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«Ils étaient quatre»: la déchéance des mâles trentenaires (CRITIQUE)

«Ils étaient quatre»: la déchéance des mâles trentenaires
Jérémie Battaglia

Après être devenu le porte-parole de la réflexion identitaire, avec sa trilogie Un, Deux et Trois, Mani Soleymanlou change complètement de registre en jouant et en signant la mise en scène d’Ils étaient quatre, un divertissement ponctué d’introspection sur les désirs des hommes dans la trentaine.

Écrite par Mathieu Gosselin, en collaboration avec les interprètes, la pièce met de l’avant quatre hommes directement inspirés des comédiens, quoiqu’agrémentés de plusieurs touches de fiction et de fantaisie, qu’il est impossible d’identifier, à moins de connaître intimement le quatuor.

On retrouve Mani, l’homme de théâtre anobli par Marc Cassivi, et accessoirement obsédé sexuel; Éric Bruneau, le tombeur de TVA qui rêve plus de tendresse que d’amour; Guillaume Cyr, le papa banlieusard qu’on a vu dans Louis Cyr, ainsi que Jean-Moïse Martin, le solitaire de 36 ans qui envisage faire quelque chose de sa vie… éventuellement.

Tous acteurs. Tous trentenaires. Tous présents à une fête aux apparences banales, mais qui finit par se transformer en terrain de chasse, en piste de danse, en terreau de réflexion et en baisodrome.

Plantés sur une scène sans décor, mais dont l’éclairage nous transporte aisément dans l’univers fêtard où l’on renifle et s’enivre, les quatre amis décrivent la beauté d’une rousse qui fait tourner les têtes sans effort. Pendant que l’un raconte ce qu’il lui ferait sexuellement, l’autre évoque son désir de s’enfermer chez lui, un troisième nous explique à quel point les femmes sont bluffées par ses envies d’affection, dénuées d’aspirations amoureuses, et le dernier tente de nous (se) convaincre qu’il ne traverserait jamais la clôture de l’infidélité.

Les personnages sont un brin unidimensionnel, mais le naturel avec lequel Bruneau, Cyr, Martin et Soleymanlou les interprètent offre une suite de moments hilarants. On regrette un peu que leurs questionnements sur la société n’apportent rien de nouveau au discours ambiant (le confort qui l’emporte sur la volonté de changer les choses, les problèmes hérités des baby-boomers, etc.), mais notre intérêt est ravivé dès que la pièce reprend le chemin, pourtant léger, de leur soirée endiablée.

Les esprits n’ont rien de sobres. Les instincts animaux se réveillent. La nuit ne veut pas dormir. Chaque nouveau détail apporte un élément jouissif au portrait d’ensemble et la soirée qui s’étire se conclut avec une finale aussi drôle qu’imprévisible.

La complicité entre les acteurs donne un souffle irrésistible à la pièce. L’autodérision dont ils font preuve, en jouant avec les frontières de la réalité comme dans Tout sur moi, permet de gagner l’affection du public en un clin d’œil. La musique euphorisante, parfois émouvante et admirablement éclectique plonge les spectateurs dans l’esprit de party décadent, en plus d’encourager les interprètes à effectuer une suite de déhanchements des plus divertissants.

On ne va pas voir Ils étaient quatre pour remettre en question sa vision du monde, mais pour accorder à son esprit 75 minutes d’allégresse et de surprises.

La pièce est présentée à La Licorne du 9 mars au 3 avril 2015. Cliquez ici pour plus de détails.

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