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Au Nigeria, les enlèvements d'adolescents continuent avec la disparition de trente jeunes dimanche

Nouvel enlèvement de 30 adolescents au Nigeria
AFP

Trente adolescents, des garçons et des filles, ont été enlevés dimanche 26 octobre par des islamistes présumés dans un village de l'État de Borno, dans le nord-est du Nigeria, a déclaré un responsable local.

"Des insurgés (...) ont enlevé des jeunes, garçons et filles, dans notre région. Ils ont pris tous les garçons de 13 ans et plus (...) et toutes les filles de 11 ans et plus. Selon nos informations, 30 jeunes ont été enlevés ces deux derniers jours", a déclaré Alhaji Shettima Maina, le responsable du village de Mafa, à des journalistes.

C'est dans ce même État de Borno, plus particulièrement dans la région de Chibok, que plus de 200 lycéennes avaient été enlevées par les islamistes en avril dernier. Depuis cet événement qui avait causé l'indignation internationale, la population continue à vivre dans l'angoisse. Attaques et kidnappings n'ont pas cessé.

Malgré l'annonce, le 17 octobre, par les autorités, d'un cessez-le-feu avec Boko Haram -très largement remis en cause par des experts et des responsables sur le terrain- cette région est toujours la cible d'attaques des islamistes.

Selon plusieurs témoignages d'habitants, environ 60 femmes ont été enlevées samedi 18 octobre dans les villes de Wagga et de Gwarta. En juin dernier, 60 autres jeunes femmes et jeunes filles avaient déjà été capturées, toujours dans ce même État de Borno.

7 euros et des noix de cola comme dot

A Wagga la semaine dernière, des islamistes armés étaient passés de maison en maison, et avaient emmené 40 jeunes filles selon des témoins. Les assaillants avaient "laissé 1500 nairas (7 euros) et des noix de cola dans chacune des maisons où ils ont enlevé des femmes, comme dot", a déclaré Lazarus Baushe, un des anciens de Wagga, à l'AFP.

Des habitants de la ville de Gwarta avaient aussi fait état du kidnapping de 20 femmes et jeunes filles. La vérification des informations sur les violences dans le Nord-Est est extrêmement complexe, à cause des liaisons téléphoniques difficiles et des déplacements presque impossibles.

Les jeunes, victimes idéales

Pour le moment non revendiqué, l'enlèvement de ces jeunes étudiants correspond aux motivations de Boko Haram. Comme l'a expliqué Mathieu Guidère, spécialiste du monde arabe, à L'Opinion, Abubakar Shekau, le chef du groupe, veut notamment revenir aux fondements de Boko Haram -dont le nom signifie "l'éducation occidentale est un péché" en langue haoussa- et combattre le modèle d’enseignement anglo-saxon.

L'enlèvement d'adolescents permet aussi au groupe radical de recruter de nouveaux membres et de compléter ainsi ses effectifs touchés par les attaques de l’armée nigériane. Sans oublier l'intérêt financier que de tels agissements représentent. "Les filles non mariées sont réparties en petit groupes et revendues à des filières de prostitution", selon Mathieu Guidère.

Selon Jean-Dominique Merchet, spécialisé dans les questions militaires, ce type d'organisations sont par ailleurs devenues de véritables "entreprises à communication massive". Et quoi de plus efficace pour se faire remarquer des médias que de s'en prendre ouvertement à des enfants. "Le terrorisme a besoin des médias pour exister, c'est notre tragédie", a reconnu ce journaliste sur i-Télé.

Trouble autour d'un accord

L'armée et la présidence nigérianes avaient annoncé le 17 octobre avoir conclu un accord avec le groupe islamiste armé, prévoyant notamment la libération des 219 jeunes filles de Chibok toujours portées disparues. Mais le porte-parole des services de sécurité nigérians, Mike Omeri, avait ensuite affirmé qu'aucun accord n'avait encore été conclu pour la libération des lycéennes.

À l'occasion d'un sommet avec des organisations économiques mondiales à l'Elysée le même jour, François Hollande avait confirmé de son côté l’accord entre le Nigéria et Boko Haram qui pourrait aboutir à la libération mais disait "attendre le résultat effectif".

Un cessez-le-feu dans la région n'a d'ailleurs pas été confirmé par Abubakar Shekau.

Des proches morts de chagrin

Tout autour de Chibok, "la plupart des villages ont été détruits et désertés", ces derniers mois, raconte Usman Peter, le père d'une des lycéennes. A Chibok, où plusieurs proches des victimes sont morts depuis le drame (notamment de crises cardiaques causées par le stress et le chagrin) le lycée public pour jeunes filles d'où les adolescentes ont été extraites de leur dortoir le 14 avril au soir est toujours en ruines.

"80 % du lycée a été détruit", raconte l'adjoint de la directrice, Bulamodu Lawan, "sur 29 salles de classe, il n'en reste que quatre". Avant d'emmener leurs otages, les membres de Boko Haram ont détruit leur dortoir mais aussi les bureaux de l'administration, la salle d'informatique, le laboratoire de chimie et la bibliothèque.

Le gouvernement nigérian avait pourtant promis d'aider à reconstruire ce lycée. Mais six mois plus tard, les habitants de Chibok n'ont reçu aucune aide et l'école est fermée. Les 57 adolescentes qui ont pu échapper à leurs ravisseurs au moment de leur enlèvement ont dû être réaffectées dans d'autres établissements, dans d'autres régions du pays.

Si les lycéennes finissent un jour par être libérées, leurs proches se demandent si elles pourront revenir à Chibok.

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