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«Hot Dreams» de Timber Timbre: au-delà du rêve américain

«Hot Dreams» de Timber Timbre: au-delà du rêve américain

L’album Hot Dreams, cinquième projet de Timber Timbre, s’ouvre sur la pièce Beat the Drum Slowly, à l’intro très Leonard Cohen. « The cameras rolling » chante Taylor Kirk de sa voix chaude et dramatique. Mystérieux, faste et un brin austère, certes, mais ô combien envoutant et sophistiqué que ce Hot Dreams. Quelques jours avant la sortie du disque, Le Huffington Post Québec a rencontré les deux protagonistes du projet, le multi-instrumentiste Simon Trottier ainsi que le leader et chanteur du groupe.

Avec Timber Timbre, la vie est contrastée. Rien de vraiment pur. Le sentiment est poussiéreux, les intrigues remplies de détours et les pièces tapissées de reliefs. Comme à l’habitude, c’est doux et mordant à la fois. En fait, nous ne sommes guère loin des ambiances du très respecté Creep On Creepin’ On, paru en 2011. C’est juste «moins creepy», plus aéré.

On y retrouve bien entendu des arrangements angoissants ici et là, comme sur les 90 dernières secondes de Beat the Drum Slowly. Ça grince et ça gratte dans l’univers glauque (pensons à la chanson Resurrection Drive Part II) de Timber Timbre, aucun doute. Mais bon, rien ne justifie non plus les références au ténébreux ou à l’horrifique. Certains font allusion à l’univers poético-tordu de David Lynch tandis que d’autres se réfèrent à la poésie cathédrale de Morricone. Il ne manque que l’esprit fantastique de Tim Burton!

Pellicule

Qu’à cela ne tienne, Hot Dreams ne nous plonge jamais très longtemps dans l’inquiétude comme sur le précédent opus. Tout dépendra bien entendu de notre sensibilité à soutenir le non conventionnel de cette musique somme toute très fluide, organique et «chaleureuse». Comme le soulignera si bien Trottier en entrevue, tout est une question de perception. This Low Commotion pourra valser ou déstabiliser l’auditeur, tant l’approche est second degré et humour noir, à l’instar de ces atmosphères si finement exploitées dans certains films qui ont fait le succès du cinéma américain, dont Trottier et Kirk sont friands.

«Plusieurs personnes associent la fin de la pièce Hot Dreams à une ambiance très romantique, raconte Trottier. Cette ligne de saxophone jouée par Colin Stetson a néanmoins été composée à la guitare. L’image que j’avais en tête était plus celle d’un Robert De Niro qui marche dans la pluie dans une ruelle inconnue du film Taxi Driver. Pour moi, c’était comme suivre quelqu’un de mystérieux dans un décor mélancolique (ou tragique).»

Ils ne s’en cachent pas, les deux acolytes se passionnent du septième art et sont très conscients qu’ils marquent l’imaginaire avec une musique que l’on peut de plus en plus qualifier de cinématographique. Avec le disque Hot Dreams, ils poussent encore plus loin leur marque : la mythologie cinématographique américaine a été une source d’inspiration importante dans le processus créatif de l’album.

«Hot Dreams a été enregistré d’abord au Banff Center en Alberta, indique Trottier. Nous connaissions un ingénieur de son qui s’appelle Graham [Lessard]. Nous y avons échangé beaucoup d’idées et travaillé sur la structure de l’album pendant deux semaines. Nous avions accès au studio aussi donc nous avons fait toute la basse et la batterie des morceaux. Ensuite, nous sommes allés au National Music Center de Calgary. C’est un véritable musée d’instruments. On y trouve une collection débile de Mellotron, Wurlitzer, clavecins anciens, vieux pianos, jusqu’à la guitare-synthétiseur. On avait accès à un éventail incroyable. C’est une des raisons qui explique l’ajout de synthétiseurs supplémentaires (Timber Timbre utilisait déjà l’orgue) dans notre musique. Il faut dire qu’un studio a été installé pour des artistes invités à s’en servir à la fermeture du musée.»

«Nous nous sommes sérieusement amusés avec Pro Tools et tous ces instruments, de renchérir Taylor Kirk. Mais sans devenir fous. La plupart des cordes entendues sur l’album proviennent en réalité du Mellotron. Au fond, nous avons été tentés par certains outils, mais nous savions ce que nous voulions. Nous sommes pas mal structurés. Nous avons enregistré de nombreuses pistes avant de choisir les bonnes. C’est notre genre de spontanéité.»

Pour le reste, Timber Timbre a pris place au convoité studio montréalais Hotel 2 Tango, où gravitent certains membres de Godspeed You! Black Emperor. En fait, Graham Lessard est venu à Montréal pour terminer le travail.

La musique avant les mots

«Cette fois, la musique est venue en premier lieu, explique Kirk. Tous les mots sont arrivés plus tard. Et rien n’a été facile. J’ai même fait appel à une amie [Simone Schmidt] pour l’écriture de certaines pièces. Elle a aussi écrit toutes les paroles de Curtains!? »

«Je me suis notamment laissé influencer par Los Angeles où je suis allé l’an dernier pour des vacances. J’ai été vraiment touché par les paysages, le climat, l’énergie et la façon de vivre. J’habitais à Laurel Canyon, situé à 15 minutes de West Hollywood. Je me suis tranquillement mis à penser à l’époque durant laquelle tous ces bons films ont été produits. Je parle surtout de la fin des années ’60 au début des années ’80. Nous avons même discuté de certaines œuvres durant l’enregistrement de Hot Dreams. En fait, j’ai étudié en cinéma. J’ai toujours été passionné du milieu. Dans tout notre travail musical, on ressent cet intérêt. D’une certaine façon, chaque morceau de Hot Dreams pourrait dénoter un genre cinématographique propre. J’ai toujours eu l’impression que Hot Dreams était un album ancré dans le territoire américain. »

Sur Run From Me, l’esthétique est très années ’60. Au début, on croirait entendre Elvis Presley, ou presque. C’est crooner, blues et americana. Lentement, la mélodie du piano laisse place à un riff de guitare acoustique obsédant et un trémolo vocal féminin (Romy Lightman) angélique, quasi biblique. Une seconde voix, celle de leur collègue Mika Posen (la violoniste) accompagne Kirk. Tout fait penser à la trame sonore d’un western spaghetti.

«Je me suis également beaucoup laissé entraîné par la musique de Lee Hazlewood, souligne le chanteur. Sa musique est comme une peinture très exotique des États-Unis. Même chose pour Roger Miller. C’est comme si j’avais écrit des chansons pour ces artistes, mais portées par ma voix qui n’a pas le même registre.»

Une dose de rock

Au sujet du spectacle, le duo Kirk/Trottier sera bonifié du batteur Olivier Fairfield et de Mathieu Charbonneau (Avec pas d’casque, The Luyas), qui ont aussi apporté leur touche vintage à l’album Hot Dreams. Quant à la fidèle violoniste Mika Posen, elle ne sera pas, à moins d’une surprise, de la prochaine tournée du groupe car elle joue maintenant avec la Danoise Agnes Obel.

Contrairement aux autres concerts des années passées, on doit s’attendre à une facture résolument plus rock. C’est du moins ce que les Montréalais pourront constater le 19 septembre, au Métropolis.

Sous l’étiquette Arts & Crafts, Hot Dreams sera disponible dès le 1er avril.

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