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«Marche à l'ombre» à Super Écran: marcher vers la lumière (ENTREVUES/PHOTOS)

«Marche à l'ombre» à Super Écran: marcher vers la lumière
Courtoisie Super Écran

À la maison de transition Le Phoenix, quatre criminologues dans la vingtaine décident du sort de détenus de tous les âges et de tous les milieux qui, tout juste sortis de prison, tentent de réintégrer la société, de se trouver emploi et appartement, de marcher vers la lumière. Et ces mêmes criminologues qui prennent soin d’eux tentent, eux aussi, de s’approcher de la lumière, pour contrebalancer la dureté de leur profession. Mais ils ont beaucoup à encaisser à un jeune âge…

«Marche à l'ombre» à Super Écran

Le centre Le Phoenix n’existe pas réellement. On l’a créé de toutes pièces dans un presbytère désaffecté de Lachine, dans le sud-ouest de Montréal, pour les besoins de la série Marche à l’ombre, qu’on découvrira à Super Écran en octobre prochain. Rare fiction télévisée du scénariste Ian Lauzon (De père en flic, Piché entre ciel et terre, Cabotins, La garde), en collaboration avec Ludovic Huot et Catherine Léger, Marche à l’ombre est une réalisation de Francis Leclerc (Apparences, Les Rescapés, Mon meilleur ami, Les beaux malaises) et s’intéresse minutieusement au quotidien des maisons de transition. À Montréal, une dizaine d’institutions du genre existent, sans même qu’on sache où elles se trouvent.

Les journalistes étaient conviés à se promener entre les murs du Phoenix, jeudi dernier, et à jouer le jeu comme s’ils étaient réellement présents pour visiter un pensionnaire de l’endroit. C’est que les règles de vie sont très sévères en ces lieux : il faut, par exemple, remettre son cellulaire à l’entrée et, partout sur les murs, des avertissements indiquent que l’alcool et la drogue sont interdits, que des tests-surprises peuvent être effectués à tout moment.

Les comédiens qui incarnent les délinquants au lourd passé de passage au Phoenix – Mitaine, un ex-motard (Gildor Roy), Christian, un voleur récidiviste (Étienne de Passillé), Éric, un ex-joueur de soccer d’élite (Maxime-René de Cotret), Martin, un hacker activiste (Jean-Carl Boucher), Honoré, un homme accusé de violence conjugale (Didier Lucien), Alain, un délinquant sexuel âgé (Guy Thauvette) et Alexis, un jeune prostitué mâle (Simon Labelle-Ouimet) - n’enregistraient pas de scènes lorsque les représentants des médias sont allés les rencontrer, mais ils ont pris place dans les chambres qui leur sont assignées le temps du tournage, pour illustrer le contexte de Marche à l’ombre et permettre aux photographes de croquer quelques clichés, pendant que Gilbert Levac (Sylvain Marcel), superviseur du Phoenix, faisait faire le tour de l’établissement aux «invités». Dans la peau du personnage, évidemment. «Le sketch est fini!», s’est d’ailleurs exclamé Gildor Roy, lorsque qu’on lui a signifié que la mise en scène était terminée.

Débat de société

Mais, le noyau dur de Marche à l’ombre, c’est réellement le quatuor de criminologues, aux personnalités et aux méthodes diamétralement opposées. Ce sont ces jeunes gens qu’on suivra de près, au boulot et un peu à la maison. Toutes les intrigues seront liées à eux. Il y a d’abord Rachel Marchand (Laurence Leboeuf), 25 ans, qui revient au Phoenix après une dépression de quatorze mois qui a suivi le suicide d’un patient dont elle était responsable. Son grand cœur l’amènera à poser des gestes éthiquement incorrects pour épauler ses protégés. Audrey Cardin (Catherine Brunet), qui a remplacé Rachel pendant son absence, ne voit pas les choses du même œil. Ex-militaire qui a servi en Afghanistan, elle prône la ligne dure avec les détenus et ne craint pas les frictions avec ses collègues. Tom (Éric Robidoux), l’aîné du groupe, a maille à partir avec son fils adolescent et sa copine mannequin beaucoup plus jeune que lui, mais il sait se faire aimer au centre. Enfin, Tania (Ève Duranceau), grande amie de Rachel, est maternelle, empathique et tente désespérément de tomber enceinte de son amoureux.

«Dans la série, Rachel incarne une idéologie plus à gauche, compassionnelle, et Audrey représente une tendance plus à droite. C’est une ex-militaire, très straight. Ces deux personnages s’affrontent beaucoup, et nous, comme spectateurs, on est bien placés pour dire qui a raison. L’une est plus ouverte, mais c’est risqué ; l’autre est très sévère, mais efficace. On essaie de matérialiser un débat de société réel à travers ces personnages», raconte Ian Lauzon.

Dans les maisons de transition, les relations entre les résidents - ou «clients», c’est ainsi qu’on les désigne – sont très peu encouragées, mis à part dans les échanges de groupe. C’est donc au compte-gouttes, au fil des 10 épisodes de 60 minutes, qu’on apprendra les délits des hommes, ainsi que leur histoire personnelle. Par exemple, on comprendra que Mitaine et Alexis ont entretenu des rapports ambigus lorsqu’ils ont cohabité derrière les barreaux.

«Ce n’est pas la vie des détenus, explique Marc Poulin, qui coproduit Marche à l’ombre avec Josée Desrosiers. C’est la vie des quatre intervenants, qui sont confrontés à leur vie professionnelle et privée, à l’amitié, mais les détenus ont un grand rôle à jouer là-dedans. À cause de leur métier, leur vie est intense et dur. Leur milieu professionnel les différencie des autres.»

«Ce n’est pas Unité 9, enchaîne Francis Leclerc. C’est vraiment autre chose. C’est un milieu d’hommes. Il n’y a pas de femmes, mais seulement des hommes en transition. Et des peanuts de 22, 23 ans, avec peu d’expérience de vie, mais qui ont quand même un bon bagage et une grande intelligence, décident de la vie de ces gars-là. Ça donne des situations riches en émotions et en rebondissements.»

«La réhabilitation sociale, c’est un enjeu important, et émotivement chargé, signale Ian Lauzon. Comme société, on souhaite que ça fonctionne. Sinon, ça sert à quoi la social-démocratie? La spécificité de la réhabilitation sociale, c’est qu’on est toujours dans une tension entre la compassion et la protection du public.»

Approche réaliste

La première ébauche de Marche à l’ombre avait été pensée il y a une douzaine d’années. À l’époque, le coproductrice Josée Desrosiers, elle-même criminologue de formation, et Ian Lauzon songeaient à la biographie d’un criminel reconnu, qui a réellement existé. Mais des contretemps ont entravé leur idée, qui n’a finalement renaît de ses cendres qu’il y a deux ans et demi.

Dès lors, le travail de recherche s’est mis en branle. Josée Desrosiers a apporté de larges pans de sa propre expertise, et Ian Lauzon a consulté les intervenants et la directrice-coordonnatrice d’une maison de transition. Il a assisté à des réunions d’ex-détenus, en plus de fouiller dans les nombreux documents de la «littérature de la réhabilitation sociale», qui existe tant ici qu’en Europe et aux États-Unis.

«C’est très près de la réalité, de la vraie vie», souligne Ian Lauzon, secondé par Francis Leclerc. Ce dernier dit utiliser une «approche documentaire» pour transposer dialogues et situations à l’écran, un peu comme il l’avait fait pour exposer le drame de Claude Legault nouvellement handicapé dans Mon meilleur ami.

Marche à l’ombre, ce n’est pas Unité 9, et ce n’est pas 19-2 non plus. Lorsqu’on lui demande s’il craint que son projet ne souffre de comparaisons avec ces deux titres, qui ont trouvé une forte résonnance auprès du public, Ian Lauzon détaille comment Marche à l’ombre se distingue des autres produits policiers et carcéraux en ondes depuis quelques années.

«Il se fait un cinéma extraordinaire et une télé très forte au Québec. Quand on arrive devant des propositions solides comme Unité 9 ou 19-2, nous, ça nous force à être plus spécifiques, à se concentrer sur un aspect ou un autre. Nous, c’est la réhabilitation sociale, une tension entre des approches différentes, une réflexion sur la société.»

«La question qu’on pose avec Marche à l’ombre, c’est: se réhabiliter, mais à quoi? Les détenus doivent entrer à heure fixe, ne consommer ni drogue, ni alcool, mais en même temps, les jeunes adultes d’aujourd’hui sont dans une recherche de liberté. On vit dans une société de jouissance et d’excès. On interroge la société, on la questionne avec notre série. L’existence de séries comme Unité 9 et 19-2, très fortes, nous a aidés à trouver cette spécificité. Ça ne me stresse pas trop, parce que ce sont des univers très distincts», conclut Ian Lauzon.

Des pourparlers «avancés» sont déjà en cours pour une éventuelle deuxième saison de Marche à l’ombre.

Les personnages vus par leurs interprètes

Rachel (Laurence Leboeuf): «Rachel est sûre d’elle, elle a une belle assurance au travail, elle connaît son métier. C’est une très bonne intervenante. C’est quelqu’un d’une grande intelligence, qui a une belle répartie, qui n’a pas peur de la confrontation. Elle a des idées et des opinions, et elle les fait savoir! (rires) En même temps, on va découvrir que, dans sa vie personnelle, c’est déviant. Elle a des fragilités qu’on va apprendre à connaître. Il se passe quelque chose de flou entre Tom (Éric Robidoux) et elle. Il pourrait naître des sentiments entre eux, mais n’est pas clair. Au début, elle a sa relation avec Mathieu (Jean-Sébastien Courchesne), mais on va vite découvrir que c’est fragile, tout ça…»

Tania (Ève Duranceau): «Avec Tom, Tania est la plus vieille du groupe. Elle fait bien son travail, elle est vraiment à sa place, elle est très empathique. Elle se connaît et elle gère cet aspect-là. Elle est à sa place. Tania a un copain, elle est dans une situation relativement stable quand la série commence. C’est une super bonne amie de Rachel, elles ont fait l’université ensemble. Elles se connaissent très bien. Ce qui sera dévoilé de la personnalité de Rachel ne surprendra pas Tania, et vice-versa. Il y aura de beaux moments d’amitié, de complicité, entre elles pendant la série. Mais ce qu’on remarque, surtout, de Tania, c’est qu’elle est à la bonne place et qu’elle fait bien son travail. Elle aime sincèrement ça.»

Audrey (Catherine Brunet): «Audrey est une ancienne militaire, qui a des points de vue assez arrêtés sur la façon d’exercer son métier. Elle ne croit pas tellement à la réhabilitation! Ça crée de belles discussions au sein du groupe, bien de la confrontation!»

Tom (Éric Robidoux): «Tom est l’un des 10% d’hommes criminologues à la maison de transition. Il est père de famille, il a une très bonne relation avec les boys en dedans, il est assez Joe Cool. Son approche est plus amicale. C’est dans sa vie de famille qu’il est plus strict, plus police, plus arrêté. Un courant passe entre Rachel et lui, surtout du côté de Tom. Il a une blonde de 25 ans, mannequin, très gentille, et tout le monde se connaît et se rencontre, mais il a un petit crush pour Rachel!»

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