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Comment Facebook a perdu les jeunes

Comment Facebook a perdu les jeunes

En quelques années, le site de Mark Zuckerberg s'est imposé comme le portail le plus important de la toile, au coude à coude avec Google. Mais alors qu'il souffle ses 10 bougies le 4 février, Facebook est confronté au défi de conserver sa base originale de jeunes utilisateurs. Ceux par qui le succès est venu.

La "tyrannie du cool", c'est la maladie dont souffre le réseau social pour son entrée dans l'âge adulte. Réunissant toujours plus de personnes, Facebook est rentré dans le rang et se dissocie malgré lui de son identité désinvolte. Aujourd'hui tout le monde est sur Facebook: parents, grands-parents, enfants de la famille, collègues... On maîtrise davantage nos contenus: l'image qui y est renvoyée est publique, notamment depuis que ses services forcent les utilisateurs à s'inscrire sous leur vrai nom.

Mais plus que tout, Facebook a vu sa démographie évoluer. Qui se souvient que la première version servait à noter les étudiants les plus sexy de l'université de Harvard? Aujourd'hui, des adultes parfois âgés l'utilisent pour retrouver des amis perdus de vue depuis longtemps et pour rester en contact avec leur famille et leurs collègues. "Les gens blaguent sur le fait que pour un adolescent, ce n’est pas cool d’avoir sa mère sur Facebook. Mais ce n’est même plus la mère, c'est la grand-mère que l'on y croise aujourd'hui", explique Lou Kerner, fondateur de la société d’investissement Social Internet Fund. "On ne peut pas rester cool pour toujours" , ajoute-t-il.

Pour les ados, Facebook fait figure d'ancêtre du web

Si l'on donne la parole aux jeunes, Facebook peut être perçu comme une plate-forme du passé. Une interface qu'ils ont connu en faisant leurs premiers pas sur Internet. "Je crois qu'on commence à se lasser", relève Aurélien, 16 ans. "Facebook fait figure d'ancêtre et il y a beaucoup d'autres plate-formes plus fraîches, qui ne souffrent pas de ses défauts", rajoute-t-il. Il évoque pêle-mêle "des règles de confidentialité peu évidentes", et le caractère "intrusif" que Facebook peut occasionner entre ses utilisateurs. Qui n'est jamais tombé sur un épisode un peu trop privé d'une connaissance? Et cette crainte de perdre le contrôle fait se poser la question de continuer à alimenter son profil.

Si Facebook est loin de disparaître, malgré ce qu'évoquait une étude un peu farfelue de 2 chercheurs de Princeton -qui comparaient le règne de Facebook à une vulgaire courbe épidémiologique-, l'entreprise entre dans une phase de maturité. Le nombre d'inscrits augmente encore (100 millions de plus en 2013), mais les jeunes se désintéressent de plus en plus. Environ 25% des ados américains (13-17 ans) ont fui vers d'autres plate-formes depuis 3 ans.

Dans le même temps, une étude relayée le 23 octobre par nos confrères du HuffPost US révèle que Facebook a perdu sa place de site préféré des adolescents américains au profit de Twitter. Lorsqu'il s'agit de se retrouver entre eux, les jeunes ados tendent ainsi à investir d'autres réseaux sociaux, où la présence adulte est moins importante. Pas forcément une bonne nouvelle pour Facebook, surtout si l'on considère le pouvoir d'influence de cette tranche d'âge sur les utilisations d'Internet.

Les succès de Snapchat, Twitter ou Pinterest alimentent cette crainte que Facebook séduise moins et finisse par sombrer dans l'oubli, à l'image de son prédécesseur MySpace.

Snapchat, le roi des cours de récré

La star des cours de récré, c'est désormais Snapchat, l'application qui permet de s'envoyer des photos visibles pendant un temps très court (entre 1 et 10 secondes). Snapchat séduit un public d'utilisateurs jeunes, qui s'adressent plus de 400 millions de "snaps" chaque jour, soit davantage de photos échangées que sur Facebook. Et les médias aiment opposer les deux réseaux. Selon le magazine BusinessWeek, son fondateur Evan Spiegel "semble considérer Facebook comme Zuckerberg considérait Google: un pouvoir établi à combattre".

L'ironie veut que Facebook a voulu racheter Snapchat l'an passé pour la somme de 3 milliards de dollars. Refusé. Et Google aurait également subi la même déconvenue. L'histoire est amusante si l'on se remémore que Mark Zuckerberg avait lui-même refusé une offre de Yahoo! en 2006. Le petit génie n'était encore que le patron d'une boîte cool, tandis que le géant représentait un membre de l'establishment du web.

Ask.fm recueille également pas mal de succès ces derniers mois. Le portail fonctionne sur le principe des questions-réponses: on s'y crée un profil sur lequel d'autres internautes, anonymes ou non, posent leurs questions. Le site, qui a fait parler de lui cet été lors d'une affaire de harcèlement en ligne, a été visité par 1,3 million de Français en mars. La moitié d'entre eux était âgée de moins de 17 ans, selon Le Monde.

Instagram, racheté pour 700 millions de dollars en avril 2012, rencontre aussi un vrai succès chez les jeunes. 3% des Américains âgés de 18 à 29 ans qui possèdent un téléphone intelligent utilisent ainsi cette application de partage de photos et de vidéos, selon une étude du Pew Research Center, citée par.

Trop complexe, trop intrusif

Moins intrusives, ces plate-formes permettent aux jeunes de conserver un semblant d'intimité. On communique surtout par l'image, en adressant quelques commentaires à une communauté triée sur le volet. Il n'y a pas des centaines de paramètres de confidentialité. L'utilisateur accepte qui a le droit de voir ses contenus, c'est tout. Exactement comme sur Facebook il y a quelques années, avant que l'on soit obligé de créer des filtres pour définir qui pouvait voir le profil, publications, photos, photos postées par les amis etc... Aujourd'hui chaque fonctionnalité est personnalisable, mais c'est cette complexité qui fait fuir les jeunes (et parfois les moins jeunes aussi).

Mais si les jeunes se désintéressent à Facebook, ce n'est pas pour autant qu'ils se désinscrivent. Comme l'expliquait Slate, le réseau social fait aujourd'hui figure d'annuaire 2.0. "Facebook a créé ainsi une sorte de passeport numérique certifié, le visa d’entrée sur l’Internet civilisé (…), c’est finalement comme dans la vraie vie. Facebook, c’est quand le prof fait l’appel au début du cours. Snapchat, c’est le délire avec les amis à la récré", explique le site internet.

Pour Lou Kerner, il ressemble désormais à un "utilitaire". "Et Facebook fait cela avec beaucoup de succès", relève-t-il. Pour l'analyste, "la perte de fréquentation par les adolescents est plus que compensée par le gain de fréquentation et d'engagement par des gens plus âgés". Le cabinet de recherche Trefis a aussi jugé que le vieillissement des membres de Facebook pourrait être positif pour ses revenus, les usagers plus âgés ayant aussi plus de pouvoir d'achat. "Les annonceurs mettent des contenus promotionnels sur Facebook pour une seule raison: générer des ventes. La vaste majorité des achats en ligne vient d'utilisateurs de 25 ans et plus", relève Trefis. "Avec ces chiffres à l'esprit, le déclin des utilisateurs âgés de 13 à 24 ans devient presque hors de propos". L'âge de la maturité qu'on vous dit.

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