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Modifications à la loi sur le lobbyisme: les OBNL sont-ils des lobbyistes?

Les OBNL sont-ils des lobbyistes?
Toma Iczkovits

QUÉBEC - Le gouvernement Couillard étudie la possibilité de soumettre les organismes à but non lucratif (OBNL) à la loi sur le lobbyisme. Les groupes communautaires, eux, y voient une tentative de limiter leur champ d'action.

Tout comme le Commissaire au lobbyisme, l'Association québécoise des lobbyistes souhaite que le gouvernement Couillard oblige les organismes communautaires à s'inscrire au Registre des lobbyistes avant de contacter un élu pour tenter d'obtenir une modification législative. «La transparence, c'est bon pour tout le monde, dit son président, Mathieu Santerre. Il n'y a pas de différence de nature entre du lobbying fait par une entreprise, un ordre professionnel ou un OBNL. [...] La nature du geste est la même.» Son organisme affirme représenter une quarantaine de membres, mais la liste de ceux-ci n'est pas publique.

Lors de l'étude des crédits, la semaine dernière, le ministre Jean-Marc Fournier a affirmé que les OBNL pourraient être inclus dans la révision de la loi sur le lobbyisme qu'il déposera avant l'été. Le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques a toutefois laissé la porte ouverte à certaines exceptions.

Dans un rapport de 2012 dont s'inspire le gouvernement, le Commissaire au lobbyisme propose également qu'un «appel au grand public» à influencer les élus soit considéré comme une activité de lobbyisme. Contacter un élu pour obtenir une subvention de plus de 5 000 $ tomberait également sous le coup de la loi. Le Commissaire au lobbyisme a refusé d'être interviewé pour cet article.

Les OBNL font valoir que l'inscription au Registre des lobbyistes est fastidieuse. De plus, tout contrevenant est passible d'une amende allant de 500$ à 25 000$. «De petits OBNL vont devoir embaucher un conseiller juridique pour s'assurer d'être en règle», plaide Bruno Massé, coordonnateur général du Réseau québécois des groupes écologistes.

«C'est une tentative de restreindre l'accès des voix dissidentes à l'espace public et aux élus», ajoute-t-il. Bruno Massé dresse un parallèle avec le gouvernement conservateur qui a resserré les conditions pour obtenir un numéro de charité, en plus de multiplier les audits pour les organismes communautaires.

Le directeur de Greenpeace Québec y voit également une manoeuvre inspirée du gouvernement Harper. «Il y a une inquiétude au niveau gouvernemental, présentement, de voir que la population se mobilise», dit Nicolas Mainville.

«Si les groupes qui représentent les citoyens sont soumis à ce Registre des lobbyistes, on change fondamentalement leur mission, ajoute-t-il. On leur impose une limite, en disant qu'il ne faut pas faire trop de pressions sur les ministres. On doit avoir la pleine liberté d'interpeller nos ministres à quelconque moment.»

Les deux militants écologistes soulignent qu'ils travaillent pour le bien de la collectivité, et non pas pour des intérêts privés. Le représentant des lobbyistes rejette cet argument «moral». «L'entité qui est neutre dans le débat public, c'est l'État lui-même, dit Mathieu Santerre. Je n'achète pas l'argument selon lequel tout OBNL est l'incarnation du bien commun.»

Pour sa part, la leader du PQ, Agnès Maltais, rappelle que les élus avaient volontairement exclu les OBNL lors de l'adoption de la loi en 2002. «Pour ne pas surcharger indûment tous les OBNL, on était prêt à en laisser de côté quelques-uns qui étaient plus centrés vers le profit», explique-t-elle. Les organismes liés au patronat ou aux syndicats sont toutefois soumis à la loi.

Pour la leader péquiste, inclure les quelque 60 000 organismes communautaires du Québec dans la loi sur le lobbyisme risque de diluer l'intérêt du registre.«Quand il y a trop d'informations, parfois, on n'arrive pas à discriminer la bonne information», dit-elle.

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