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Le Show du Refuge: l'indispensable tradition (ENTREVUE)

Le Show du Refuge: l'indispensable tradition (ENTREVUE)
Hollywood PQ

Le Show du Refuge en sera déjà, ce soir, à sa 25e édition. L’indispensable tradition, une des sources de financement importantes du Refuge des Jeunes de Montréal, est non seulement primordiale à la cause qu’elle sert, mais fait aussi office de party annuel pour plusieurs artistes, qui s’y éclatent dans un cadre un peu différent de ce qu’ils connaissent habituellement. Bilan d’un événement qui a su traverser les années et qui s’avère toujours autant nécessaire.

L’existence du Show du Refuge depuis un quart de siècle est une très bonne nouvelle aux yeux de Dan Bigras, son porte-parole, animateur, instigateur et directeur artistique. On aimerait certes ne plus avoir besoin de ce rendez-vous, et que tous, jeunes et moins jeunes, aient un toit sur la tête et de la nourriture pour se remplir la panse, mais l’utopie n’a pas encore été atteinte. Donc, chaque coup de pouce pour enrayer la pauvreté compte.

«On veut bien s’occuper de la misère, mais il faudrait arrêter d’en fabriquer, lance Dan Bigras, de son légendaire franc-parler. Notre société est responsable de croire les mensonges de gens qui coupent dans nos services, dans l’éducation et dans les classes spécialisées. En coupant dans ces affaires-là, on fabrique de la misère. C’est intolérable. Il faut se fâcher pour ça.»

«Mais, même dans une société où on aurait réussi à avoir un système de santé et d’éducation extraordinaires, où nos taxes iraient aux bons endroits, où on serait tous contents, la misère humaine échapperait quand même à l’humain. Dans certaines familles, trois des quatre enfants vont super bien, et un autre meurt de misère, et on ne sait pas pourquoi. Ce n’est pas toujours explicable, il n’y a pas toujours d’histoires à faire avec des parents monstrueux ou démunis. Il y en a, mais ce n’est pas juste ça. Alors, dans ce temps-là, il faut soigner. Il y aura toujours des gens malades, et il y aura toujours des gens qui vont en arracher. La misère humaine fait partie de la condition humaine.»

«Ceci dit, des années plus tard, je croise souvent des hommes qui sont passés au Refuge, qui vont bien, et qui me présentent leurs enfants… C’est la plus grande récompense de toute ma crisse de vie», précise Dan, en refoulant son émotion et en mentionnant au passage que de telles rencontres se produisent au moins deux fois par semaine.

«Moi, ce n’est pas ma job de craquer. Alors, de l’extérieur, ça ne paraît pas, mais en dedans, ça craque de partout. Mais c’est du beau «craquage»! Moi, on ne me voit pas brailler quand il y a de la misère, on me voit brailler quand c’est trop beau.»

Peut-être quelques larmes se verseront-elles plus tard aujourd’hui, sur la scène de la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, alors que Laurence Jalbert, Éric Lapointe (qui est là chaque année), Catherine Major, Patrice Michaud, Ginette Reno, Élizabeth Blouin-Brathwaite, Gaya, Lulu Hughes et le groupe Qw4rtz seront réunis pour une grande fête, où on célébrera la résilience des jeunes survivants du Refuge, qui doivent parfois faire plusieurs tentatives pour s’extirper définitivement de la rue.

«25 ans de Show du Refuge, on ne fête pas ça avec des singes, des fanfares et des ballounes», soutient Dan Bigras, qui promet toutefois un concert à la fois rock et émotif, où on déterrera sûrement quelques archives.

Le Refuge, qu’est-ce que c’est?

Le Refuge des Jeunes de Montréal, établi au 1836, rue Sainte-Catherine est, près de la station de métro Papineau, a besoin de 1 650 000$ par année pour répondre aux besoins d’hébergement d’urgence de ses occupants.

Une équipe composée d’un conseil d’administration de 10 personnes, de 27 employés et d’une centaine de bénévoles s’affaire à répondre aux besoins de la clientèle, qui provient de Montréal, du Québec, du Canada et d’autres pays.

Plus de 20% des jeunes hommes qui franchissent les portes de l’endroit sont unilingues anglophones, et un jeune sur quatre est issu d’une communauté ethnoculturelle. La moitié d’entre eux sont sous-scolarisés, pauvres ou aux prises avec des dépendances et/ou des problèmes de santé physique et mentale. Un jeune sur deux a connu un ou plusieurs séjours en centre jeunesse ou en famille d’accueil.

Les lieux comptent un dortoir de 45 lits, et divers services y sont dispensés : on offre une sécurité alimentaire (des repas et des sacs d’épicerie), on répond aux besoins de base (vêtements, produits d’hygiène), on fournit des accessoires de sécurité et de prévention (seringues, eau stérile, condoms, etc), on propose des consultations médicales, on accompagne les jeunes dans des démarches pour obtenir carte d’assurance sociale, d’assurance maladie et chèque d’aide sociale, en plus de s’assurer qu’ils ont accès à mille et une commodités (billets d’autobus, entreposage des effets personnels, accès au téléphone et au courrier, internet, salle de lavage, etc.)

En 1999, le Refuge des Jeunes mettait sur pied des unités de logements sociaux avec soutien communautaire dans le quartier Hochelaga, une étape de transition vers l’autonomie complète. Le Refuge, lui, est un repaire qui se concentre à combler les besoins urgents des pensionnaires.

«Ils peuvent vivre ici le temps qu’ils veulent, expose Dan Bigras. Certains vont passer une nuit et on ne les reverra jamais. D’autres passent une semaine, deux mois, deux ans. Ces jeunes se posent tous la même question : «Pourquoi personne ne m’aime?» Dans leur tête, la réponse est évidente : «Parce que je ne suis pas aimable». Donc, on leur donne de l’attention, un regard et une oreille, pour leur signifier qu’ils sont intéressants et importants. C’est le premier lien qu’on crée, qui fait une différence entre la vie et la mort.»

Le Refuge des Jeunes doit assumer lui-même 60% de son budget. Une campagne de financement annuelle représente 25% de ses revenus, le Show du Refuge contribue environ à 25%, et le reste est couvert par le Ministère de la Santé et des Services sociaux (30%), la Ville de Montréal (2%), Service Canada (6%) et par des fondations (14%). Monsieur et Madame tout le monde peuvent en tout temps faire des dons (www.refugedesjeunes.org) ; une offrande de 50$ permet d’héberger et de nourrir un jeune pour une nuit. Le Refuge sert 23 000 repas par année, et 80 jeunes y reçoivent de l’aide alimentaire chaque mois.

On peut se procurer des billets de dernière minute pour le Show du Refuge, ce mercredi, 2 décembre à 20h, à la Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, à la billetterie de la Place des Arts (placedesarts.com). Le spectacle sera présenté à Radio-Canada le dimanche 3 janvier, à 20h.

Quelques statistiques sur le Show du Refuge

- Le tout premier spectacle-bénéfice venant en aide au Refuge des Jeunes avait eu lieu au Club Soda, le 26 novembre 1991, sous le nom Des pas dans la ville. Le Refuge était alors menacé de fermeture. Un an plus tard, le rassemblement adoptait le titre qui allait lui rester, le Show du Refuge.

- 145 artistes (chanteurs, humoristes, groupes) ont participé bénévolement à l’une ou l’autre des éditions du Show du Refuge.

- Présenté tour à tour au Club Soda (1991), au Spectrum (1992-1999), au Métropolis (2000-2004), au Théâtre St-Denis (2008-2010) et à la Place des Arts (2005-2007 et 2011-2015), le Show du Refuge a accueilli 31 741 spectateurs.

- En 1991, le Show du Refuge se déployait devant 218 spectateurs. En 2014, 2149 personnes y assistaient. L’année la plus achalandée a été 2007, avec un public de 2596 curieux.

- Le Show du Refuge est télédiffusé à Radio-Canada depuis 1993, à la suggestion du producteur Guy Latraverse, qui avait eu l’idée de le présenter dans le cadre des Beaux Dimanches, ce qui a considérablement accru la visibilité de l’événement. Guy Latraverse en est d’ailleurs toujours l’un des producteurs.

- La mouture télévisée du Show du Refuge a été finaliste au Gala des Prix Gémeaux et au Gala de l’ADISQ à huit reprises. Elle a remporté trois Félix et un Gémeaux.

- Les profits recueillis grâce au Show du Refuge sont en constante croissance d’année en année. En 24 ans, on a ainsi amassé 4 633 649$. On espère franchir le cap des 5 millions cette année.

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