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Finissants de l'École nationale de l'humour : un spectacle en demi-tons (CRITIQUE)

Finissants de l'ENH: un spectacle en demi-tons (CRITIQUE)
AGENCE QMI

Du stand up, des thèmes souvent convenus, quelques gags maladroits, mais aussi des personnalités attachantes et des nouveaux visages qu’on prendra plaisir à voir grandir et évoluer sur nos scènes dans les prochaines années : voilà qui résume la prestation des finissants de la cuvée 2014 de l’École nationale de l’humour (ENH), lesquels s’arrêtaient jeudi à Montréal, au Club Soda, dans la foulée de la tournée qui les mène aux quatre coins de la province depuis la fin mars.

Devant un public gagné d’avance, les jeunes humoristes ont montré ce qu’ils ont dans le ventre, et on pouvait déjà déceler, dans ce lot de 12 étoiles montantes, celles qui risquent éventuellement de briller avec force sous les projecteurs. Jouons le jeu des prédictions et amusons-nous à deviner les noms qui orneront les marquises des plus prestigieuses salles d’ici quelques années.

Preuve qu’on garde souvent le meilleur pour la fin, ce sont les trois derniers artistes à avoir approché le micro qui nous ont le plus fait rire. Avec son numéro intitulé J’aurais besoin de votre signature à côté du X pour officialiser le contrat svp, Joe Guérin avait piqué notre curiosité avant même d’ouvrir la bouche. Cette «bibitte» hyperactive pourrait être le fruit d’un croisement entre Louis-José Houde et Jean-Thomas Jobin, avec l’énergie contagieuse du premier et le ton absurde de l’autre.

Joe a ouvert les vannes en imitant une tortue de mer qui conduit une mobylette, a raconté une blague en jouant de l’harmonica (il a bel et bien fait les deux en même temps, mais passons outre le résultat), a rendu hommage au chien Tobby, qui a pratiqué tous les sports imaginables dans une kyrielle de films, et a annoncé, sans crier gare, au beau milieu de son texte, qu’il avait besoin de se «reposer les yeux». Un vrai beau délire qui séduirait sans doute les adorateurs des Denis Drolet.

Avec un nom comme Philippe-Audrey Larrue-St-Jacques, le garçon peut aisément croire qu’une carrière d’amuseur se dresse devant lui, le sens de l’autodérision lui étant pratiquement insufflé à la naissance. Et, ça tombe bien, celui qui le portait jeudi en possède tout un. Larrue-St-Jacques a parlé de son éducation bien-pensante et de ses parents adeptes des Fables de La Fontaine en traçant le parallèle avec ses besoins, jadis, d’adolescent «normal». Ses «diantre» récurrents, mêlés aux allusions de partys de plage et de Coors Light, ont fait mouche. Il s’est mérité une chaleureuse ovation.

Enfin, nous décernons notre troisième coup de cœur à Marie-Lyne Joncas. Avec le récit de son premier amour, de ses envies de vengeance contre son ex, de la paranoïa qui teinte ses relations de couple, la jeune femme n’a certes rien inventé, mais elle a livré son monologue avec grand aplomb et a inséré suffisamment de répliques salées et inattendues pour attiser notre intérêt.

Quelques points faibles

D’autres diplômés de la cohorte 2014 de l’ENH pourraient aussi se démarquer à moyen ou long terme. Simon «Zod» Girard, dans la peau d’un personnage d’enquêteur à l’accent pointu et à la prose irréprochable, a proposé un univers complètement différent de ce à quoi les spectateurs québécois sont habitués. Les amateurs d’humour fin l’aimeront. Saluons également le charisme et le sens du punch du Français Alban Jouvin (et son segment intitulé (514) 803-8069) et de Charles Deschamps, qui surfe sur sa passion pour les sports extrêmes.

Comme l’a déclaré Louise Richer, directrice de l’ENH dans son mot d’ouverture, ces jeunes «ont sué sang, eau, textes et idées…. et un peu de bière» pour atteindre le Graal que représente pour eux leur actuelle tournée. Donc, saluons leurs efforts et ne nous attardons pas trop longuement sur les points faibles du spectacle. Mentionnons néanmoins que le personnage de chanteur latino de Christopher Reggiani sentait un peu le déjà-vu. Y’aurait-il un peu de Stéphane Rousseau dans les sources d’inspiration de Christopher? Qui plus est, ce dernier a livré ses lignes d’une voix forte et dans une prononciation qui laissait parfois à désirer.

Petite déception, aussi, de constater que certaines représentantes féminines du groupe ont assis leurs propos sur des clichés maintes fois usés pour se faire valoir : des plaisanteries sur les «filles de la campagne» pour Marie-Line Pitre, la crainte de devenir maman pour Myriam Alepin… Lançons toutefois une fleur à Ève Côté qui, à travers sa tirade sur la peur de vieillir, a réussi à décocher quelques perles, du genre : «Du drame humain, j’en ai vu passer, j’ai sept ans de Facebook dans le corps».

À la mise en scène, Stéphane Mayer et Alexis Cadieux ont accompli un formidable boulot en jumelant les finissants deux par deux, à tour de rôle, pour introduire les numéros. Jolie façon de sortir de sa zone de confort et d’exploiter à peu près tous les registres.

La tournée des finissants de l’École nationale de l’humour se poursuivra jusqu’en juillet et se conclura au Zoofest, en marge du Festival Juste pour rire.

Consultez le site Internet de l'École nationale de l'humour pour connaître toutes les dates.

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