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Résistance aux antibiotiques: la lutte aux superbactéries stagne

Antibiotiques: la lutte aux superbactéries stagne
Studio shot of various pills in bottle
Jamie Grill via Getty Images
Studio shot of various pills in bottle

Des superbactéries résistantes aux antibiotiques menacent la résurgence d'infections dangereuses et mortelles. Pourtant, la recherche d'alternatives thérapeutiques dans ce domaine est au point mort, dû à son manque de rentabilité.

La surconsommation d'antibiotiques chez l'homme et les animaux d'élevages rendent ceux-ci de plus en plus inefficaces. Les bactéries s'habituent aux antibiotiques et trouvent des moyens de leur résister. La raison? Les bactéries évoluent beaucoup plus vite que l'homme car elles se reproduisent de manière exponentielle.

« C'est une course contre la montre. On est constamment en train d'essayer de rattraper l'évolution des bactéries », explique à l'AFP Marc Lemonnier, PDG d'Antabio, une société de biotechnologies française.

L'Organisation mondiale de la santé a répété à plusieurs reprises que si rien n'est fait, le monde file vers une « ère post-antibiotique, dans laquelle les infections courantes pourront recommencer à tuer ».

La résistance aux antibiotiques, appelée antibiorésistance, tue 50 000 patients chaque année aux États-Unis et en Europe. En 2050, ce nombre pourrait être de 10 millions à l'échelle planétaire, selon des experts mandatés par le gouvernement britannique.

La situation est d'autant plus inquiétante que les ventes d'antibiotiques utilisés pour les animaux d'élevage ont augmenté de 23 % depuis six ans aux États-Unis, selon l'agence américaine responsable des produits alimentaires et médicamenteux, la Food and Drug Administration (FDA).

Comment en est-on arrivé là?

De par leur prix peu élevé et leur volume de distribution important, les antibiotiques sont devenus des biens de consommation courante. Les grands laboratoires pharmaceutiques ont donc tranquillement délaissé la recherche dans ce domaine pour se concentrer sur des médicaments au profit plus élevé, tels que ceux utilisés pour le diabète ou le cancer.

Résultat : il n'y a pas eu de nouvelle classe d'antibiotique depuis environ 30 ans.

Difficile de faire des recherches

Le manque de financement empêche de mener de larges études sur un grand nombre de participants, tel que requis par la plupart des gouvernements afin d'approuver un nouveau médicament.

« Le modèle de développement des antibiotiques n'est pas adapté à des petites populations de patients », explique à l'AFP Laurent Fraisse, responsable de la recherche-développement sur les maladies infectieuses chez le groupe français Sanofi.

La réglementation européenne freine le développement de nouveaux antibiotiques innovants, selon M. Fraisse. « On ne fait pas une étude clinique de la même manière avec 5000 patients qu'avec 50 000 », précise-t-il.

« On brûle beaucoup d'argent pour faire des recherches extrêmement coûteuses et on est loin du marché, ce qui rend l'équation très compliquée. »

— Marc Lemonnier, PDG d'Antabio

Pour leur part, les experts mandatés par le gouvernement britannique sur la question ont suggéré la création d'un fonds qui rémunérerait les laboratoires offrant de faibles volumes d'antibiotiques. Ce montant forfaitaire leur serait attribué dès l'arrivée sur le marché de médicaments destinés à l'antibiorésistance.

Les États-Unis emboîtent le pas

Depuis quelques années, les États-Unis ont commencé à faire face au problème en instaurant une procédure d'autorisation accélérée pour les nouveaux antibiotiques. Ils ont aussi prolongé de cinq ans leur exclusivité commerciale. L'arrivée des médicaments génériques étant retardée, cela assure plus de profits aux compagnies pharmaceutiques.

Dans la foulée, un plan national de 1,2 milliard de dollars a été mis en place cette année aux États-Unis afin de lutter contre l'antibiorésistance. La moitié de ce fonds sera versée à la recherche financée à la fois par les secteurs public et privé.

Ces initiatives ont eu « un effet boule de neige » sur l'investissement privé, selon Florence Séjourné, PDG de Da Volterra, une autre société de biotechnologies française. Par exemple, en 2014, le géant pharmaceutique américain Merck a racheté Cubist Pharmaceuticals, spécialiste de l'antibiorésistance, pour 9,5 milliards de dollars américains.

Manque de financement en Europe

« Il faut aussi que l'Union européenne s'aligne sur les États-Unis », souligne Mme Séjourné. Une quarantaine de sociétés de biotechnologies européennes, regroupées au sein d'une alliance, souhaitent avoir un fonds européen pour les PME oeuvrant dans l'antibiorésistance. Elles estiment qu'une aide de 5 à 10 millions d'euros par projet serait nécessaire. Or, l'Union européenne n'a pas répondu à leur appel.

« Aucun nouveau fonds spécifique [pour les petites et moyennes entreprises] n'est envisagé actuellement », selon un porte-parole de la Commission européenne. Il a rappelé que l'Union européenne a investi « près d'un milliard d'euros » dans des projets sur l'antibiorésistance depuis 1999 et que cet axe de recherche demeure une priorité.

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