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Soupçonné de cambriolage, un adolescent rom est dans le coma après avoir été lynché

Soupçonné de cambriolage, un adolescent rom lynché
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Un adolescent rom était entre la vie et la mort lundi 16 juin après avoir été roué de coups par une douzaine de personnes qui le soupçonnaient de cambriolage dans une cité sensible de Seine-Saint-Denis. Le jeune de 16 ans vivait avec sa famille et d'autres Roms dans une maison désaffectée au bord de la Nationale 1, en face du quartier des Poètes à Pierrefitte-sur-Seine. Il a été retrouvé vendredi en fin de soirée, inconscient, dans un chariot de supermarché abandonné, selon une source policière.

D'après les premiers éléments de l'enquête, il aurait été roué de coups par des personnes qui le soupçonnaient d'avoir cambriolé quelques heures plus tôt l'appartement d'une habitante de cette cité. "Un groupe de plusieurs personnes est venu le chercher dans le campement et l'a emmené de force", a raconté une autre source policière. L'adolescent aurait alors été séquestré dans une cave, où ses agresseurs l'auraient violemment frappé.

François Hollande a dénoncé "des actes innommables et injustifiables, qui heurtent tous les principes sur lesquels notre République est fondée". Selon l'Elysée, le président de la République "demande que tout soit engagé pour retrouver les auteurs de cette agression".

Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve a lui condamné "avec la plus grande fermeté les violences infligées" au jeune homme, rappelant "qu’il appartient exclusivement aux forces de sécurité de faire respecter l’ordre public". "La police judiciaire est totalement mobilisée pour rapidement faire toute la lumière sur cette affaire, interpeller les auteurs des faits et les remettre à la justice", a-t-il ajouté. Interrogé par Le Monde, Manuel Valls a souhaité que "les responsables de cet acte inacceptable soient retrouvés dans les délais les plus rapides pour répondre de leurs actes devant la justice".

Aucune interpellation

Selon une source proche de l'affaire, "une douzaine de personnes" auraient participé au lynchage. C'est sa mère qui a signalé l'enlèvement à la police. Grièvement blessé, l'adolescent a été hospitalisé à Paris. "Son pronostic vital est engagé. Il est dans le coma", a précisé une source judiciaire. Personne n'avait été interpellé lundi soir dans cette enquête.

D'après la source judiciaire, le jeune homme était connu pour des faits de vol. Il avait été interpellé plusieurs fois depuis début juin, a précisé le maire de Pierrefitte-sur-Seine Michel Fourcade. Selon l'élu socialiste, plusieurs voitures ont eu leurs vitres cassées et ont été cambriolées ces dernières semaines dans la Cité des Poètes, suscitant la rancœur des habitants envers les Roms qu'ils accusaient d'être les auteurs de ces vols.

Dans la maison désaffectée, transformée en campement, des ordures s'entassaient lundi dans le jardin, où de petites cabanes ont été bricolées. Ion Vardu, un voisin roumain, a expliqué à l'AFP que l'adolescent avait investi le lieu il y a "trois semaines environ" avec quelque 200 autres Roms originaires de Roumanie, tous partis après le drame.

"Ils ont laissé tout ça" en partant "tout de suite", a-t-il raconté en montrant des matelas, des soutiens-gorge, des roues et des emballages alimentaires qui jonchent le sol. "Choqué", Ion Vardu assure ne pas savoir qui a pu lyncher le jeune homme: "Ici c'est tranquille d'habitude, on n'a jamais eu de problèmes avec les habitants".

Les violences contre les Roms en augmentent selon les associations

"Chaque fois qu'en France, une telle violence se déchaîne, c'est l'Etat de droit qui recule. La République française doit la protection à tous, où qu'ils vivent, et quelle que soit leur origine", a réagi le président du conseil général de Seine-Saint-Denis Stéphane Troussel, dénonçant une "agression odieuse sous couvert de règlement de comptes".

Les violences contre les Roms sont, selon les associations de défense de ces minorités, en augmentation. Pour SOS Racisme, "ce grave passage à l'acte renvoie à la dégradation alarmante de l'image des citoyens roms ou supposés roms dans notre société et au résultat manifeste des tensions nauséabondes dans lesquelles sont plongés nos concitoyens". "On attend un changement radical de discours et une dénonciation extrêmement claire des violences qui les concernent", a renchéri le président du mouvement antiraciste européen EGAM Benjamin Abtan.

En octobre 2012 à Marseille, des Roms avaient été chassés de leur campement sous la pression d'habitants hostiles qui avaient brûlé les résidus du camp. En mai 2013, des familles roms avaient été agressées sur une aire d'accueil, à Hellemmes (Nord). A Paris, la justice a relaxé en mai un homme soupçonné d'avoir jeté un produit corrosif sur le matelas que des Roms avaient installés près de son domicile.

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