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Enerkem et Edmonton poursuivies pour plusieurs millions de dollars

Enerkem et Edmonton poursuivies pour plusieurs millions de dollars
ICI RADIO-CANADA

La construction d'une usine de transformation des déchets en éthanol en Alberta tourne à la contestation judiciaire. L'entreprise québécoise Enerkem et la Ville d'Edmonton sont poursuivies par des fournisseurs et des sous-traitants qui réclament à l'entreprise, financée en partie par la capitale albertaine et le gouvernement provincial, près de 7,4 millions de dollars.

Un texte de Sylvain Bascaron

En 2008, des politiciens et le PDG d'Enerkem, Vincent Chornet, célébraient un nouveau partenariat. Enerkem allait construire une usine pour transformer des déchets en éthanol à partir de 2012.

Cette première mondiale à l'échelle commerciale, qui devait coûter 80 millions de dollars, est financée en partie par le gouvernement albertain et la Ville d'Edmonton, à hauteur de 23 millions de dollars.

En 2008, le maire d'Edmonton, Stephen Manel, le premier ministre albertain, Ed Stelmach, et le PDG d'Enerkem, Vincent Chornet annonçaient un parternariat pour transformer les déchets en éthanol. PHOTO : ICI RADIO-CANADA

Presque six ans plus tard, le coût de construction est estimé à plus de 100 millions de dollars, et la production d'éthanol ne doit pas commencer avant 2017.

« On a pris notre temps, on a bien fait les choses, explique la directrice des communications d'Enerkem, Annie Paré. Effectivement, il y a certains délais, mais ça fait partie de la nature même de lancer une technologie qu'on dit de rupture, complètement nouvelle sur le marché mondial. [...] C'est quand même une usine à grande échelle; alors on s'assure que tout fonctionne correctement, étape par étape. »

Des fournisseurs poursuivent Enerkem

Six fournisseurs d'Enerkem poursuivent maintenant l'entreprise pour plus de 6,4 millions de dollars. Aucune allégation n'a été prouvée en cour.

Radio-Canada a parlé à trois de ces fournisseurs. Le président de l'une de ces compagnies, Stéphane Champoux, de Papillon et Fils, nous a accordé une entrevue.

Le président de Papillon et Fils, Stéphane Champoux, qui poursuit Enerkem et la Ville d'Edmonton PHOTO : ICI RADIO-CANADA

« Ç'a été une réalisation de projet extrêmement difficile », dit-il. « Le rôle de Papillon et Fils était de dessiner et de construire des modules qui ont été expédiés à l'usine d'Edmonton.

« Une fois que les dessins étaient finis et remis pour fabrication, [Enerkem] refaisait de l'ingénierie pour voir où ils pouvaient réaliser des économies et changeaient les dessins pour des choses qui étaient en cours ou finies. Quand les dessins sont deux, trois, quatre mois en retard », poursuit Stéphane Champoux, « c'est impossible de livrer dans les délais. »

Papillon et Fils réclame 1,062 millions de dollars à Enerkem et à la Ville d'Edmonton. « On a livré l'ensemble des modules, malgré qu'on nous demandait des changements quand les modules étaient déjà sur les camions », explique le fournisseur. « Environ 20 % de la facture n'est pas payée. Tant qu'il restait des modules dans la cour, les paiements arrivaient. Quand les modules ont été livrés, les paiements ont arrêté. »

La directrice des communications d'Enerkem, Annie Paré, préfère ne pas commenter cette cause, préférant s'en remettre aux tribunaux.

Quatre sous-traitants poursuivent

L'avocat Philippe Thibault, de la firme Avocats BSL, représente maintenant quatre sous-traitants qui poursuivent, eux aussi, Enerkem et la Ville d'Edmonton.

Au départ, ces quatre fournisseurs avaient un contrat avec l'entreprise québécoise Métal Énergie qui, elle, fournissait les modules finalisés à Enerkem. Or, Métal Énergie qui poursuivait Enerkem et Edmonton pour plus de 1 million de dollars a fait faillite.

Les quatre entreprises ont donc repris les procédures pour que leurs créances à l'endroit de Métal Énergie soient transférées au compte d'Enerkem. Ils poursuivent maintenant l'entreprise et la Ville d'Edmonton pour plus de 800 000 $.

Les clients de Me Thibault allèguent que Métal Énergie n'a pas reçu tous les paiements d'Enerkem. « Métal Énergie n'a donc pas payé mes clients, ce qui fait en sorte qu'aujourd'hui, mes clients sont toujours impayés. » « Métal Énergie, n'ayant pas les reins assez solides suivant l'absence de paiement d'Enerkem, a dû faire faillite. »

Quant à Enerkem, elle soutient que son lien contractuel n'est pas avec les sous-traitants, mais avec Métal Énergie. Elle dit avoir payé le fournisseur et a bon espoir que les procédures légales se termineront en mai.

Enerkem contre-attaque

La directrice des communications d'Enerkem pense qu'il faut remettre le tout en contexte. « Nous avons travaillé, depuis les tout débuts de la construction de cette usine, avec 256 fournisseurs. De ce nombre, il y en a 7 avec qui on a des litiges effectivement. Donc, il y a 249 fournisseurs avec qui nous avons de saines et bonnes relations d'affaires », indique Mme Paré. Enerkem considère que Métal Énergie est un seul demandeur et ne compte pas ses quatre sous-traitants.

La directrice des communications d'Enerkem, Annie Paré. PHOTO : ICI RADIO-CANADA

Dans les documents de défense déposés à la cour, l'entreprise réfute toutes ces allégations. Dans certains cas, elle prétend ne pas être liée par contrat avec les plaignants. Dans d'autres, elle allègue que des retards de livraison ou de mauvaises fabrications expliquent les paiements incomplets.

En réponse à certaines poursuites, Enerkem réclame aussi des dommages et pénalités à hauteur de 21 millions de dollars, alléguant notamment que certains fournisseurs sont responsables de retard, de non-conformité ou de négligence.

La ville d'Edmonton doit se défendre

Dans 8 des 10 poursuites, la Ville d'Edmonton est citée comme défenderesse, parce que la municipalité a transféré des fonds à Enerkem.

« La Ville aurait dû savoir qu'il y avait un problème et aurait dû mettre un frein [aux] paiements. Et la Ville aurait du provisionner suffisamment de réserves [...] pour s'assurer que les fournisseurs soient payés dans la mesure où [elle] savait qu'il y avait un risque de non-paiement », selon l'avocat Philippe Thibault.

La Ville d'Edmonton a refusé de nous accorder une entrevue.

Dans une déclaration envoyée par courriel, la Ville s'en remet aux tribunaux. La déclaration précise également que « la Ville est confiante qu'elle a rempli toutes les conditions de son accord de subvention avec la province pour le projet ».

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