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La danseuse étoile Maria Abashova lève le voile sur le ballet Anna Karénina (ENTREVUE)

La danseuse Maria Abashova lève le voile sur le ballet Anna Karénina
Eifman ballet

Roman de Léon Tolstoï publié en 1877. Classique de la littérature étudié à travers le monde. Œuvre maintes fois adaptée au cinéma et à la télé. Anna Karénina est aussi un ballet et presque une vocation pour la danseuse ukrainienne Maria Abashova, qui l’a dansé environ 200 fois avant de s’amener à Montréal avec l’Eifman Ballet de Saint-Pétersbourg.

Basée sur l’histoire écrite par l’écrivain russe il y a plus d’un siècle, l’adaptation de Boris Eifman se concentre sur le triangle amoureux entre Anna, Karénine et Vronsky. « Si on avait raconté tout le roman, le ballet aurait duré 10 heures et il aurait exigé la participation de beaucoup trop de danseurs solistes, alors qu’on est déjà 60 sur scène, souligne la danseuse étoile qui interprète Anna depuis 2005. De toute façon, la ligne narrative du triangle amoureux est la plus intéressante et la plus forte. »

Abashova connait aussi bien la chorégraphie que le texte dont il est inspiré, lui qui était inscrit au programme obligatoire de l’école russe de son Ukraine natale. « C’était mon œuvre préférée de Tolstoï, surtout par rapport à ses autres romans qu’on devait lire, comme Guerre et Paix. Pour moi, c’était aussi l’occasion d’accéder à un roman d’amour que nos parents ne nous auraient possiblement pas donné le droit de lire autrement. »

Jusqu’au-boutisme amoureux, autodestruction, émotions brutes, les élans du personnage ont immédiatement interpellé son interprète. « J’ai toujours eu de la facilité à comprendre Anna, avec ses doutes et ses peines. Toutes les femmes ont déjà vécu un moment où elles se sentent incomprises de tous. Je vois des bribes de Karénina dans toutes les femmes que je croise. C’est un personnage très riche à jouer! »

Les spectateurs noteront d’ailleurs une transformation très nette d’Anna durant le spectacle. « La femme magnifique, habillée de robe et de diamants, va devenir presque nue. Ses mouvements plastiques vont changer, s’intérioriser et se casser. On assiste à un changement profond, tant au niveau du corps que des costumes. »

Rompre avec le classicisme

Les explications de la danseuse illustrent bien le travail du chorégraphe, qui accorde une importance capitale à l’évolution émotive de ses personnages et à la crédibilité de leurs mouvements. « Par exemple, Eifman va tout faire pour éviter certains sauts et pirouettes classiques chez les hommes, car il pense que ces fioritures tuent le sens du ballet. Il ne veut pas que les spectateurs se demandent pourquoi Karénine, un homme adulte, se met à tourner soudainement. Par contre, chez les femmes, il garde certaines conventions. »

Certaines, mais pas toutes. Depuis qu’il a créé sa compagnie en 1977, Boris Eifman tient à distance une partie des règles strictes de l’académisme russe, préférant se concentrer sur les sentiments. Sa danseuse principale parle de ses œuvres comme des ballets dramatiques. « Les danseurs qui sont uniquement forts techniquement ne restent pas longtemps avec nous. On doit avoir un véritable talent d’interprétation pour incarner nos personnages. »

Elle cite d’ailleurs la réaction de spectateurs autrichiens qui ont assisté récemment à une représentation de La Gisèle rouge, chorégraphiée par Eifman. « J’ai étudié le ballet à Vienne et je sais que les Autrichiens ont la réputation d’être assez froids durant un spectacle, mais cette fois-ci, ils pleuraient. Comme le ballet est un art sans paroles, les gens ont parfois du mal à lire ce qui se trame, quand ils assistent à une œuvre classique. Pourtant, la relecture d’Eifman permet de reconstituer des dialogues et de comprendre clairement ce qui se passe. »

Maria Abashova ne tarit pas d’éloges pour son chorégraphe. Pourtant, il a dû travailler pendant deux ans pour la convaincre de rejoindre sa compagnie. « Je ne le connaissais pas du tout à l’époque. Je l’ai découverte quand je suis arrivée à Saint-Pétersbourg. J’ai commencé à 19 ans chez Eifman et je ne l’ai pas quitté depuis », dira celle qui préfère taire son âge, mais qui précise tout de même qu’elle est déjà la maman de deux enfants.

« Anna Karénina » sera présentée du 15 au 18 avril à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts. Cliquez ici pour plus de détails.

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