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Réduire les gaz à effet de serre de 37,5 % au Québec, c'est réaliste, insiste Guilbeault

Réduire les gaz à effet de serre de 37,5 % au Québec, c'est réaliste, insiste Guilbeault

Steven Guilbeault pense qu'il est tout à fait réaliste pour le Québec de réduire de 37,5 % ses émissions de gaz à effet de serre (GES) sous les seuils de 1990, et ce, d'ici 15 ans.

Un texte d'Anne Marie Lecomte

Figure de proue d'Équiterre, M. Guilbeault est aussi coprésident, avec Hélène Lauzon du Conseil patronal de l'environnement du Québec, du Comité-conseil sur les changements climatiques, qui a accouché de cette proposition endossée jeudi, en conférence de presse, par le ministre de l'Environnement David Heurtel.

Connu comme un défenseur inlassable de l'environnement, Steven Guilbeault n'estime pas contradictoire de jouer aussi, comme avec ce comité, un rôle de conseiller du gouvernement.

Il ne se voit pas en pourfendeur de quoi que ce soit et Équiterre, souligne-t-il, n'est ni bleu, ni, rouge, ni orange. « On est pas verts politiquement, on est verts autrement », dit-il, rappelant qu'il a conseillé par le passé les gouvernements de Bernard Landry, de Jean Charest et de Pauline Marois.

« Des collègues de partout au Canada nous envient cette capacité de dialoguer que nous avons au Québec et ils sont épatés que des gens aussi différents soient parvenus à s'entendre sur une cible de -37,5 % », explique-t-il. De fait, au sein du Comité-conseil sur les changements climatiques figuraient, à titre bénévole, des représentants de Gaz Métro, de Cascade, des HEC, de la Fondation David Suzuki...

« C'est pas de la petite bière », de dire Steven Guilbeault.

Une commission parlementaire à venir prochainement

La cible de 37,5 % n'est pas coulée dans le béton, puisqu'en vertu de la loi elle doit être soumise à l'exercice de la commission parlementaire. Quand il se présentera devant ladite commission, à titre de cofondateur et de directeur d'Équiterre, M. Guilbeault entend d'ailleurs recommander un objectif plus ambitieux encore. Pourquoi?

« Si on va plus vite dans la réduction des gaz à effet de serre, on réduira notre dépendance au pétrole, notre déficit commercial, et la pollution atmosphérique qui entraîne des coûts très importants pour la santé », déclare-t-il.

Par contre, poursuit-il du même souffle, « la classe politique canadienne et québécoise doit comprendre qu'il faut faire des choix ».

Le premier ministre Philippe Couillard a affirmé jeudi, en ce sens, « qu'il faut voir ça comme une occasion de faire un développement économique encore plus vigoureux et encore plus porteur à long terme ».

« Il faut se souvenir également que les changements climatiques non combattus comportent des coûts importants. Pensez aux événements climatiques extrêmes, à l'érosion des berges et aux impacts sur la santé par exemple. »

— Philippe Couillard, premier ministre du Québec

« Le Québec est sur la bonne voie » - Steven Guilbeault

« Le Québec fait vraiment partie de ce groupe d'États qui sont dans le peloton de tête à l'échelle internationale, mais ça veut pas dire qu'on ne peut pas faire mieux. »

— Steven Guilbeault, coprésident du comité-conseil sur les changements climatiques et cofondateur et directeur d'Équiterre

Sur la question du pipeline Énergie Est, par exemple, il rappelle qu'il y a un an, le gouvernement québécois disait avoir un préjugé favorable alors que maintenant, « même le premier ministre reconnaît qu'il n'y a plus grand-chose pour nous dans ce projet-là ».

Il cite aussi le maire de Laval, Marc Demers, qui a dit non au projet de pipeline Énergie Est et entend fédérer d'autres municipalités pour contrer cette entreprise controversée.

Il n'y a pas que la classe politique qui devra faire « des choix ». Les Québécois aussi. Mais Steven Guilbeault se refuse à parler de « sacrifices ». Les Scandinaves, dit-il, ne sont pas à moitié moins heureux parce qu'ils polluent à moitié moins », ironise-t-il.

N'empêche, il faut des changements pour ne pas se heurter à ce que le ministre de l'Environnement du Québec, David Heurtel, qualifie de véritable « mur », soit l'année 2050, pour laquelle le Québec et d'autres États se sont engagés à réduire leurs émissions de 80 % à 95 %, en vertu du Protocole d'accord sur le leadership mondial.

« Je ne pense pas qu'on va mettre une police du climat dans les rues. Mais devra-t-on adopter, par exemple, un meilleur code du bâtiment et des règles plus strictes en matière de pollution des véhicules ? Oui. »

— Steven Guilbault, co-président du comité-conseil sur les changements climatiques et co-fondateur et directeur d'Équiterre

On ne part pas de zéro

En ce qui a trait au transport, les Québécois devront utiliser moins leur auto, souligne Steven Guilbeault. Ou s'en acheter une électrique, un virage qui est déjà amorcé puisque 50 % des voitures électriques vendues au pays le sont au Québec. Ce n'est pas banal, considérant que les transports représentent 44 % des gaz à effet de serre dans la province.

« En Norvège, qui n'est pas exactement une destination soleil, une voiture sur huit vendue est une voiture électrique. Déjà, si on rattrapait la Norvège, on serait sur la bonne voie. »

— Steven Guilbeault

Du 30 novembre au 11 décembre, le Québec participera à la Conférence de Paris sur le climat où s'assembleront 46 000 délégués provenant de 196 États.

Pour le ministre de l'Environnement du Québec, David Heurtel, le Québec « s'inscrit dans un courant mondial » avec sa cible proposée de 37,5 % de réduction des GES, source du réchauffement de la planète.

La Californie et l'Union européenne se sont fixé une cible de 40 %. L'Allemagne? 55 %. Le Canada, lui, s'en tient à une cible de 14 %. Mais en conférence de presse jeudi, le ministre Heurtel n'a pas épilogué sur l'objectif canadien, se contenant de dire qu'il s'agit « d'une question globale » et que les GES « ne connaissent pas de frontières ».

Des changements cataclysmiques

« La communauté scientifique mondiale est quasiment unanime [...] Si nous permettons un réchauffement climatique d'au-delà de 2 degrés d'ici 2050, on parle de changements cataclysmiques pour toute la planète. Toutes nos façons d'exister seront remises en question. Et ça a déjà commencé : on ressent les effets au Québec et partout dans le monde. »

— David Heurtel, ministre de l'Environnement du Québec

Le ministre Heurtel rappelle qu'au cours de la dernière décennie, plus de 1,25 milliard de dollars ont été investis pour financer des mesures de lutte contre les changements climatiques, qui ont permis de réduire l'empreinte carbone du Québec. De plus, il entend dépenser pas moins de 3,3 milliards de dollars pour décarboniser le Québec, diminuer la pollution atmosphérique générée par les entreprises, les municipalités et les citoyens.

« Dans le Grand Nord présentement, le carburant qui est utilisé est le mazout ou le diésel. Faut changer ça. La construction : utiliser la géothermie davantage et toutes les nouvelles technologies. Ce sont des exemples concrets que nous regardons [...] Mais on a un mur, là, en 2050. On n'a pas le choix. Il faut absolument y arriver. Alors on se donne un plan de match. »

— David Heurtel, ministre de l'Environnement du Québec

L'opposition officielle met en doute les objectifs du gouvernement

Le porte-parole péquiste en matière d'environnement, Mathieu Traversy, a critiqué l'adhésion des libéraux à la Stratégie canadienne de l'énergie, qui mise notamment sur les sables bitumineux de l'Alberta.

« Quelle crédibilité ont les libéraux en matière d'environnement? À cause d'eux, le Québec n'a pas atteint la cible du Protocole de Kyoto. Nous visions une réduction moyenne de 6 pour cent des émissions entre 2008 et 2012, mais celles-ci n'ont diminué que de 4,2 % », a fait valoir M. Traversy par voie de communiqué.

Greenpeace salue l'initiative, avec un bémol

Greenpeace n'a pas tardé à réagir à l'annonce faite par Québec : Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie, affirme que la cible ambitieuse proposée par le gouvernement Couillard « met en évidence l'énorme fossé qui existe entre le Québec et le gouvernement fédéral » en la matière.

M. Bonin affirme aussi que cette cible reste « en deçà de ce qui est nécessaire pour faire baisser les émissions de GES à zéro d'ici 2050 », un objectif considéré comme essentiel et réaliste pour éviter l'emballement du climat.

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