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Attentats à Bruxelles: Ce que les erreurs du communiqué de Daech révèlent

Ce que les erreurs du communiqué de Daech révèlent des attentats

Comme après les attentats de Paris, Daech n'a pas tardé à revendiquer le double attentat meurtrier à Bruxelles qui a fait -selon le dernier bilan- 31 morts et 270 blessés.

Selon le communiqué diffusé dès mardi après-midi par l'organisation jihadiste, "une cellule secrète des soldats du Califat (...) s'est élancée en direction de la Belgique croisée qui n'a de cesse de combattre l'Islam et les musulmans". Dans sa version audio diffusée le lendemain, la revendication reprend quasiment mot pour mot le communiqué de la veille.

Ci-dessous donc, le communiqué tel que diffusé par l'Etat islamique.

Si à première vue cette publication donne l'impression d'une opération terroriste directement pilotée depuis la Syrie, un certain nombre d'approximations et d'incohérences (outre les fautes de français) trahissent une certaine distance avec les actions perpétrées hier dans la capitale belge.

Erreur sur l'arsenal des terroristes

Dans la revendication de l'EI, on peut lire que les assaillants portaient des "ceintures explosives, des bombes et des fusils mitrailleurs". Or, selon les déclarations faites par le procureur Frédéric Van Leeuw, cela ne colle pas du tout à ce qu'ont découvert les enquêteurs sur place. Au cours de sa conférence de presse, le représentant du parquet belge a en effet indiqué "qu'aucune arme de poing" n'a été retrouvée à l'aéroport, contrairement à ce que plusieurs médias avaient affirmé la veille.

Comme l'a indiqué sur Twitter le journaliste spécialiste du jihadisme, Wassim Nasr, ce détail montre que l'EI s'est basé sur des déclarations de presse pour rédiger son communiqué. Ce qui permet d'apprécier autrement le degré d'implication de l'organisation jihadiste dans l'exécution des attentats de Bruxelles.

Pas d'information sur le nombre d'assaillants

Autre détail intéressant présenté par le communiqué, Daech s'abstient de mentionner le nombre de jihadistes ayant pris part à l'assaut, à la différence des attentats de Paris où l'EI revendiquait une action menée par «huit frères» (alors qu'au final ils étaient 10). Plusieurs hypothèses peuvent expliquer cette absence d'information dans le communiqué de Bruxelles. D'abord, on peut considérer que Daech s'abstient de révéler le nombre de «moudjahidins» pour compliquer la tâche des enquêteurs et ainsi permettre à certains auteurs de prendre la fuite ou frapper encore.

Aussi, on peut penser que les cadres de Daech sont volontairement non-informés de certains préparatifs pour ne pas mettre en péril la mission des terroristes. Ainsi, ce détail montrerait encore que les cellules agissent avec une complète liberté d'action et que les détails des opérations terroristes ne sont pas connues des responsables de Daech, comme le souligne encore Wassim Nasr.

Le profil pas très «soldat du Califat» d'Ibrahim El Bakraoui

Dans sa terminologie habituelle, Daech explique dans son communiqué que ce sont des «soldats du Califat» qui ont mené ces attentats, et qu'«Allah a ainsi donné la victoire entre les mains de [leurs] frères et jeté la crainte et l'effroi dans le cœur des croisés». Un champ lexical martial et victorieux qui glorifie la dimension guerrière de l'acte des terroristes ayant fomenté des «frappes précises».

Là encore, la confrontation avec la réalité est éclairante. Déjà, si l'Etat islamique se félicite de «frappes précises», il ne mentionne pas la bombe qui n'a pas fonctionné en même temps que les autres à l'aéroport. Dissimulée dans un sac, celle-ci "contenait la charge explosive la plus importante" a indiqué le préfet. Un dysfonctionnement dans le plan des jihadistes qui permet de relativiser la "précision" revendiquée dans le communiqué (même s'il est indéniable que le niveau de sophistication de l'attaque est très élevé). Mais surtout, le testament laissé par Ibrahim El Bakraoui écorne un peu l'image du moudjahidin déterminé à mourir à martyr. Et pour cause, cet enregistrement audio, visiblement confus, ne semble comporter aucune référence à l'organisation jihadiste.

Aussi, dans ce document, le terroriste affirme «être dans la précipitation», «ne plus savoir quoi faire», «ne plus être en sécurité» car il est «recherché de partout». Il évoque un possible lien avec Salah Abdeslam, le suspect des attentats de Paris arrêté le 18 mars, puisqu'il affirme que, «s'il s'éternise», il finira «à côté de lui dans une cellule». On est donc loin de la revendication de type Amédy Coulibaly.

Il est dans l'intérêt de Daech de raconter à ses sympathisants que les assaillants ont agi selon les principes du jihad tels que ceux prônés par l'EI alors que, et le cas des frères El Kaouri le montre bien, les choses semblent visiblement plus compliquées. Après tout, Sun Tzu ne disait-il pas que «toute guerre est basée sur la tromperie»?

Explosions à Bruxelles

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