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La justice turque ordonne la levée du blocage de Twitter décrété par Erdogan

La justice turque ordonne la levée du blocage de Twitter décrété par Erdogan

La justice turque a défié mercredi le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan en ordonnant la levée du blocage du réseau Twitter, largement dénoncé comme étant une mesure de "censure" et la marque de la dérive autoritaire de son régime.

Saisi par l'opposition et des associations turques, un tribunal administratif d'Ankara a jugé cette décision "contraire aux principes de l'Etat de droit" et prescrit sa suspension à l'autorité administrative des télécommunications (TIB).

Le gouvernement a fait savoir qu'il se conformerait à ce jugement. "Nous appliquerons la décision du tribunal. Elle peut ne pas nous satisfaire, mais nous nous y conformerons", a assuré le vice-Premier ministre Bülent Arinç devant la presse.

Le blocage restait toutefois effectif mercredi, le TIB disposant d'un délai de trente jours pour appliquer la décision du tribunal, qu'il en fasse appel ou pas.

A quelques jours d'élections municipales sous haute tension, cet organe placé sous l'autorité du gouvernement avait interdit l'accès à Twitter sur instructions expresses de M. Erdogan, décidé à en finir avec la diffusion quotidienne sur internet, depuis des semaines, d'accusations de corruption qu'il considère comme un "montage".

Depuis sa mise en oeuvre jeudi, M. Erdogan a expliqué plusieurs fois sa décision, dénonçant la publication sur le net d'attaques qui "menacent la sécurité" de la Turquie.

Sans commenter les conclusions des juges, le Premier ministre a encore accusé Twitter de "ne pas respecter les lois turques et de traiter la Turquie comme un pays du Tiers-Monde", mercredi pendant une réunion électorale à Karabuk (nord).

Le principal parti d'opposition, qui figure parmi les plaignants, s'est de son côté réjoui de la décision du tribunal administratif d'Ankara.

"On ne peut pas laisser la technologie être réduite au silence par un régime totalitaire", a déclaré à l'AFP un des vice-présidents du Parti républicain du peuple (CHP), Mrehan Halici, "pour les régimes qui utilisent les interdictions, la censure, la fin est proche".

Le blocage de Twitter a été rapidement et assez largement contourné par une partie de ses 12 millions d'utilisateurs turcs, mais il a provoqué une avalanche de critiques, aussi bien en Turquie qu'à l'étranger.

Dans un contexte préélectoral très tendu, l'opposition a fondu sur M. Erdogan, l'accusant une nouvelle fois d'être un "dictateur" et de vouloir étouffer les enquêtes sur la corruption qui ont abouti à l'inculpation de plusieurs dizaines de ses proches.

Le président turc Abdullah Gül, lui-même utilisateur assidu des réseaux sociaux, a une nouvelle fois marqué sa différence avec le Premier ministre en exprimant lui aussi publiquement son hostilité à cette interdiction. "On ne peut pas approuver le blocage total des réseaux sociaux", a-t-il réagi.

De nombreuses capitales étrangères ont elles aussi fait connaître leur mécontentement et leur inquiétude aux autorités d'Ankara. Le secrétaire d'Etat adjoint américain pour les affaires publiques, Douglas Frantz, a ainsi qualifié l'interdiction de Twitter d'"autodafé du XXIe siècle" et exhorté la Turquie à revoir sa décision controversée.

Le gouvernement turc a expliqué le blocage total de Twitter par l'impossibilité d'obtenir, en dépit de décisions de justice, le retrait de sites internet des extraits de conversations téléphoniques piratées mettant en cause M. Erdogan et ses proches.

Le site, qui a annoncé mercredi avoir lui-même porté plainte pour obtenir le déblocage de son réseau, a toutefois contesté l'argumentaire du gouvernement, affirmant qu'il n'avait jamais obtenu communication de ses décisions.

Twitter a toutefois précisé avoir "retenu" certaines informations "personnelles" afin que ses abonnés turcs n'en ait pas connaissance.

Le Premier ministre accuse ses ex-alliés de l'organisation du prédicateur musulman Fethullah Gülen, qui vit aux Etats-Unis, d'être à l'origine de la diffusion de ces écoutes et des accusations de corruption qui pèsent sur lui.

Cette polémique intervient à quelques jours d'un scrutin municipal ayant pris des allures de référendum pour M. Erdogan, qui règne sans partage sur la Turquie depuis 2002.

ba-pa/bds

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