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LesTicketsdeBarrette.com: La CAQ dénonce... et récolte vos données?

La CAQ dénonce... et récolte vos données?
Capture d'écran

QUÉBEC – L’initiative LesTicketsdeBarrette.com a beaucoup fait jaser dans les médias lundi. Mais, au-delà de la dénonciation, le microsite permet à la CAQ de bonifier ses connaissances sur les électeurs québécois.

Les Tickets de Barrette invite les internautes à écrire au ministre Gaétan Barrette pour dénoncer les tarifs de stationnement dans les hôpitaux du Québec. Mais pour ce faire, l’auteur doit entrer son nom, son adresse courriel et son code postal.

«Il y a de la collecte de données qui se fait, c’est assez manifeste», estime Thierry Giasson, professeur agrégé à l’Université Laval et spécialiste en marketing politique.

Ce type d’initiatives permet de segmenter l’électorat. «Ça permet d’identifier des enjeux d’intérêt pour la personne et ensuite de mobiliser des gens sur ces enjeux, poursuit Thierry Giasson. On peut alors, à partir de la base de données, envoyer des courriels sur certains enjeux à certains électeurs, parce qu’on sait que ça va les faire réagir.»

Le microsite est le dernier d’une série de coups d’éclat similaires de la CAQ. En 2013, le parti de François Legault a créé TaxeScolaire.com, où les Québécois étaient invités à dénoncer la hausse de la taxe scolaire dans leur région. «Ça nous a donné une idée des endroits où ce sujet était porteur pour nous», confiait l’actuelle directrice générale de la CAQ, Brigitte Legault, au magazine L’actualité en septembre dernier.

Plus tôt cette année, le parti a organisé une conférence de presse un dimanche (journée tranquille dans l’actualité) pour dénoncer une nouvelle «taxe» qui viserait les automobilistes du 450. Encore une fois, la CAQ invitait les électeurs à signer une lettre afin de dénoncer la «taxe» auprès du gouvernement.

Idem avec le microsite Ligne434.com, où les électeurs étaient invités à signer une pétition contre la hausse de tarifs dans les CPE.

La CAQ reconnaît à demi-mot que ces initiatives peuvent servir à communiquer avec les électeurs par la suite. Tous les partis s’adonnent à cette pratique à des degrés divers, souligne-t-on. «Tout comme les partis au fédéral, Québec Solidaire, le PQ et le PLQ, la CAQ se réserve aussi le droit d’utiliser ces renseignements fournis volontairement par les internautes afin de leur envoyer des informations sur le parti», précise par courriel le porte-parole du chef caquiste, Guillaume Simard-Leduc.

Les internautes peuvent «en tout temps», demander à être retirés des listes d’envois, souligne-t-il. «L’objectif principal de ces campagnes est de mobiliser les Québécois qui se sentent interpellés par un enjeu précis et tenter de faire bouger le gouvernement par un mouvement de contestation sur Internet», ajoute Guillaume Simard-Leduc.

À titre d’exemple, il affirme que le site Ligne434.com «a mobilisé plus de 10 000 personnes».

Publicités ciblées

Chercheur à la Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires, Yannick Dufresne explique que les informations récoltées dans ce type d’initiative permettent d’aller au-delà du simple courriel. «On peut, par exemple, faire des publicités radio ciblées pour des régions où on voit une forte mobilisation pour un enjeu particulier», dit ce spécialiste du micro-ciblage.

D’ailleurs, les partis politiques distinguent de plus en plus leur message national des publicités locales, poursuit Yannick Dufresne. «Il y a un message macro, pour l’ensemble de la population, où on focus sur des enjeux sur lesquels tout le monde est d’accord, comme l’économie ou l’environnement, illustre-t-il. Mais ensuite on développe un message micro qu’on communique avec certaines couches démographiques très précises, via les téléphones cellulaires ou la radio.»

Les messages ciblés permettent également de créer des campagnes de financement plus efficaces, affirme Thierry Giasson. «Des stratèges de partis m’ont confié que, quand on communique avec les gens sur des enjeux qu’ils considèrent importants, ils ont plus tendance à faire une contribution financière», raconte-t-il.

Toutefois, les deux chercheurs s’entendent pour dire que la segmentation de l’électorat demeure peu développée au Québec, alors qu’elle est utilisée abondamment aux États-Unis et au niveau fédéral. «D’un point de vue de collecte de données, ce que fait la CAQ est assez novateur», dit Thierry Giasson.

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