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Commission Charbonneau : après Sintra, la commission entend DJL

Commission Charbonneau : après Sintra, la commission entend DJL
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Le président de l'entreprise DJL, Marcel Roireau, nie avec véhémence avoir fait de la collusion avec Sintra pour se partager le marché du pavage au Québec et soutient que si DJL est plus présente dans certaines régions, et moins ailleurs, c'est uniquement en fonction d'occasions d'affaires.

Un texte de Bernard Leduc

et François Messier

Le témoin précédent, Normand Bédard, ex-président de Sintra, avait cependant soutenu que ces deux entreprises avaient fait de la collusion sur des contrats de pavage du ministère des Transports du Québec (MTQ) et respectaient les territoires de chacun dans la province.

Après Sintra, DJL est l'entreprise qui a obtenu le plus de contrats du MTQ. Les deux entreprises, qui se sont ainsi partagés 42 % des contrats de pavage entre 1997 et 2012, sont d'ailleurs celles qui possèdent le plus grand nombre d'usines d'asphalte (enrobés bitumineux) au Québec, soit 39 pour Sintra contre 28 pour DJL.

Durant cette période, DJL a décroché 1027 contrats totalisant 884 millions de dollars, pour 5,6 % de la valeur totale des contrats attribués par le ministère. Dans le seul domaine du pavage (dit aussi asphaltage), DJL a raflé 455 millions de dollars en contrats, soit 14 % de la valeur totale de tous les contrats..

Durant cette même période, l'entreprise a versé 188 000 $ aux partis politiques, majoritairement au PLQ.

Comme Sintra, DJL a connu une forte expansion non par la construction de nouvelles usines d'asphalte, mais par l'acquisition d'usines d'entreprises concurrentes. L'entreprise DJL est ainsi très présente dans la région de Montréal, ainsi que dans l'Outaouais, la Montérégie, l'Estrie et la Gaspésie.

Le témoignage de M. Bédard avait permis de comprendre qu'à chaque usine correspondait souvent un territoire sur lequel elle avait l'exclusivité pour les contrats du MTQ. Acquérir une nouvelle usine permettait donc d'acquérir un certain monopole, respecté en raison d'ententes de collusion entre concurrents.

Mais Marcel Roireau soutient plutôt que si l'entreprise est présente à certains endroits et absente ailleurs, c'est uniquement pour des questions d'opportunités d'affaires et non en raison d'une présumée entente collusionnaire avec Sintra.

Ainsi, affirme-t-il, si l'entreprise n'est pas à Laval, c'est parce « qu'il n'y a pas d'argent à faire » en raison des difficultés qu'il y aurait à percer le marché, et non parce qu'on lui a dit de ne pas y être. Et si DJL domine le marché en Gaspésie, c'est parce qu'aucun compétiteur ne serait intéressé à venir dans un marché où il n'y en pas assez pour deux joueurs.

Marcel Roireau est entré en 1985 au service de DJL (alors Désourdy) pour en devenir le vice-président en 2002 puis président à partir de 2010. DJL, dont le chiffre d'affaires (2013) est de 320 millions, compte 1400 employés. DJL dépend d'Eurovia qui est propriété de Vinci, une société européenne côtée en bourse.

Vinci a été condamné pour des pratiques anticoncurrentielles dans le domaine des routes ayant eu lieu dans les années 1990.

L'essentiel des contrats de DJL est auprès du ministère des Transports du Québec et des municipalités. Ses activités vont du pavage au génie civil en passant par la construction de routes.

Les dessous d'un stratagème

Lors de son témoignage, Normand Bédard a admis que Sintra, le plus important fournisseur de services du MTQ, avait fait de la collusion à grande échelle dans diverses régions du Québec dans le cadre de lucratifs contrats de pavage.

Selon M. Bédard, Sintra s'entendait notamment avec DJL dans plusieurs régions du Québec pour rafler la majorité des contrats. Selon l'ex-président de Sintra, cette collusion fonctionnait déjà au milieu des années 80 et s'est poursuivi jusque dans les années 2000.

M. Bédard a d'ailleurs admis qu'il lui était arrivé de discuter de cette collusion avec M. Roireau.

Ce stratagème a sans contredit coûté des millions de dollars aux contribuables québécois, la marge de profits sur les contrats obtenus en collusion étant nécessairement plus élevés que celle obtenue pour les contrats en libre concurrence.

Selon des chiffres fournis par la commission, Sintra, une filiale de la française Bouygues, déjà condamnée pour des pratiques anticoncurentielles en Europe, a obtenu des contrats totalisant 1,6 milliard de dollars entre 1997-1998 et 2011-2012, ce qui représente 10,6% de la valeur totale des contrats attribués par le MTQ.

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