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Vie extraterrestre: pourquoi les scientifiques n'ont (encore) rien trouvé, ou le paradoxe de Fermi

Mais où diable se cachent les extraterrestres?
ESO

Sommes-nous seuls? Y'a-t-il une vie extraterrestre? Difficile de répondre à cette question, mais ce n'est pas une raison pour l'ignorer. Lundi, un milliardaire russe, supporté par Stephen Hawking, a lancé un programme à 100 millions de dollars pour détecter des signaux provenant d'une civilisation extraterrestre.

Hasard du calendrier, la NASA a annoncé jeudi la découverte d'une nouvelle exoplanète "habitable", la plus proche de la terre jamais observée, sur laquelle la vie aurait pu se développer.

Pourquoi cette question nous obsède tant? Il y a bien sûr la quête de connaissances. Mais c'est surtout qu'elle nous interpelle. Pourquoi serions-nous uniques dans l'énormité de l'univers, ou même plus simplement de notre galaxie?

100 milliards d'étoiles, et moi et moi et moi...

Depuis le lancement du télescope spatial Kepler, en 2009, plus de 4500 planètes potentielles, en dehors de notre système solaire, ont été détectées et plus de 1000 confirmées. C'est peu, mais c'est déjà énorme, car nous observons le ciel de la bonne manière que depuis très, très peu de temps. De plus, nous ne voyons qu'un millième de la galaxie. A l'échelle de la terre entière, c'est comme-ci nous ne pouvions observer que l'Espagne.

Et si on extrapole, on se rend compte de l'immensité qui nous entoure. Rien que dans notre galaxie, les chiffres donnent le tournis. Les estimations tablent sur au moins 100 milliards d'étoiles. Même avec l'estimation la plus basse, "on peut imaginer la présence de quelques milliards à dizaines de milliards de planètes dans la galaxie, donc des millions d'habitables, c'est-à-dire pouvant abriter de l'eau", explique Jean Schneider, astrophysicien au CNRS interrogé par Le HuffPost.

"Mais il faut être très prudent sur les ordres de grandeur, les nombres ne sont pas précis", tempère-t-il. Ou optimiste, d'ailleurs. Gabriel Chardin, lui aussi physicien au CNRS, estime qu'on peut même parier sur "au moins une planète par étoile et donc des millions, voire des milliards habitables". Et même si le chercheur rappelle qu'il y aurait de nombreux paramètres à prendre en compte pour qu'une vie intelligente se développe (axe de rotation, vitesse, etc), les possibilités restent énormes.

Sauf que... Sauf que pour l'instant, nous sommes seuls. Ce qui est, au vu des chiffres ci-dessus, très étrange. Car la galaxie est très vieille. Rien que l'étoile autour de laquelle tourne Kepler-452b, la dernière planète "habitable" découverte, est 1,5 milliard d'années plus vieille que le soleil. De quoi laisser le temps à une espèce intelligente de se développer pendant des millions d'années jusqu'à conquérir la galaxie, non? Même si on imagine un voyage à seulement 10% de la vitesse de la lumière (ce qui est déjà bien au-delà de tout ce qui est possible actuellement), tout est possible en plusieurs millions d'années.

Un paradoxe, des hypothèses

Cette question, de nombreux scientifiques se la sont posés. Notamment l'un d'eux, Enrico Fermi, l'un des créateurs de la bombe atomique, excusez du peu. Lors d'un déjeuner dans les années 50 avec des collègues physicien, la question de la vie extraterrestre arrive sur la table. Le chercheur fait alors remarquer ceci: vu l'immensité et l'âge de l'univers, si une civilisation extraterrestre existait, elle aurait certainement eu le temps de s'étendre sur des milliers de mondes et de nous rendre visite. Alors, où sont-ils?

C'est le "paradoxe de Fermi". Depuis des milliers de personnes ont essayé de trouver une réponse à ce problème. En 1961, Franck Drake, un astronome américain, met carrément en place une équation afin de calculer le nombre de civilisations extraterrestres dans notre galaxie.

Le problème, c'est que cette équation a de nombreuses inconnues. "Mais on commence à connaître plusieurs des termes: le nombre d'étoiles de planètes, le type de planètes", précise Gabriel Chardin.

En attendant de résoudre "l'équation de Drake", les théories pour expliquer le paradoxe de Fermi pullulent. Certaines peu sérieuses (le fameux complot dénoncé par Fox Mulder), d'autres partant de véritables bases scientifiques.

"Les extraterrestres existent, ce sont les Hongrois"

La première objection, pourtant proposée par un physicien, n'était pas très sérieuse. L'auteur n'est autre que Leo Szilard, un des participants du déjeuner avec Fermi. "Ils sont parmi nous, mais ils préfèrent s'appeler les Hongrois", aurait-il répondu du tac au tac. Ne criez pas au racisme: Szilard était né d'origine hongroise.

Des théories, il en existe tellement qu'un physicien, Stephen Webb, a publié un ouvrage évoquant 75 solutions au paradoxe de Fermi, regroupées dans 3 catégories: ils sont là (mais nous ne le savons pas), ils existent mais n'ont pas communiqué avec nous ou encore ils n'existent pas.

Derrière ces catégories, des dizaines de possibilités: ils nous observent comme nous observerions des animaux sans les déranger. Ils existent, mais sont tellement loin qu'ils n'ont pas encore colonisé l'espace jusqu'à nous. Ils existent, mais vivent une vie virtuelle dans une sorte de Matrix. Ou vivent simplement en respectant leur planète. Nous ne les cherchons pas de la bonne manière...

L'auteur, lui, estime qu'ils n'existent pas, car nous serions les premiers. En utilisant une version modifiée de l'équation de Drake, Stephen Webb parie sur la difficulté pour une vie intelligente et capable de prouesses techniques de se développer. Surtout, l'auteur se disant optimiste sur l'avenir, ne veut pas croire aux scénarios les plus pessimistes.

Patience et autodestruction

Comme celui soutenu par Gabriel Chardin. Le physicien estime que la croissance exponentielle du progrès rend toute civilisation instable. "Nous produisons de l'énergie de manière exponentielle et à un coût de plus en plus faible. S'il y a trop d'énergie disponible, il y a un risque de destruction".

"Ainsi, sans une stratégie extrêmement précise et rigoureuse, il est infiniment probable que, telles des fourmis vivant sur un tas de salpêtre, nous grillions le jour où nous découvrons les allumettes, bien avant d’être parvenus à développer le voyage interstellaire."

Selon cette théorie, des extraterrestres auraient pu croître dans notre galaxie, mais n'auraient jamais réussi à s'étendre au-delà de leur planète d'origine, ou très peu, s'autodétruisant avant.

Le célèbre vulgarisateur américain Bill Nye a lui une autre explication: nous sommes trop impatients. Dans une vidéo, l'animateur fait lui le pari qu'il suffit d'attendre et que nous n'observons pas le ciel depuis assez longtemps.

"Comme on ne sait rien, il faut continuer à explorer", concède Jean Schneider, même s'il ne croit pas trop à l'initiative de Stephen Hawking d'écouter les signaux électromagnétiques, dans la droite lignée du programme Seti, fondé en 1960 par... Franck Drake, l'auteur de la fameuse équation.

"Je ne parierais pas dessus, mais il faut essayer". Pour lui, une voie plus sure consiste "à observer les planètes et vérifier leurs activités biologiques". En arrivant à cartographier les planètes, il nous serait possible de repérer des structures non-naturelles: agriculture, bâtiments, etc. Mais ces planètes sont tellement loin de nous qu'une telle prouesse ne sera pas possible avant "beaucoup de temps".

Alors patience, et en attendant, vous pouvez vous aussi élaborer votre théorie.

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