, c'est un état très sérieux", a-t-elle dit.

La professeure Hoodfar a mené des recherches sur les femmes musulmanes dans plusieurs pays du Moyen-Orient.

Elle a été arrêtée la première fois en mars alors qu'elle était en Iran pour rendre visite à sa famille et poursuivre ses recherches. Elle a été libérée sous caution avant d'être arrêtée de nouveau en juin.

Les agences de presse semi-officielles iraniennes ISNA et Tasnim ont rapporté que des accusations formelles avaient été déposées contre Homa Hoodfar, mais sa famille et le gouvernement canadien n'étaient pas en mesure de corroborer ces informations.

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