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La mode évangélique gagne de plus en plus d'adeptes au Brésil

La mode modeste fait fureur au Brésil
Crentechic

Avec ses quatre ou cinq sacs de fringues déjà pleins, Isabel vient de rentabiliser son après-midi shopping à São Paulo. Comme une fois par trimestre depuis trois ans déjà, la Brésilienne de 24 ans vient remplir sa garde-robe dans les avenues du Bras, le quartier de la confection de São Paulo. “J’habite et j’étudie à São Carlos, à 250 kilomètres d’ici. Là-bas, je ne trouve que de la mode traditionnelle.”

Derrière son air mutin, Isabel est une évangélique convaincue et pratiquante. “Mes parents sont catholiques. En arrivant à l’université, j’ai découvert l’Église universelle à travers un groupe d’étudiants. Ça a été une véritable révélation et depuis, je participe au culte tous les jours et je suis les préceptes de l’Église.” Parmi les préceptes de ce mouvement extrémiste: le respect d’un code vestimentaire. Couvrir les épaules, ne pas montrer ses genoux, ne pas porter des vêtements trop moulants: “la femme chrétienne ne doit pas s’habiller de manière provocante. Elle ne doit pas chercher à séduire les hommes ni être habillée comme un sapin de Noël”, explique Isabel.

Des vêtements répondant aux critères des églises évangéliques

Dans les rues du Bras, plus d’une quinzaine de marques de mode évangélique se sont installées pour répondre aux attentes d’Isabel et des 55 millions de fidèles évangéliques au Brésil. Parmi les plus célèbres, Marina Silva, candidate à l’élection présidentielle en 2014. Rue Marcolina, la boutique Joyaly tenue par Joyce Flores ne désemplit pas. La styliste de 37 ans est l’une des précurseures sur ce marché. En 1999, quand elle a ouvert, l’enseigne était avant tout fréquentée par des mères au foyer. “Depuis une dizaine d’années, le profil de mes clients a beaucoup changé, constate-t-elle. Je vois beaucoup de jeunes filles arriver. L’explosion du nombre d’évangéliques au Brésil m’a obligée à modifier mes collections.”

La boutique, dont le chiffre d’affaires a augmenté de 150% en 10 ans, ne propose que des vêtements répondant aux critères des églises évangéliques. Certaines pièces sont même ornées d’un verset de la Bible. Un détail qui plaît à Maria, la meilleure amie d’Isabel venue, elle aussi, faire des achats. “Notre corps est le temple de Dieu, nous devons le protéger.” Une opinion partagée par son petit ami qui l’accompagne ce jour-là pour “valider” les tenues choisies. Maria confie d’ailleurs croire que “la mode traditionnelle détruit les couples. Les femmes sont beaucoup trop sexy… En été ou en hiver, elles sont à moitié nues. Le feu qui brûle en elles suffit à les réchauffer”.

Un retour en arrière pour les femmes

Professeur spécialiste des religions à l’université du Parana, Rodolfo Alves Pena voit dans ce discours intégriste une régression de la société brésilienne. “La mode doit être considérée comme un véritable langage. C’est un phénomène social qui influence de manière considérable les relations entre individus. Avec la transition séculaire au début du XXe siècle, les Brésiliennes se sont progressivement libérées des codes vestimentaires hérités du patriarcat, abandonnant les vêtements dissimulant leur corps pour mettre en avant leur féminité. Mais, depuis les années 90, avec l’expansion des évangéliques, on observe un retour en arrière. Les femmes sont de nouveau encadrées par des règles qui vont à l’encontre de leur liberté individuelle.”

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