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Commission Charbonneau: «On va parler à Pauline» - Michel Arsenault

Commission Charbonneau: «On va parler à Pauline» - Michel Arsenault
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Jean Lavallée nie avoir fait des démarches auprès du Parti québécois, au printemps 2009, afin de le convaincre de ne pas appuyer la tenue d'une commission d'enquête sur l'industrie de la construction. Il semblait par ailleurs convaincu que le Parti libéral, alors au pouvoir, ne consentirait pas à tenir l'enquête publique que réclamait alors la défunte Action démocratique du Québec.

« S'ils veulent faire une enquête sur les syndicats, va falloir que tous les deux on s'assoie, pis parler à nos amis du PQ », lance Jean Lavallée au président de la FTQ Michel Arsenault dans une conversation enregistrée entre eux, le 20 avril 2009.

« Faut pas que le PQ embarque dans ça à cause que si y'embarquent dans ça, y vont se faire ramasser eux aussi », ajoute l'ex-président de la FTQ-Construction, à qui M. Arsenault réplique : « Ben y sont mal pris en ostie, parce qu'on a un deal avec Blanchet [sic] ».

Jean Lavallée a confirmé qu'il s'agit de Claude Blanchet, ex-PDG du Fonds et époux de Pauline Marois, alors chef de l'opposition péquiste. Il ne sait rien cependant du deal mentionné et nie avoir rencontré ce dernier.

« Les libéraux n'embarqueront pas dans une affaire d'enquête avec les syndicats, y'a rien pour une enquête dans ça », poursuit Jean Lavallée, ce à quoi répond Michel Arsenault : « Le PQ touchera pas à ça non plus [...] On va parler à Pauline ».

L'histoire en décidera autrement, puisque le PQ emboîtera le pas à l'ex-ADQ (CAQ) à l'automne 2009 en prenant aussi position pour une commission d'enquête sur l'industrie de la construction. Pressé de toutes parts, le gouvernement de Jean Charest annoncera finalement à l'automne 2011 la tenue de la commission, présidée par la juge France Charbonneau.

Jean Lavallée soutient qu'aucune rencontre ni conversation n'a eu lieu par la suite avec le PQ, du moins de sa part. Quant à « Michel », dit-il, « Vous lui demanderez ».

« J'ai pas rencontré personne au PQ, pas dans cette période-là, certain, et à ce sujet-là. On voulait en parler au PQ, mais ça s'est pas concrétisé. »

— Jean Lavallée

Dans une autre écoute électronique, du 4 mai 2009, c'est cette fois Jean Lavallée et Normand Trudel qui discutent d'approcher le PQ pour le convaincre de ne pas militer en faveur d'une commission d'enquête. M. Lavallée soutient que, là encore, il n'y a pas eu de suite, du moins de sa part. Normand Trudel est un entrepreneur de Mascouche arrêté en 2012 dans le cadre du projet Gravier lors duquel l'UPAC a démantelé un réseau de partage de contrats municipaux sur la Rive-Nord de Montréal.

M. Lavallée a cependant confirmé avoir fait de nombreuses contributions politiques au PQ, mais ajoute ne plus en faire depuis quelque temps. Il admet aussi que la FIPOE, un local de la FTQ-Construction dont il a longtemps été le patron, a déjà fourni un service d'ordre au PQ lors d'élections et de manifestations. Enfin, dit-il, sa « femme a travaillé 10 ans au PQ, au bureau du premier ministre ».

«C'est très inquiétant, très préoccupant!» - Lise Thériault, PLQ

Le PLQ a réagi sans tarder aux allégations contenues dans les écoutes électroniques diffusées à la commission.

La porte-parole de l'opposition officielle en matière d'éthique, Lise Thériault, estime que le PQ ne peut pas se défiler et doit répondre aux questions que soulèvent les propos de MM. Lavallée et Arsenault, au premier chef sur ce fameux deal avec Claude Blanchet évoqué par l'ex-président de la FTQ.

«Une écoute électronique, ça ne ment pas [...] pis quand on dit qu'il y a un deal, ben c'est parce qu'il y a un deal : Madame Marois doit nous dévoiler c'est quoi le deal.»

— Lise Thériault

« Ça nous confirme les liens douteux entre la première ministre, son mari Claude Blanchet et la haute direction de la FTQ », a-t-elle soutenu, disant craindre que M. Arsenault ne dispose d'un moyen de pression indu sur la première ministre pour des choses faites avec son mari.

Le chef du PLQ Philippe Couillard a fait écho aux propos de sa députée et demandé à la première ministre Pauline Marois d'offrir des explications publiques.

«Tout le monde au Québec veut savoir c'était quoi le deal.»

— Philippe Couillard

La députée de la CAQ et ex-adéquiste Sylvie Roy a elle aussi appelé la première ministre Marois à s'expliquer publiquement sur ce « deal ».

Celle qui fut la première à demander la tenue d'une commission d'enquête publique, le 1er avril 2009, se demande en fait si les liens de son mari avec la FTQ peuvent expliquer que le PQ ait attendu six mois avant de de lui emboîter le pas.

«Quels sont les liens entre elle et la FTQ-Construction? Est-ce que c'est ça qui a entraîné un délai de six mois avant qu'elle ne demande une commission d'enquête?»

— Sylvie Roy

Le PQ a « fait le ménage »

Réagissant à des allégations selon lesquelles la FTQ a fait des démarches auprès du PQ pour le convaincre de ne pas militer pour une commission d'enquête, le leader parlementaire du gouvernement, Stéphane Bédard, a défendu bec et ongles la réputation de la première ministre Pauline Marois, qui est actuellement en mission économique en Europe.

Ces allégations lui « donnent le haut-le-coeur », a affirmé M. Bédard en entrevue à Radio-Canada, ajoutant que, malgré les pressions effectuées sur Mme Marois, « aucune menace n'a pu avoir d'effets sur elle ou sur la tenue d'une commission parlementaire ».

Le ministre péquiste Bernard Drainville a pour sa part réagi en rappelant que son parti s'était rapidement positionné en faveur d'une commission d'enquête sur la construction.

« Pendant trois ans, on l'a demandée, la commission, on s'est levé, je ne sais pas combien de centaines de fois en chambre pour la demander. S'il y en qui espéraient nous décourager de la demander, visiblement ils ont frappé un mur, un mur d'intégrité », a fait valoir le ministre responsable des Institutions démocratiques.

Bernard Drainville a ajouté que depuis que le PQ est au pouvoir, il a « fait le ménage » en adoptant une série de lois sur les contrats publics, le financement des partis politiques et le sort réservé aux élus municipaux mis en accusation.

Il n'a cependant pas abordé la question de ce fameux deal évoqué par Michel Arsenault.

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Tony Accurso

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