La compagnie Pizza Pizza pourra installer son restaurant à moins de cent mètres d'une école secondaire, malgré les tentatives de la Ville de Brossard pour l'en empêcher. C'est la première fois au Québec qu'un règlement de zonage visant à éloigner la malbouffe des élèves faisait l'objet d'une contestation judiciaire.
Un texte de Thomas Gerbet
La Cour supérieure ordonne à la Ville de Brossard d'octroyer le permis à Pizza Pizza pour exploiter un restaurant directement en face de l'école secondaire Antoine-Brossard. Le juge Kirkland-Casgrain n'a pas retenu les arguments de la municipalité qui a agi maladroitement et dans la précipitation.
La cause était très suivie par plusieurs municipalités qui ont des projets de règlements semblables, comme Laval. La Ville de Brossard avait reçu l'appui de l'Association pour la santé publique du Québec, qui vantait sa démarche pour favoriser les saines habitudes de vie.
Le juge a invoqué « les droits acquis » et « l'imprécision des avis de motion » votés par Brossard pour barrer la route à Pizza Pizza. Ceux-ci avaient été adoptés après la signature du bail par le restaurateur. Quant au règlement officiel, il a été approuvé après la demande de permis par l'entreprise.
Chronologie :
- 12 mai 2015 : Pizza Pizza signe un bail locatif pour s'installer en face de l'école secondaire Antoine-Brossard. Dans les jours qui suivent, elle affiche sur les vitres des publicités annonçant son ouverture prochaine.
- 7 juillet 2015 : Le conseil municipal de Brossard adopte un avis de motion pour « restreindre » les usages aux fins de restauration dans la zone.
- 11 août 2015 : Pizza Pizza dépose sa demande de permis auprès de la Ville.
- 25 août 2015 : Le conseil municipal adopte un nouvel avis de motion pour « retirer » les usages aux fins de restauration dans la zone
- 28 août 2015 : La demande de permis est rejetée par la Ville.
- 20 octobre 2015 : Brossard adopte un règlement officiel pour retirer les usages aux fins de restauration dans la zone.
L'avocat Marc-André Lechasseur qui représentait Brossard, reconnaît qu'il y a eu « maladresse » dans la rédaction des avis de motion successifs : « malgré les intentions claires du conseil municipal, la rédaction de l'avis de motion n'était pas suffisamment claire ».
En théorie, un avis de motion aurait eu le pouvoir de geler les intentions de Pizza Pizza, mais le juge a donné raison au restaurateur en raison de l'imprécision. Par ailleurs, la Ville ne pouvait pas déposer un deuxième avis venant corriger le premier afin de gagner du temps.
Le règlement s'appliquera pour les futures demandes.
Pizza Pizza et le propriétaire du local commercial ont même tenté de faire invalider le règlement au complet en argumentant que la Ville empiétait sur les législations provinciales et fédérales en matière de santé, ce qui outrepassait ses pouvoirs, selon eux. « Cet argument ne tient pas la route », a balayé du revers de la main le juge.
Le règlement adopté par Brossard demeure donc valable pour interdire toute demande future de permis d'exploitation d'un restaurant dans la zone.
Le quart des adolescents canadiens ont un excès de poids, selon l'Association pour la santé publique du Québec. Brossard invoquait une étude américaine démontrant que le taux d'obésité augmente de 5 % chez les élèves d'une école située à moins de 150 mètres d'un restaurant fast-food.
Par le biais de l'un de ses avocats, Pizza Pizza nous a fait savoir qu'elle est satisfaite du jugement et qu'elle compte aller de l'avant avec l'installation de son restaurant.
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