Un arrêt à Québec pour «Tu te souviendras de moi»

L’œuvre de François Archambault, qui a marqué la saison 2014-2015 de la Licorne, débarque deux semaines dans la capitale.

Après plusieurs supplémentaires, dont une nouvelle série cet automne, Tu te souviendras de moi part en tournée québécoise. En tout, une cinquantaine d’arrêts sont prévus jusqu’en mars 2016, dont un à la Bordée.

Au cœur de la plus récente pièce de François Archambault se trouve Édouard, un professeur d’histoire dont la mémoire commence à flancher. Si la maladie d’Alzheimer n’est jamais nommée, son emprise est réelle sur le vieil homme. L’expert qu’on invitait sur toutes les tribunes se doit se retirer de ses fonctions avant d’être confié à sa fille. Trop occupée, cette dernière le délaisse au profit de Bérénice, la fille de son conjoint. Avec elle, Édouard replonge dans son histoire et dans celle du Québec.

Peur de disparaître

« C’est un personnage qui se sent disparaître, qui sent le monde s’effacer autour de lui et il refuse ça », fait savoir François Archambault. En perdant peu à peu ses capacités, l’historien craint de ne plus pouvoir laisser sa trace. En « héro tragique », il tente donc de s’accrocher par la parole, « parce que c’est sa façon de continuer à exister », poursuit le dramaturge.

Un rôle taillé sur mesure pour Guy Nadon, figure marquante du théâtre québécois. « C’est un personnage qui est assez proche de lui […] C’est un personnage historien qui revisite un moment de l’histoire du Québec et lui, ça l’a vraiment replongé dans cette époque qu’il a vécue », relève François Archambault.

Bien qu’il ne vive pas le même trouble qu’Édouard, l’acteur d’expérience partage ses inquiétudes, laisse entendre Denis Bernard, directeur artistique et général de La Manufacture, compagnie qui a produit la pièce. « Il se la pose la question de la trace qu’il va laisser, en tant que grand acteur, parce qu’on l’a rendu icône quelque part. Il faut qu’il vive avec [son statut d’icône] et il doit le prendre très personnel ».

Amnésie collective

Tu te souviendras de moi n’évoque pas seulement les trous de mémoire de l’historien. Finaliste des Prix littéraires du Gouverneur général l’an dernier, la pièce évoque la perte d’intérêt à l’égard du passé, surtout chez les jeunes. Une situation qui serait proportionnelle à leur passion pour les réseaux sociaux et le tout-numérique.

Denis Bernard se dit révolté de voir le peu d’histoire nationale enseigné à l’école. Il trouve « inadmissible » que sa fille de 18 ans ait vu les évènements d’octobre 1970 en 15 minutes dans ses cours. Peu importe le moment historique, « ce n’est pas une question politique, mais cette mémoire, on ne la cultive même plus. […] On est amnésiques », déplore-t-il.

Tu te souviendras de moi sera présentée au Théâtre de la Bordée du 24 novembre au 5 décembre 2015. La tournée québécoise se poursuivra jusqu’en mars 2016 et s’arrêtera dans une trentaine de salles. Le détail ici.