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À 80 ans, David Suzuki passe sereinement le flambeau à ses successeurs

À 80 ans, David Suzuki passe le flambeau à ses successeurs
Radio-Canada

David Suzuki fête, jeudi 24 mars, ses 80 ans, dont plus de 50 passés sous les projecteurs en tant que scientifique, puis présentateur de l'émission populaire The Nature of Things, et farouche défenseur de la planète.

Un texte d'Anne-Diandra Louarn

«Un sentiment de sagesse et de liberté» : c'est en toute sérénité que David Suzuki aborde son 80e printemps. «Mon père est décédé à l'âge de 85 ans et il me semblait très vieux, mais moi je me sens énergisé», confie l'octogénaire dans un entretien accordé mardi à Radio-Canada. «À mon âge, je ne suis pas obligé de courir après un emploi, une promotion, la célébrité, l'argent ou le pouvoir. Donc je suis libre, je peux dire ce que j'ai sur le coeur. Et si les gens en sont offensés, ça m'est égal! »

Confortablement installé sur le patio ensoleillé de sa fondation, David Suzuki observe de temps à autre les employés s'affairer à l'intérieur. Il flotte, ce jour-là, comme un air de fête dans les bureaux vancouvérois de la fondation où l'on a tenu a célébrer un peu plus tôt l'anniversaire du fondateur comme il se doit : à boire, à manger et une distribution d'arbres à planter pour toute l'équipe. C'est aussi cela honorer l'héritage de David Suzuki.

Entouré chaleureusement de son équipe, l'environnementaliste s'est fendu d'un discours emprunt d'émotion et de nostalgie : «Je suis très fier de la fondation, vous êtes mon plus bel héritage».

L'heure est indubitablement au bilan. Fierté, reconnaissance pour ses employés, mais sa plus grande réussite demeure, de son propre aveu, ses enfants : trois sont issus d'une première union (Tamiko, Troy, Laura) et deux autres (Severn, Sarika) de son second mariage avec Tara Cullis, cofondatrice de la fondation qui existe depuis 1990.

«Mes enfants contribuent à faire du Canada et du monde un meilleur endroit. Je dois dire que j'ai très bien choisi mes deux épouses. J'ai des enfants extraordinaires.»

Conserver le nom Suzuki

Ses deux filles, Severn et Sarika, semblent aujourd'hui en pole position pour reprendre les rênes du navire Suzuki. «La transition est déjà en cours», avoue-t-il.

David, Tara et leurs deux filles ont même commencé à travailler avec une consultante spécialiste en transition de patrimoine familiale. «C'est un exercice très utile et amusant. Elle nous pose des questions sur nos opinions, nous discutons de différents sujets pour nous assurer que nous partageons la même vision des choses», explique-t-il.

Ils étudient également ensemble les chemins empruntés par les familles Cousteau, Kennedy ou encore Rockfeller.

«Je pense qu'il est absolument essentiel que le nom Suzuki soit conservé au sein de la fondation», note Harvey McKinnon, auteur renommé et directeur d'une entreprise éponyme spécialiste des questions caritatives et de financement à Vancouver. Il était également dans la toute première équipe de collecte de fonds au lancement de la fondation il y a 20 ans.

«Je connais les filles Suzuki, elles sont incroyablement intelligentes et passionnées. Elles ont hérité des gènes de David. C'est une très bonne chose si elles reprennent la fondation.»

«Une transition particulièrement délicate»

Autre signe d'une passation de pouvoir entamée : David Suzuki a quitté le conseil d'administration il y a plusieurs années déjà, au moment où plusieurs controverses entre le gouvernement Harper et des scientifiques avaient marqué l'actualité.

«Il a, depuis, un rôle limité au sein de la fondation», rappelle Kai Chan, chercheur à l'Institut pour les ressources, l'environnement et le développement durable à l'Université de la Colombie-Britannique. «La marque Suzuki n'appartient plus uniquement à David. Pourtant, l'organisme est aujourd'hui plus fort que jamais, même s'il n'y apporte plus activement ses lignes directrices», ajoute-t-il.

Malgré l'arrivée au pouvoir du gouvernement Trudeau, pas question pour David Suzuki de réintégrer ses anciennes fonctions au sein du conseil d'administration. «Je suis heureux comme ça», affirme-t-il.

Contrairement à d'autres organismes comme Greenpeace ou Sierra Club bâtis autour d'une impulsion collective, «la transition pour la fondation Suzuki est bien plus délicate, car la marque repose intégralement sur une personne», commente Harvey McKinnon. Il leur faut intégrer les successeurs potentiels petit à petit, conserver le lien de confiance établi avec le public et les philanthropes.

«Et dire que je voulais appeler la fondation Pender, comme l'île Pender!», plaisante David Suzuki. C'est son équipe de l'époque qui l'a convaincu de faire de son nom, une marque.

Un lien étroit parfois dangereux comme a pu l'expérimenter la fondation par le passé, lorsque David Suzuki s'est retrouvé sous le feu des critiques en 2013 pour sa fortune présumée et son train de vie peu en adéquation avec les valeurs vertes. Des allégations qui avaient poussé le directeur général Peter Robertson à défendre le nom et donc la marque Suzuki. L'incendie a vite été éteint.

«La fondation a engagé et mis en avant du personnel vraiment qualifié avec de vraies qualités de dirigeant ces dernières années, c'est la clé», estime Kai Chan. Un nouveau directeur général et un nouveau président du conseil d'administration seront annoncés prochainement.

Une nouvelle étape qui devrait mettre l'emphase sur la nouvelle génération pour le plus grand plaisir de David Suzuki, qui compte bien accueillir ces changements d'un œil bienveillant : «Aucun mouvement ne devrait dépendre d'une ou deux personnes. J'ai écrit beaucoup de livres, parlé dans les médias, dans de nombreuses vidéos. Je veux aujourd'hui passer tout cela aux jeunes. Ce n'est pas mon héritage, c'est le leur».

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