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L'Agence de revenu du Canada doit mieux cibler l'évasion fiscale, croit le sénateur Percy Downe

Évasion fiscale : Ottawa doit miser sur les « gros poissons »

OTTAWA – L’Agence de revenu du Canada fait un « terrible » travail quand vient le temps de s’attaquer aux « gros poissons » qui cachent leur argent dans les paradis fiscaux, estime un sénateur libéral.

Percy Downe, sénateur de l’Île-du-Prince-Édouard, ne comprend pas pourquoi l’Agence de revenu du Canada (ARC) refuse de calculer l’écart fiscal au pays afin de mieux s’attaquer au problème. C’est pourquoi il déposera un projet de loi pour obliger le gouvernement Trudeau à mesurer le manque à gagner chaque année.

Percy Downe (à droite) s'implique dans la lutte à l'évasion fiscale depuis près d'une décennie.

« Il y a un double standard : si vous tentez de tricher dans votre rapport d’impôts, vous avez bien des chances d’être attrapés et reconnus coupables. Si vous trichez à l’étranger, [l’ARC] va conclure un accord avec vous – s’ils vous retrouvent. »

L’écart fiscal permet de mesurer la différence entre les impôts qui seraient payés si toutes les obligations étaient respectées et les impôts qui sont réellement reçus. Il permet aussi de démontrer l’efficacité de l’ARC, explique le sénateur Downe.

« C’est peut-être une partie du problème. L’Agence de revenu ne veut pas être exposée pour leur travail inefficace dans la lutte contre l’évasion fiscale à l’étranger », clame-t-il.

Miser sur les « gros poissons »

Son projet de loi modifierait la Loi sur l’Agence du revenu du Canada afin de l’obliger à produire un rapport distinct sur l’évasion fiscale à l’étranger. Si l’Agence parvient à emprisonner les plus petits contrevenants au pays, elle a failli à sa tâche à l’étranger à son avis.

« L’ARC fait un excellent travail pour l’évasion fiscale domestique. Mais les gros poissons placent leur argent outre-mer et c’est là où l’ARC doit miser ses efforts. »

« Au pays, ils font un bon travail. À l’étranger, ils font un travail terrible », résume-t-il.

Dans son premier budget, le gouvernement Trudeau a augmenté le budget de l’ARC afin de mettre la main sur davantage de fraudeurs et renflouer les coffres de l’État.

"Ce qui nous manque, c’est davantage d’actions." - Sén. Percy Downe

Ottawa consacrera près de 800 millions de dollars additionnels sur cinq ans pour lutter contre l’évasion fiscale. Plus de la moitié de cet argent – soit 444,4 millions de dollars – ont été mis de côté pour embaucher plus de vérificateurs et de spécialistes en plus d’améliorer les travaux d’enquête de l’ARC.

Cet investissement devrait rapporter environ 2,6 milliards de dollars sur cinq ans – un montant qui n’inclut pas les gains des provinces et des territoires.

Un montant de 351,6 millions de dollars sera aussi accordé à l’Agence pour « accroître sa capacité à recouvrer les dettes fiscales impayées », une mesure qui permettrait de recouvrir 7,4 milliards de dollars selon le gouvernement.

Le sénateur Downe dit qu’il s’agit des « nouvelles les plus positives jusqu’à présent » depuis qu’il s’intéresse au dossier de l’évasion fiscale. Malgré les bonnes intentions du nouveau gouvernement, il attend toujours des mesures concrètes de la ministre du Revenu national, Diane Lebouthillier.

« Nous avons eu beaucoup de discussions dans les dernières années. Ce qui nous manque, c’est davantage d’actions », conclut-il.

Ni l’ARC ni la ministre n’avaient répondu à nos demandes d’entrevue au moment de publier.

La pêche dans les Barbades

« Ce que présente le sénateur Downe, c’est bien, mais il faut prendre plus d’actions pour faire en sorte que les plus riches ne se détournent pas de leur rôle social qui est de payer leurs impôts comme tout le monde », indique le député bloquiste de Joliette, Gabriel Ste-Marie.

Le député avait déposé un projet de loi à la Chambre des communes, en février, afin d’obliger les actionnaires canadiens des sociétés étrangères à la Barbade à payer leurs impôts comme s’ils avaient gagné l’argent au Canada.

Gabriel Ste-Marie veut ainsi dissuader les entreprises de former des « coquilles vides » et de pratiquer l’évasion fiscale en passant par la Barbade.

"La Barbade, c’est le paradis fiscal du Canada." - Gabriel Ste-Marie

Son projet de loi a été retiré par le président de la Chambre, Geoff Regan, pour des raisons de procédures parlementaires sous prétexte que le député ne pouvait pas imposer une nouvelle charge fiscale.

Son idée devra bientôt être votée au Parlement sous la forme d’une motion qui appelle le gouvernement à modifier la Loi de l’impôt sur le revenu et à mettre un terme à « l’évitement fiscal généralisé » dans ce pays considéré comme un paradis fiscal.

« La Barbade, c’est le paradis fiscal du Canada. Après les États-Unis, c’est là où il y a le plus d’investissements directs à l’étranger de la part du Canada », explique-t-il.

Depuis l’accord Canada-Barbade du gouvernement de Pierre Elliot Trudeau, en 1980, le fédéral a signé des dizaines de conventions avec des pays réputés pour être des paradis fiscaux afin d’éviter la double imposition.

Il y a une dizaine d’années, l’ancien premier ministre libéral Paul Martin a également modifié les lois sur l’impôt. Les partis d’opposition l’accusaient d’avoir voulu aider Canada Steamship Lines, une entreprise familiale.

Selon Gabriel Ste-Marie, les libéraux doivent passer des paroles aux actes et rapatrier l’argent des grosses compagnies qui profitent des accords mis en place.

« Il est temps que le gouvernement de Trudeau fils donne un sérieux coup de barre pour défaire ce qui avait été fait. »

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