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Cinq questions pour comprendre Abou Sayyaf

Cinq questions pour comprendre Abou Sayyaf
Philippine police chief Director General Jesus Verzosa crosses out the picture of Mujibar Alih Amon, an alleged member of Abu Sayyaf, from a roster of wanted persons during a news conference in main police headquarters Camp Crame in Manila's suburban Quezon city February 25, 2010. Verzosa announced on Thursday the arrest of Amon who was allegedly involved in the kidnapping of 19 foreigners in Sipadan, Malaysia and the abduction of American Jeffrey Schilling in 2000. REUTERS/Erik de Castro (PHILIPPINES - Tags: CRIME LAW POLITICS)
Erik de Castro / Reuters
Philippine police chief Director General Jesus Verzosa crosses out the picture of Mujibar Alih Amon, an alleged member of Abu Sayyaf, from a roster of wanted persons during a news conference in main police headquarters Camp Crame in Manila's suburban Quezon city February 25, 2010. Verzosa announced on Thursday the arrest of Amon who was allegedly involved in the kidnapping of 19 foreigners in Sipadan, Malaysia and the abduction of American Jeffrey Schilling in 2000. REUTERS/Erik de Castro (PHILIPPINES - Tags: CRIME LAW POLITICS)

L'insurrection armée dans le sud des Philippines vient de faire une nouvelle victime : le Canadien John Ridsdel, tué lundi par ses ravisseurs, les islamistes du groupe Abou Sayyaf. Qui sont-ils et que veulent-ils? Décryptage.

Un texte de Ximena Sampson

Il s'agit d'un groupe islamiste radical présent dans le sud-ouest des Philippines depuis environ 25 ans. Son nom signifie « porteur de l'épée » en arabe.

Plusieurs pays, dont le Canada et les États-Unis, le considèrent comme un groupe terroriste.

Abou Sayyaf était initialement lié à Al-Qaïda, mais ses chefs ont prêté allégeance au groupe armé État islamique (EI) en 2014.

Abou Sayyaf demeure cependant un groupe très local, croit le journaliste Nicolas Hénin.« [Il a] des dynamiques locales, un recrutement local et des enjeux locaux. Il ne faut pas penser que cette allégeance en fait une province du califat », a-t-il soutenu en entrevue à l'émission 24/60.

Le groupe revendique la création d'un État musulman indépendant dans les régions du sud des Philippines à majorité musulmane.

En 1986, le gouvernement philippin a signé un accord de paix avec le Front de libération national moro (FLNM) et s'est s'engagé à créer une région autonome musulmane à Mindanao. Insatisfaits de cet accord, des dissidents ont alors créé Abou Sayyaf.

Alors qu'ils étaient environ 2000 à leurs débuts, il ne reste plus qu'environ 300 combattants.

Depuis les années 1970, plus de 100 000 personnes ont perdu la vie dans le conflit opposant les groupes indépendantistes musulmans à l'État philippin.

Abou Sayyaf est surtout actif dans les provinces de Basilan, Sulu et Tawi-Tawi, ainsi qu'a Mindanao.

« C'est un groupe dont la dimension islamique n'est pas aussi importante que l'extorsion et le banditisme », avance Dominique Caouette, directeur du Centre d'études de l'Asie de l'Est à l'Université de Montréal, en entrevue à l'émission 24/60.

Ils pratiquent régulièrement des enlèvements, ce qui leur a permis d'obtenir des millions de dollars. L'année dernière, ils ont notamment obtenu 6,7 millions de dollars en échange de la libération d'un couple allemand.

Abou Sayyaf réclamait 8 millions de dollars pour la libération de John Ridsdel. Ils l'ont exécuté à l'échéance de l'ultimatum. Les ravisseurs exigent le même montant pour chacun des trois autres otages capturés en même temps que M. Ridsdel.

Ils se financent aussi de plus en plus par le piratage. Au cours du dernier mois, 18 marins indonésiens et malaisiens ont été kidnappés dans la mer de Sulu, ce qui fait craindre aux autorités indonésiennes que cette route très fréquentée ne devienne « une nouvelle Somalie ».

Au fil des ans, Abou Sayyaf a enlevé des dizaines d'otages. Certains ont été tués, d'autres libérés. Les militants ont également mené plusieurs attaques sanglantes. Ils détiennent actuellement une vingtaine d'otages, dont un Canadien, un Novégien et son épouse philippine.

Abou Sayyaf en quelques dates :

  • Avril 2000 : Les islamistes enlèvent 21 personnes sur l'île malaisienne de Sipadan. Il s'agit de trois Allemands, deux Français, une Franco-Libanaise, deux Finlandais, deux Sud-Africains, neuf Malaisiens et deux Philippins.
  • Mai 2001 : Nouvel enlèvement dans un complexe de vacances de Palawan. Parmi les otages figurent 13 Philippins d'origine chinoise et 3 Américains. L'un d'entre eux meurt dans l'opération de sauvetage.
  • 27 février 2004 : Explosion d'une bombe dans un traversier dans la baie de Manille, causant la mort de 116 personnes. C'est le pire attentat terroriste de l'histoire des Philippines.
  • 14 février 2005 : Des explosions simultanées dans Manille et deux autres villes font 8 morts et 150 blessés.
  • Janvier 2009 : Abou Sayyaf enlève trois employés du Comité international de la Croix-Rouge (un Italien, une Philippine et un Suisse) en mission sur l'île de Jolo. Ils seront libérés quelques mois plus tard.
  • 5 décembre 2011 : un Australien est enlevé de sa maison, dans la région de Mindanao. Les islamistes exigent 2,5 millions de dollars. Il sera relâché en mars 2013.
  • Avril 2014 : Un couple d'Allemands est pris en otage près de l'île de Palawan. Le couple sera libéré six mois plus tard en échange d'une rançon de 6,7 millions de dollars.
  • 17 novembre 2015 : un homme d'affaires malaisien, Bernard Then, enlevé sur l'île de Bornéo, en Malaisie, est décapité.

Le gouvernement canadien recommande d'éviter tout voyage dans les régions de Mindanao et de l'archipel de Sulu, ainsi que les déplacements maritimes dans la portion méridionale de la mer de Sulu, en raison du risque d'enlèvement, des menaces terroristes et de la piraterie.

La semaine dernière, l'armée philippine a déclenché une offensive sur l'île de Jolo, dans l'archipel de Sulu, où seraient détenus les captifs. Plus de 2000 soldats et marines, appuyés par des hélicoptères d'assaut, ratissent la jungle.

Il faut savoir qu'il s'agit d'une région que l'État central ne contrôle pas, précise Dominique Caouette. « C'est un État de non-droit. Il y a beaucoup d'îles que l'armée philippine contrôle peu. C'est un endroit où l'État est très poreux. Il y a beaucoup de trafic, du marché noir, des pirates... C'est très difficile d'intervenir. »

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