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Attribution de contrats informatiques: une enquête publique demandée

Attribution de contrats informatiques: une enquête publique demandée
Radio-Canada

Possible collusion, absence de concurrence, dépassement de coûts : les problèmes qui affligent le processus d'attribution des contrats informatiques à Québec sont tels qu'une enquête publique est réclamée par un collectif formé de 16 organisations.

Des groupes tels que la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), le Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), la Coalition des tables régionales d'organismes communautaires (CTROC), la Fédération interprofessionnelle de la santé au Québec (FIQ) montrent du doigt « certains stratagèmes collusoires » qui ont fait l'objet d'enquêtes par l'Unité permanente anticorruption (UPAC) et qui « prouvent que la collusion fait bel et bien partie du problème informatique au gouvernement du Québec ».

Ces problèmes récurrents coûtent cher au gouvernement fait valoir la coalition. Et, puisque Québec procède à l'exercice d'austérité devant mener à l'équilibre budgétaire, il s'avère essentiel de mettre un terme aux « fiascos informatiques ».

« Étourdissant et de plus en plus scandaleux » - Lucie Martineau

« Le gouvernement cherche de l'argent, on lui dit qu'il y a dans ses projets informatiques une source importante d'économies à condition de mettre fin au gaspillage » — Lucie Martineau, présidente générale du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ)

Le collectif fait valoir que « le recours aux sous-traitants pour des travaux récurrents en informatique, comme le soutien aux usagers par exemple, coûte deux fois plus cher en moyenne que le personnel à l'interne ».

En conférence de presse, trois représentants du collectif ont utilisé un chiffrier roulant à vive allure pour symboliser le « gaspillage » qu'entraîne de « perpétuels dépassements de coûts ». Un état de fait que Lucie Martineau du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ) a qualifié « d'étourdissant et de plus en plus scandaleux ».

En janvier 2013, le SFPQ avait demandé la tenue d'une enquête publique sur la gestion de l'informatique au gouvernement. À l'époque, le syndicat disait, et dit encore aujourd'hui qu'il y a, « des similitudes entre la gestion des technologie de l'information et la gestion des contrats dans le secteur de la construction ».

En 2013, le président du Conseil du trésor, Stéphane Bédard à l'époque, n'avait pas accédé à la demande du syndicat. Cela dit, M. Bédard n'avait pas exclu la possibilité d'élargir le mandat de la Commission Charbonneau afin de faire la lumière sur l'attribution de contrats gouvernementaux en informatique.

« S'il y avait des événements qui nous portaient à croire qu'on est dans quelque chose qui s'apparente au secteur de la construction, je n'hésiterais pas une seconde pour recommander à [la première ministre Marois] de procéder avec un mandat particulier à la commission Charbonneau », avait alors dit Stéphane Bédard. Il est à noter que le mandat de la commission n'a jamais été élargi en ce sens.

Des problèmes multiples

Deux ans plus tard, donc, le SFPQ réitère sa demande d'enquête publique. Lucie Martineau cite, au nom du collectif, les problèmes suivants :

  • absence de concurrence;
  • présence des mêmes firmes qui se séparent la majorité des contrats publics;
  • explosion des coûts;
  • retards dans les échéanciers de livraison;
  • dépendance du gouvernement envers les firmes privées.

Lucie Martineau souligne en outre que le vérificateur général de la province s'inquiète de la situation depuis des années.

En fait, déjà en 2005, le vérificateur général Renaud Lachance blâmait Québec pour sa « gestion inadéquate » du système informatique, sa « stratégie floue », son manque de transparence et la non-atteinte de ses objectifs.

Plus tard, en 2011, Renaud Lachance avait conclu que le projet visant à informatiser l'ensemble des dossiers médicaux et cliniques du réseau de la santé du Québec, connu sous le nom de Dossier santé du Québec (DSQ), était un « échec ».

« Nous devons enquêter véritablement pour vérifier une possible collusion et corruption dans l'octroi et la gestion des contrats publics en informatique. » — Fabian Rodriguez, FACIL, pour l'appropriation collective de l'informatique libre

Le tour de la question

Selon les membres du collectif, une enquête publique permettrait de faire le tour de la question dans le but ultime d'entreprendre une vraie réforme en entendant les propositions de tout le monde, y compris des citoyens et y compris des consultants en informatique qui travaillent avec le gouvernement.

Richard Perron du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ), décrit quand à lui une réalité troublante : « Quand on écoute certains des 3000 consultants qui sont engagés pour effectuer des travaux en informatique et qui coûtent très chers, jusqu'à 350 dollars de l'heure, quand on écoute leurs histoires, on s'aperçoit qu'on n'a pas toutes les informations. Des histoires qu'ils doivent garder pour eux justement parce qu'ils ont une relation, disons, privilégiée, avec les firmes qui facturent. »

« Ces gens-là ne sont pas payés ce que ça coûte, poursuit-il. Ce sont les firmes qui facturent le taux horaire [au gouvernement] et paient ensuite les consultants. [...] Et c'est pour ça que ça prend une enquête publique indépendante. »

À l'instar de Lucie Martineau du SFPQ, M. Perron affirme que son syndicat demande une enquête depuis longtemps. « Un gouvernement majoritaire, c'est dur à convaincre, des fois », dit-il. Et, aux détracteurs qui avanceraient l'idée qu'une enquête coûte cher, M. Perron rétorque qu'en ce moment, des milliards sont dépensés inutilement. Ces mêmes milliards, dit-il, qui sont manquants et qu'invoque le gouvernement pour justifier ses mesures d'austérité.

Lucie Martineau affirme qu'une enquête publique ratisserait plus large que ne peut le faire l'UPAC, dont le champ d'activités est limité. « On veut aller jusqu'à la manière dont on fait la gestion de ces contrats-là au gouvernement du Québec, explique-t-elle. L'UPAC, elle, est là pour des dossiers de soupçons de collusion et de corruption ».

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