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«La vie domestique»: une journée chez une femme au foyer (PHOTOS)

«La vie domestique»: une journée chez une femme au foyer (PHOTOS)
FunFilm

Il y a les beaux discours sur l’égalité des sexes, le féminisme et son émancipation, mais rien n’y fait, la femme reste toujours cantonnée dans des rôles de la bonne épouse au foyer, constate la réalisatrice Isabelle Czajka. Une triste situation qu'elle met en scène avec brio dans son nouveau film La vie domestique en salles depuis vendredi. Entrevue.

Bien avant le tournage de son troisième long métrage, La vie domestique, Czajka se souvient d’une rencontre avec une jeune femme de 33 ans éduquée qui lui fait cette étonnante réflexion. «Elle venait d’avoir un enfant et elle me dit qu’elle avait de la chance, car son compagnon l’aidait beaucoup, explique la cinéaste. Elle pensait que la tâche d’élever son bébé lui incombait naturellement, elle se sentait redevable de son aide.»

Pour comprendre la portée d’une telle phrase et ses conséquences sur la destinée imposée aux femmes, la réalisatrice suggère alors d’inverser les rôles. «Et si c’était l’homme qui disait que sa copine est très gentille puisqu’elle a décidé de l’aider? Dites comme cela, les choses deviennent soudainement absurdes. Jamais on ne verrait un homme s’exprimer ainsi.»

Selon la cinéaste, les femmes n’en ont pas fini d’être enfermées dans une sorte d'asservissement social qu’elle tente de décrypter. «Je voulais essayer de mettre en lumière la répartition des rôles pour en révéler la domination masculine. Tout se passe à la maison où le quotidien des femmes est composé de multiples corvées à accomplir. Ce travail domestique est invisible et implicitement accepté.»

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Adaptation assez libre du roman Arlington Park de Rachel Cusk, La vie domestique raconte sur une journée l’histoire de Juliette (Emmanuelle Devos), qui voit d’un mauvais œil sa nouvelle vie dans une banlieue résidentielle de la région parisienne. Elle ne veut surtout pas devenir comme ses trois voisines, des femmes au foyer dans la quarantaine qui occupent leurs heures à élever des enfants, entretenir des maisons et accueillir des maris qui rentrent tard le soir.

«À l’origine, j’avais envie de m’inspirer de La promenade au phare, le roman de Virginia Woolf. Mais, j’ai abandonné le projet. Je ne voulais pas faire un film d’époque qui aurait sans doute été pris pour une œuvre du passé. Je voulais au contraire parler de la femme d’aujourd’hui. Je suis alors tombée sur le bouquin de Rachel Cusk dont l’aspect contemporain m’a tout de suite interpellée.»

Comme les Mme Dalloway ou Beautés désespérées de ce monde, les quatre figures féminines du film semblent le résultat générationnel d’une aliénation qui ne dit jamais son nom. «Autrefois, la religion dictait aux femmes leurs comportements, aujourd’hui, c’est la publicité qui remplit ce rôle. Sans la juger, l’œuvre concerne la fameuse ménagère de moins de cinquante ans. En plus de toutes ses fonctions à accomplir dans sa maison, une femme doit aussi répondre aux dictats de la publicité: être en forme, être belle et être sexuellement épanouie. Il lui faut remplir toutes ces cases au risque d’être considérée comme une mauvaise mère ou une mauvaise épouse.»

Malgré son propos résolument féministe, la réalisatrice tient à préciser que son objectif n’a jamais été celui de la dénonciation. «Je veux seulement donner une autre vision. La vie domestique est avant tout le résultat d’une réalité. Oui, plusieurs avancées importantes ont été faites ces dernières années. Mais il faut dire que la femme reste encore prisonnière de multiples pressions de réussite. Ce sont des faits que l’on ne peut plus nier.»

L’entrevue a été réalisée grâce à l’invitation des Rendez-vous d’Unifrance.

La vie domestique – FunFilm – Drame – 97 minutes – Avec Emmanuelle Devos, Julie Ferrier, Natacha Régnier, Helena Noguerra, Michaël Abiteboul et Laurent Poitrenaux – Sortie en salles le 18 juillet 2014 – France.

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