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Aide à mourir: des patients possiblement placés devant un choix «cruel»

Aide à mourir: des patients possiblement placés devant un choix «cruel»

Au jour précis où entre en vigueur l'arrêt Carter sur l'aide à mourir, certains craignent que des patients atteints d'une maladie incurable sans être en phase terminale soient placés devant un choix cruel.

Certains malades pourraient avoir à décider de mourir maintenant, même s'ils ne se sentent pas encore prêts, ou risquer de ne pas pouvoir le faire plus tard en raison de l'adoption de C-14 et de ses critères d'admissibilité très restrictifs.

En point de presse en Colombie-Britannique lundi, la famille de Kay Carter, cette femme atteinte de sténose spinale dont la cause a été portée jusqu'en Cour suprême du Canada (CSC), a confié s'être sentie "trahie" par le gouvernement de Justin Trudeau.

Avec le projet de loi C-14, la famille estime que Mme Carter n'aurait pas pu obtenir l'aide médicale à mourir parce que sa maladie, bien qu'irrémédiable, ne permettait pas de prévoir une mort naturelle à court terme. Or, la "mort naturelle prévisible" est l'un des critères d'admissibilité du projet de loi libéral.

C-14 a été adopté aux Communes et est actuellement à l'étude au Sénat. Entre-temps, le délai imposé par la CSC au gouvernement fédéral pour modifier le Code criminel est venu à échéance lundi. Les patients qui souhaitent demander une aide médicale pour mettre fin à leurs jours peuvent donc, grâce à la décision du plus haut tribunal du pays, en faire la demande à leur médecin.

"Aujourd'hui, nous célébrons le fait que la loi canadienne permette désormais aux Canadiens un décès dans la dignité et la paix. Mais je me sens trahie: le gouvernement libéral a rédigé le projet de loi C-14 de manière si restrictive que ma propre mère n'y aurait pas eu droit", a déploré Lee Carter, fille de Kay, qui a porté le dossier à bout de bras pendant des années.

Aux côtés des proches de Mme Carter, Grace Pastine, directrice de litige de l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique, a dit craindre que certains patients soient bousculés dans leur décision.

"Un patient aujourd'hui peut se qualifier en vertu de la décision de la CSC, mais dans un mois ou deux, ne pas se qualifier en vertu de C-14", a-t-elle soulevé.

Ces malades auront à se demander s'ils veulent une aide à mourir rapidement , avant l'entrée en vigueur de C-14, ou attendre, au risque de ne plus être admissibles plus tard.

"Une personne devra se demander: dois-je tenter l'aide médicale à mourir maintenant, avant d'être prête à partir, alors que la vie a encore un sens pour moi, ou dois-je attendre et possiblement être condamnée à décéder d'une mort cruelle", a-t-elle illustré.

Selon elle, ce choix déchirant est la conséquence directe du projet de loi, plus restrictif que l'arrêt Carter.

Appel aux sénateurs

Les enfants de Mme Carter pressent le Sénat d'adopter des amendements au projet de loi libéral pour en élargir sa portée.

"C-14 n'est pas un bon premier pas. C'est un faux-pas", a insisté son fils, Price.

Plusieurs sénateurs ont d'ailleurs déjà manifesté leur souhait de voir le projet de loi amendé. Ils ont poursuivi leur étude du projet de loi lundi et entendu différents points de vue d'experts.

Le constitutionnaliste Peter Hogg a soutenu que la décision de la CSC "ne permet pas de restreindre la classe de personnes qui a droit" à l'aide médicale à mourir.

Son collègue Gerald Chipeur s'est, au contraire, dit d'avis que C-14 était constitutionnel, "ce qui ne veut pas dire que vous ne pouvez pas l'améliorer", a-t-il ajouté à l'endroit des sénateurs.

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