ART - La Célestine et Dora Maar vont s'offrir à nouveau au regard des visiteurs: après cinq ans de travaux, le musée Picasso rouvre ses portes samedi 25 octobre -date anniversaire de la naissance du peintre espagnol en 1881- avec une nouvelle présentation de sa collection et un nouveau directeur, Laurent Le Bon.
Nommé le 3 juin dernier, transfuge du Centre Pompidou-Metz, Le Bon a été bombardé à la tête de l'établissement après plusieurs mois de relations tendues entre le ministère de la Culture et le musée. Les retards sur le calendrier, la dégradation du climat social et une grave crise interne ont conduit au l'éviction de l'ancienne directrice, Anne Baldassari, en poste depuis 2005.
Cette dernière, sur proposition d'Aurélie Filippetti et après intervention du nouveau maître des lieux, a finalement accepté de procéder à l'accrochage inaugural, à la fois chronologique et thématique, qui vise à "restituer Picasso dans tous ses états". "Je ne suis pas venu dans une logique de rupture mais dans une logique de continuité", soulignait Le Bon avec qui le Huffington Post a pu échanger.
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Diplomate
Si l'ouverture du musée met fin à plusieurs mois de tensions, Laurent Le Bon souligne que "l'équipe est restée exactement la même" et ne cherche pas tirer la couverture à soi: "tout le monde est mobilisé depuis quatre mois. J'ai pu utiliser mon expérience, fixer une date symbolique et un objectif." Le personnage, dont on vante la simplicité et le professionnalisme, fait déjà recette.
"Je suis arrivé avec sérénité et l'envie d'écouter. Je suis content de voir que parfois, des énergies culturelles l'emportent. L'idée simple, c'était de montrer tous les grands chefs-d'œuvre qui ont été restaurés et offrir, dans la plupart des salles, un mélange des médiums. Vous pouvez trouver une peinture qui dialogue avec une sculpture et un dessin alors que les choses pouvaient être plus cloisonnées avant", poursuit-il.
Savoir "encyclopédique", proche de la créativité des artistes, dénicheur de tendances à venir, fédérateur et polyvalent: les compliments ne manquent pas pour décrire Laurent Le Bon. Il ne paraît pas illogique de rajouter "diplomate" pour être parvenu à convaincre sa prédécesseur de participer à la fête tout en résorbant l'ambiance plutôt délétère qui régnait à son arrivée à l'Hôtel Salé.
Atypique
Vue extérieure du Centre Pompidou-Metz
Fort de sa réussite au Centre Pompidou-Metz qu'il avait rejoint en 2010 -l'établissement a accueilli plus de deux millions de visiteurs depuis son ouverture, Laurent Le Bon qui fait partie d'une génération de conservateurs quarantenaires dont le travail est reconnu unanimement par le milieu, a depuis été annoncé candidat à plusieurs postes - notamment la présidence du Louvre, celle du musée national d'art moderne.
Ancien élève de Sciences Po Paris et de l'École du Louvre, il entre à l'École nationale du patrimoine, en sort avec les honneurs et commence sa carrière comme responsable de la commande publique à la Délégation aux arts plastiques du ministère de la Culture. C'est en mettant sur pied à Metz des expositions thématiques pluridisciplinaires comme Chefs-d'œuvre? ou 1917, qu'il alimente sa philosophie: "un musée n'est pas figé, il doit toujours être en mouvement".
S'il n'est pas un spécialiste reconnu du maître espagnol, il décrit sa relation sans fard avec l'artiste: "j'ai un rapport affectif et intime avec Picasso. J'étais là en 1985 à l'ouverture du musée et puis très jeune, j'ai profité du hasard et de ma présence à Mougins et Vallauris pour fréquenter des lieux que Picasso fréquentaient aussi. C'est sans doute l'artiste qui m'a le plus donné le goût de découvrir ce qu'est l'histoire de l'art."
Controverse
Une installation de Jeff Koons à Versailles
Avant son escapade messine, Laurent Le Bon aura beaucoup oeuvré pour le Centre Pompidou qu'il rejoint à la suite de son directeur d'alors, Alfred Pacquement. Il y organise plusieurs expositions, dont Dada en 2005, décrit par Libération comme "un grand foutoir de 2000 œuvres où l’une des salles tenait lieu à la fois d’entrée et de sortie." "Beaucoup n’ont d’ailleurs visité que cette salle", ajoutait avec humour Le Bon à l'époque.
En 2009, il est la tête pensante de l’événement Vides: une rétrospective, donnant à voir neuf salles vides. Mais c'est à Versailles qu'il déclenche des cris d'orfraies avec sa version du "off". Stars de l'art contemporain, Jeff Koons, Xavier Veilhan et Takushi Murakami sont successivement exposés au château et font grincer quelques dents.
Méthode
Laurent Le Bon au moment de l'exposition Vues d'en haut à Metz
Son premier choc artistique, Laurent Le Bon explique l'avoir vécu devant un tableau de Vassily Kandinsky, pionnier de l'art abstrait, au Centre Pompidou. "J’ai été formé à l’école du Centre Pompidou qui a inventé ce modèle -toujours d’actualité- où il n’y a pas de distinction entre collection permanente et exposition temporaire. L’accrochage change régulièrement pour créer l'événement et la passion", explique-t-il.
Un roulement promis au musée Picasso qui peut puiser dans une réserve de 4000 œuvres. L'occasion de souligner des facettes peut être méconnues du peintre aussi sculpteur, graveur ou dessinateur. "Picasso se réduit parfois à quelques clichés, mais ici, les visiteurs pourront découvrir toutes les formes de son œuvre", rappelle le directeur.
Et notamment le Picasso collectionneur puisque Renoir, Matisse, Derain, Modigliani ou Cézanne sont aussi exposés et dialoguent avec des toiles de l'Espagnol dans "les combles qui sont dédiés à la présentation, qui n'a jamais été faite sur un tel espace, de sa collection personnelle."
Découvrez quelques œuvres exposées au musée Picasso ci-dessous:
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