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Tournée américaine: l'Orchestre symphonique de Montréal (OSM) rayonne à Washington

Quand l'OSM rayonne à Washington
Courtoisie OSM

Après une première visite il y a trente ans, l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM) était de retour à Washington, lundi, pour y proposer les œuvres de Debussy, Prokofiev et Stravinsky, au Concert Hall du Kennedy Center. Malgré une acoustique qui n’a rien de comparable à celle de la Maison symphonique, les musiciens de Kent Nagano ont gagné les cœurs des spectateurs lors de ce concert-lancement de la tournée américaine, qui a lieu du 14 au 26 mars.

Certaines personnalités publiques, dont le maire de Montréal Denis Coderre, l’ancien premier ministre du Québec et président de l’OSM, Lucien Bouchard, et le jeune compositeur québécois (qui réside en Allemagne) Samy Moussa étaient dans l’assistance. Pouvait-on choisir mieux comme rampe de lancement pour le vaisseau de Kent Nagano ? Washington est un symbole énorme au plan national. Même si le chef d’orchestre affirmait récemment en entrevue que le choix de cette ville comme point de départ de la tournée était circonstanciel, on peut dire que parfois, le hasard fait bien les choses. D’autant plus que les magnolias sont en fleurs dans Washington, un savoureux clin d’œil Au Sacre du printemps d’Igor Stravinsky.

L’orchestre a ouvert le bal avec Jeux de Claude Debussy, sorti pour une première fois à Paris, en 1913. Lorsque les premières rondes de pizzicato sont livrées par les musiciens, on peut avoir l'impression qu’elles sont un brin retenues. Les délicates nuances également, qui illustrent bien l’instabilité de cette œuvre, sont difficiles à capter dans la salle. Finalement, les musiciens s’adapteront et la beauté ludique de Jeux sera néanmoins sauvée. La rigueur a remporté la bataille sur la pauvreté sonore des lieux.

En effet, il faut admettre que la capitale américaine ne dispose pas de la meilleure salle de concert en Amérique du Nord. Le son ne voyage pas très bien dans ce Concert Hall, fier, mais un peu vieillot. Même avec une place de choix au parterre, les subtilités peinaient à se rendre à nos oreilles. En fait, c’est surtout pour Jeux de Debussy, que la sécheresse de la salle a joué en défaveur de l’orchestre et des spectateurs, qui ont d’ailleurs offert de modestes applaudissements.

Impérial

Au premier mouvement de Prokofiev, Daniil Trifonov semble vouloir conserver son énergie. Nenni, le son n’est juste pas assez fort. Mais quand il s’emballe, et que l’orchestre s’adapte merveilleusement bien à lui, deux minutes plus tard, tout devient limpide… et impérial pour ce Concerto no 3 de Prokofiev. La musique habille de belle manière le jeu extrêmement physique, mais sensible, de Trifonov, qui pour ses 25 ans, démontre une maîtresse époustouflante de son art.

Même au cours des plus délirantes envolées, le soliste sera pratiquement sans faille. Et que dire des musiciens, qui maîtrisent la pièce à merveille. Soulignons que cette œuvre est d’une grande exigence technique, particulièrement dans le troisième mouvement. Pourtant, sous les doigts de Trifonov, les sons deviennent d’un romantisme fou. Avec une touche supplémentaire au plan de l’émotivité (ou de la maturité), ce pianiste deviendra démentiellement bon. Moment fort de la soirée, que les spectateurs ont adoré. « Very impressive. Just amazing », soufflera même un habitué du Concert Hall à son ami d’à côté.

Que de volupté pour ce Prokofiev offert par les musiciens de l’OSM et le pianiste Daniil Trifonov.

Le printemps s’impose

Au retour de l’entracte, l’OSM entame les premières mesures du provocateur Sacre du printemps d’Igor Stravinski - il avait surtout déstabilisé les mélomanes de Paris à sa sortie en 1913, dont plusieurs avaient crié au scandale -, œuvre majeure du XXe siècle. Nous sommes au début de la création sur Terre. Tout nous transporte au commencement de la vie. Les contrastes sont forts entre les délicates touches de violons et les autres sections de l’orchestre. Voilà, c’est le printemps américain qui réclame son droit sur l’hiver!

Nagano se fait ici plaisir sur ce 3e concerto de Stravinsky, qui requiert passablement d’énergie. Sans hésitation, on sent que les spectateurs sont happés par la fougue des musiciens. Est-ce que le chef pousse un peu trop l’orchestre à certains moments? Possible, mais ce choix est davantage nourri par une fierté enthousiaste que par un manque de maîtrise de la pièce.

Quand nous imaginons l’oiseau pointer son bec dans le feuillage ; quand nous voyons les rayons de soleil traverser le ciel chargé de nuages (est-ce l’excellent travail des clarinettes qui met dans un tel état ?), quand nous sentons les tambours nous pénétrer le corps ; quand les plaintes des trompettes (dans un jeu de question-réponse) nous révèlent tout le mysticisme de la vie ; quand les humains sacrifient au nom de la vie… Quand tout finit, nous sommes convaincus que Nagano possède joliment son Sacre du printemps. Washington a adoré.

L'OSM et Kent Nagano ont offert un généreux concert bonifié par ailleurs de trois rappels. Le premier offert: Gavotte de la partita pour violon solo no3 en mi majeur de Bach (transcription de Rachmaninov) par Daniil Trifonov. Belle douceur après les envolées de Prokofiev. Ensuite, l'OSM a offert Pavane pour une infante défunte de Ravel ainsi que Farandole, de Bizet (extrait de L'arlésienne).

L’OSM poursuivra sa route pour livrer une dizaine de concerts à New York, Boston, Chicago, San Diego, Santa Barbara et Berkeley, notamment.

Les frais du séjour de notre journaliste à Washington ont été assumés par L’OSM.

L’itinéraire et les programmes de la tournée sont disponibles sur le site internet de l’OSM.

Programmation 2016-2017 de l'OSM

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