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Les souverainistes sont bienvenus à la CAQ, même si le parti veut réformer le Canada

Les souverainistes sont bienvenus à la CAQ, même si le parti veut réformer le Canada

QUÉBEC — Les souverainistes sont encore les bienvenus à la Coalition avenir Québec (CAQ), même si le parti s'engage maintenant à renouveler le fédéralisme canadien.

C'est ce que plaide le député caquiste de Deux-Montagnes, Benoit Charette, mandaté par son chef François Legault pour définir la nouvelle position constitutionnelle de la CAQ.

Le parti a toujours voulu rallier autant les fédéralistes que les souverainistes en proposant une trêve de 10 ans sur la question nationale, mais il est maintenant forcé de se jeter dans la mêlée par ses adversaires péquistes et libéraux, qui s'affrontent sur le thème de l'indépendance.

M. Legault a donc annoncé la semaine dernière que la CAQ allait proposer en novembre une position constitutionnelle, pour qu'un éventuel gouvernement caquiste rouvre la Constitution et négocie une entente avec Ottawa.

En entrevue à La Presse Canadienne mardi, M. Charette a déclaré que la CAQ est avant tout une coalition de pragmatiques, autant fédéralistes que souverainistes, et ces derniers seront encore accueillis à bras ouverts. Benoit Charette est lui-même un ancien député souverainiste qui a claqué la porte du Parti québécois en 2011.

«Beaucoup de gens peuvent encore croire au projet souverainiste, mais en même temps réaliser que ce n'est pas pour demain, ou sinon être carrément sceptiques. Ils n'en font pas une priorité. Ces gens-là peuvent se retrouver dans la Coalition et très certainement dans ce qui va être proposé en novembre», a-t-il dit.

Par contre, il a lancé une mise en garde aux indépendantistes qui pourraient être tentés par le beau risque caquiste: ce ne sera pas une stratégie du «couteau sur la gorge» avec Ottawa, ou le tout ou rien. Pas question de promouvoir ou de faire l'indépendance en cas d'échec des négociations.

«Ce n'est pas dans l'optique de faire une ultime tentative et, en cas d'échec, on revient à la menace référendaire. Ce n'est pas dans le but d'accentuer une pression de façon à revenir à l'option souverainiste. On est convaincus qu'on peut parvenir à une nouvelle entente avec le Canada», a-t-il ajouté.

D'ailleurs, le député maintenant responsable du vaste chantier constitutionnel de la CAQ n'a pas caché son «enthousiasme», son «optimisme». Il estime qu'il y a un appétit dans la population, qu'il y a une ouverture au Canada pour des négociations constitutionnelles, et que le Québec pourra faire mieux, malgré 50 ans d'échecs.

«Les échecs passés ne présument pas des résultats à venir, bien au contraire», a-t-il dit.

Il en a révélé un peu plus sur le processus mis en place par le parti pour arriver à une proposition qui sera présentée au Conseil général du 7 et 8 novembre, à Laval, probablement dans une «allocution-phare» du chef.

M. Charette préside un comité composé de «sept-huit» personnes, des experts du domaine, universitaires, politologues, constitutionnalistes, qui s'intéressent à cette question depuis des années, a-t-il précisé. Toutefois, le parti s'est engagé à préserver leur anonymat.

Ils se sont déjà rencontrés une fois avant l'annonce du chef caquiste la semaine dernière, et une autre fois après, et ils communiquent quasi quotidiennement par courriel. Ils se penchent déjà sur un document. Le caucus sera aussi mis à contribution.

Au Conseil général, la nouvelle position sera dévoilée, mais ne sera pas adoptée par l'assemblée. La commission politique fera vraisemblablement une tournée des instances du parti pour consulter les membres, et ce n'est qu'en 2016 qu'ils l'adopteront.

«On veut laisser le temps aux membres de s'approprier la démarche qu'on va proposer, et en temps et lieu ils auront la possibilité de trancher, voire de bonifier l'offre qui sera mise sur la table. (...) Ce sera un document soutenu, une proposition globale, qui sera faite. Reste à savoir comment la mécanique va s'opérer: est-ce que ce sera (voté) par portions ou dans sa globalité? Ce n'est pas arrêté», a-t-il précisé.

M. Charette a refusé de dévoiler les thèmes qui sont explorés actuellement par le comité pour construire la position constitutionnelle. François Legault a évoqué qu'il réclamait au minimum une entente similaire à l'Accord du lac Meech, qui a avorté en 1990.

Le député de Deux-Montagnes a cependant rappelé qu'il privilégiait les ententes administratives avec le fédéral pour apporter des gains rapidement au Québec, sans passer par de longues rondes constitutionnelles, dans des domaines qui touchent son identité: langue, culture, immigration.

Il a toutefois reconnu que tôt ou tard il faudrait en arriver à renégocier le pacte fédératif.

Aucune réponse des partis fédéraux

Par ailleurs, la CAQ peut bien estimer qu'il y a ouverture chez les partis fédéraux actuellement en campagne électorale pour parler constitution, mais aucun d'entre eux n'a répondu aux demandes formelles du parti sur ce front.

François Legault a réclamé la semaine dernière l'attribution au Québec des pleins pouvoirs en matière de langue, d'immigration, et d'évaluation environnementale, de même que la juste part du Québec en transferts fédéraux en santé, la limitation du pouvoir fédéral de dépenser et le rapport d'impôt unique.

Dans son communiqué, le chef disait être «très déçu» des demandes aux partis fédéraux du premier ministre Philippe Couillard, en précisant que «la CAQ, par contre, n’a pas peur de réclamer ce qui lui apparaît essentiel pour assurer la protection de l’identité québécoise, défendre les intérêts du Québec et affirmer clairement la reconnaissance de la nation québécoise».

Or aucune des formations fédérales n'a répondu, a indiqué M. Charette, en ajoutant qu'il n'avait «sollicité aucun écho» de toute façon.

Rappelons que depuis sa fondation, la Coalition avenir Québec avait toujours refusé d'aborder les enjeux de la Constitution ou d'un autre référendum, en invoquant que les Québécois étaient «tannés» d'en parler. Maintenant, M. Legault préfère évoquer plutôt une «nouvelle entente» avec le Canada, qui serait cependant soumise à un référendum.

De même, les élus caquistes refusent de se faire accoler l'étiquette de «fédéralistes», qui est synonyme de statu quo selon eux. Ils disent plutôt être «nationalistes», partisans d'un «Québec fort à l'intérieur du Canada».

Patrice Bergeron, La Presse Canadienne

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