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«Le Hobbit: la bataille des cinq armées», la trilogie de trop pour Peter Jackson? (VIDÉOS)

«Le Hobbit», la trilogie de trop pour Peter Jackson? (VIDÉOS)
Warner Bros

Le Hobbit: la bataille des cinq armées en salles au Québec le mercredi 17 décembre clôt la deuxième trilogie de Peter Jackson. Après Un voyage inattendu et La désolation de Smaug, ce volet referme - temporairement? - le travail d'adaptation de l'œuvre de J R.R. Tolkien par Peter Jackson. Et c'est une nouvelle que les spectateurs peuvent accueillir avec un certain soulagement.

La trilogie du Hobbit est celle qui contient le plus de défauts. Dès son élaboration, elle avait rencontré une série d'obstacles: un studio qui détient la moitié des droits, Metro-Goldwyn-Mayer (MGM), un temps au bord de la faillite, une grève des syndicats des acteurs en Nouvelle-Zélande et un changement de mains derrière la caméra.

D'abord confié aux soins du réalisateur mexicain Guillermo del Toro (Hellboy, Pacific Rim), le triptyque n'avait finalement pas quitté le giron de Peter Jackson, ravi de profiter d'un nouveau canevas sur lequel son amour des nouvelles technologies -3D et 48 images par seconde- pouvait s'exprimer.

Bande-annonce du Hobbit: la bataille des cinq armées:

Le succès économique du Hobbit et en particulier du dernier opus ne fait pas de doute. Il devrait protéger le cinéaste néo-zélandais des critiques mitigées qui ont accueilli la sortie des deux premiers films.

Mais La bataille des cinq armées ne dérogeant pas à cette impression générale un peu brouillonne, on est en droit de se demander si Peter Jackson n'a pas signé la trilogie de trop.

Disproportions

Tous les observateurs s'accordent à dire que la matière première du Hobbit -un livre qui tourne autour de 300 pages selon différentes éditions- ne permettait qu'une adaptation cinématographique unique: un long métrage introduisant les trois films du Seigneur des anneaux sortis entre 2001 et 2003.

Peter Jackson convainc même la MGM et Warner Bros de transformer le diptyque prévu en trilogie. De la même manière que les franchises Harry Potter, Twilight ou Hunger Games, le dernier chapitre est alors divisé en deux parties. "Nous avons le droit d'utiliser 125 pages de notes additionnelles dans lesquelles J R.R. Tolkien étend le monde du Hobbit" justifiait le réalisateur lors d'une conférence de presse en 2012.

Cette décision ubuesque en terme de récit peut expliquer le déséquilibre de la trilogie. Le poids émotionnel et financier repose entièrement sur un dernier opus qui, malgré tous les efforts de Peter Jackson et son équipe, laisse un sentiment mitigé. La bataille des cinq armées dénote aussi par rapport aux deux premiers opus qui tentaient de capter une génération plus jeune de spectateurs.

Les aventures de Bilbon Sacquet, de la Comté au Mont Solitaire, ont toujours été considérées comme plus accessibles que le voyage suicidaire de son neveu Frodon vers le Mordor. Une partie des reproches faites à Peter Jackson après la sortie du Voyage inattendu ressemblaient d'ailleurs à celles adressées à George Lucas lors de la sortie de La Menace Fantôme.

Enjeu économique

En Terre du Milieu, MGM et la Warner Bros se sont d'abord frottés les mains. La trilogie du Seigneur des anneaux est un énorme succès financier et rapporte aux studios plus de 3 milliards de dollars de recette à travers le monde. Pour garantir les entrées en salles, il suffit de capitaliser sur le reste de la bibliographie de J R.R. Tolkien et laisser une liberté artistique totale à Peter Jackson.

Un voyage inattendu, premier opus de cette nouvelle trilogie, confirme la formule et cartonne pour sa sortie en décembre 2012 avec 1 milliard de dollars au box-office mondial. Trois records tombent: meilleur jour de démarrage pour un mois de décembre, meilleur week-end de démarrage de décembre et meilleur démarrage de la franchise Seigneur des Anneaux.

L'enjeu était de taille puisque la franchise, comme le soulignait Variety, aura coûté aux studios presque le double de la première trilogie (561 millions de dollars contre 281, sans compter les dépenses en marketing).

266 jours de tournage en Nouvelle-Zélande devenue une destination touristique incontournable. En modifiant la législation du travail pour mettre fin à la grève des acteurs, le pays s'est même plié en quatre pour soutenir la saga qu'on retrouve dans des spots publicitaires pour la compagnie aérienne Air New Zealand.

Elijah Wood, Peter Jackson et un orque portant un masque à oxygène:

Symbole de ses enjeux, la Warner attaquera même les frères Weinstein (qui détiennent 2,5% particulièrement lucratif des droits de la franchise) pour plagiat, comme frappé par la maladie du dragon qui dévore le Roi sous la Montagne, Thorin, le poussant à sacrifier amitié et honneur dans sa défense du trésor et la recherche de l'Arkenstone.

Épique mais indigeste

Il est presque impossible de ne pas ressortir sonné de La bataille des cinq armées. Tous les habitants de la Terre du Milieu se sont donnés rendez-vous au pieds d'Erebor. Orques, trolls utilisés comme bélier, nains chevauchant des cochons sauvages, aigles ou chauve-souris géantes et elf fendant des légions de gobelins sur le dos d'un élan que n'aurait pas renié Hayao Miyazaki.

"Les spectateurs ont tendance à oublier ce qui se passe à la fin du Hobbit. Il pense que c'est un livre pour enfant mais c'est plutôt assez intense", rappelait la co-scénariste Philippa Boyens à USA Today. Superproduction épique, La bataille des cinq armées contient plus d'une demi-heure de combat en images de synthèse. Une gageure.

La méthode de Peter Jackson a fait ses preuves. En 2004, le dernier volet du Seigneur des anneaux, Le retour du roi, remporte onze Oscars dans chacune des catégories pour lesquelles il était nommé, égalant Ben-Hur et Titanic. Mais le réalisateur semble avoir perdu sa science chirurgicale.

Viggo Mortensen, qui incarne Aragorn dans la première trilogie, avait critiqué l'utilisation du CGI (images de synthèse) dans une longue interview donnée au Telegraph, revenant sur l'expérience d'un tournage avec Jackson et son utilisation des nouvelles technologies. “Peter Jackson a toujours était un 'geek' en matière de technologie. Une fois qu'il pouvait utiliser certains outils, il ne revenait plus jamais en arrière."

"Dans le premier film, La Communauté de l'anneau, Rivendell et le Mordor sont en partie reproduits en images de synthèse mais ils ont une qualité presque organique, un grain réaliste. Les acteur jouent parfois dans de vrais paysages. Le deuxième film l'est déjà moins à mon goût et il n'y a que des effets spéciaux dans le troisième. C'est grandiose, mais tout ce qui est subtil dans le premier film se perd dans les suivants. Avec les deux premiers Hobbit, c'est ce phénomène puissance 10.“

Boucle

"Sans coopération de la Fondation Tolkien, il ne peut pas y avoir de nouveaux films". En ajoutant des passerelles vers la trilogie du Seigneur des anneaux -notamment Legolas, interprété par Orlando Bloom, absent du livre- Peter Jackson referme la boucle et se garantit de nouvelles éditions DVDs réunissant les deux trilogies. En attendant de se laisser peut-être tenter par d'autres textes de l'auteur britannique comme Le Silmarillion.

"Les droits d'adaptation du Seigneur des anneaux et du Hobbit avaient été vendus par Tolkien à la fin des années soixante, ce sont ses seules oeuvres qui aient jamais été vendues", expliquait le réalisateur, précisant que les droits concernant les autres écrits de J.R.R. Tolkien étaient détenus par la Fondation Tolkien qui gère la succession de l'auteur britannique.

Le Hobbit: la bataille des cinq armées

La trilogie de trop pour Peter Jackson?

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